Une approche des secteurs d’activité, des renouvellements de poste, de recrutements à envisager.
⇒ Les secteurs concernés par la progression des emplois
♦ Forte progression des services aux entreprises et de la santé.
Ce poids des services traduit la place importante dans l’emploi, d’une part des services aux entreprises, d’autre part des services d’utilité collective soutenus par la socialisation des dépenses d’éducation, de santé et d’action sociale.
La trace qu’a laissée la crise liée au Covid-19 avantage encore plus fortement les secteurs de la santé et du numérique. Elle pénalise en revanche les activités fondées sur les interactions sociales (hôtellerie-restauration, commerce, spectacles) et sur la mobilité (transports) qui créeraient moins d’emploi que par le passé.
♦ La construction serait stimulée par l’investissement et l’accroissement des besoins de rénovation des bâtiments pour répondre notamment aux exigences d’efficacité énergétique de la transition bas carbone. Après un cycle baissier de près de dix ans (80 000 emplois perdus entre 2009 et 2019), et poursuivant la reprise constatée depuis 2017, le secteur (y compris les activités immobilières) afficherait une forte croissance : il devrait créer 190 000 emplois entre 2019 et 2030.
♦ Les effectifs des métiers industriels progresseraient, mais la part de l’emploi industriel dans le total resterait stable à 10%. L’emploi dans la production industrielle stricto sensu, étant en partie externalisé (intérim, conseil, distribution), baisserait légèrement. Elle serait le signe d’un recentrage de l’industrie sur certaines activités stratégiques (pharmacie, produits informatiques) et déterminantes dans la transition bas carbone (matériels de transport).
L’agroalimentaire continuerait d’être dynamique, bien qu’à un rythme moins soutenu que dans la décennie passée.
En revanche, l’emploi continuerait de se replier dans les secteurs de basse technologie très concurrencés par les pays émergents (fabrication de caoutchouc plastique et de produits minéraux, métallurgie) et dans la maintenance confrontée à d’importants gains de productivité (maintenance prédictive assistée par ordinateurs).
♦ Enfin les services généraux de l’administration continueraient de se replier, de même que l’emploi agricole.
Le maintien de taux d’intérêt bas et la numérisation des usages dans la banque et l’assurance devraient induire dans ces secteurs des gains de productivité défavorables à l’emploi.
⇒ Au niveau des diplômes des futurs recrutés
♦ 1,8 million d’emplois supplémentaires pour les diplômés du supérieur.
Les créations d’emploi continuent à être globalement favorables aux diplômés de l’enseignement supérieur qui occuperaient près d’un emploi sur deux en 2030 (47% contre 43 aujourd’hui), alors que les emplois exercés par ceux qui n’ont pas dépassé le baccalauréat diminueraient de près de 800 000.
40% des créations d’emplois exercés par des diplômés du supérieur seraient concentrées dans :
– les activités juridiques, comptables et de gestion, les services administratifs et de soutien, et le commerce, avec chacun entre 200 000 et 300 000 créations nettes d’emplois.
– les activités informatiques, la construction, la santé, l’hôtellerie-restauration, les activités récréatives et culturelles et la R & D, avec avec une augmentation des effectifs comprise entre 80 000 et 150 000.
-Dans l’industrie, les effectifs de ces diplômés seraient en progression de 10%.
Cette croissance des postes de diplômés est tirée par le dynamisme des activités informatiques, pour la santé, la R & D et dans une moindre mesure, les activités juridiques, comptables et de gestion.
À l’inverse, dans le commerce, l’hébergement- restauration, les services administratifs et de soutien, les activités récréatives et culturelles et la construction, c’est l’augmentation tendancielle du niveau d’études des recrutés qui contribue le plus à la hausse de l’emploi occupé par les diplômés du supérieur.
♦ S’agissant des actifs en emploi n’ayant pas dépassé le baccalauréat,
la construction créerait près de 55 000 postes entre 2019 et 2030, malgré l’augmentation tendancielle de la qualification dans le secteur.
La santé et le médico-social gagneraient respectivement environ 120 000 postes occupés par des personnels non titulaires d’un diplôme du supérieur, essentiellement dans l’accompagnement des patients et des personnes fragiles.
⇒ Les 4 métiers les plus créateurs d’emploi (entre 110 000 et 115 000 chacun)
♦ Les ingénieurs informatiques, les infirmiers-sages-femmes, les aides-soignants et les cadres commerciaux. Viendraient ensuite les aides à domicile (+100 000) et les ouvriers qualifiés de la manutention (+80 000), qui devanceraient les cadres des services administratifs et financiers et les ingénieurs et cadres techniques de l’industrie (respectivement +75 000).
Il est à noter que les cadres du bâtiment (+60 000) et les personnels d’études et de recherche (+50 000) figureraient parmi les quinze métiers les plus dynamiques.
♦ Mais certains métiers sont très liés à un secteur : les ouvriers du gros œuvre du bâtiment exercent ainsi à 8 % dans des entreprises de la construction, les caissiers sont principalement recrutés dans le secteur du commerce et les cadres de la banque sont très sensibles à l’évolution des activités financières et d’assurance. Mais ce n’est pas le cas de tous les métiers. Un informaticien, un comptable, un secrétaire, un avocat peuvent être embauchés par une entreprise de construction, de l’automobile ou du conseil. De la même manière, les cuisiniers ne sont pas tous salariés dans l’hôtellerie ou la restauration mais sont aussi nombreux à travailler pour les collectivités, dans la santé ou l’action sociale notamment.
La progression des métiers de l’industrie s’explique par le recentrage sur le cœur de métier de l’industrie qui a conduit à l’externalisation de fonctions support, y compris stratégiques (conseil), de contrôle (qualité, environnement) et de distribution. Symétriquement, certaines fonctions industrielles, comme la maintenance des équipements ou le contrôle de la qualité, sont devenues essentielles dans de nombreux secteurs d’activité. De ce fait, les ingénieurs et cadres de l’industrie comme les techniciens et agents de maintenance sont aujourd’hui souvent recrutés par les secteurs du conseil (stratégie, analyses techniques) et du commerce (maintenance et contrôle qualité), même s’ils exercent également dans des activités industrielles.
⇒ Les départs en fin de carrière constituent la grande majorité des postes à pourvoir
Pour chaque métier, les postes à pourvoir sont la somme des créations nettes d’emploi et des départs en fin de carrière. Au niveau global, de 2019 à 2030, les postes à pourvoir s’établiraient à 760 000.
♦ Les 15 métiers avec le plus de postes à pourvoir peuvent être classés en trois catégories. chaque année, les départs en fin de carrière représentant 90% du total.
-Il y a d’abord ceux qui créent peu ou pas d’emplois, et dont les postes à pourvoir correspondent avant tout aux remplacements des départs en fin en carrière : les agents d’entretien, les enseignants, les conducteurs de véhicules, les vendeurs et les ouvriers qualifié du second œuvre du bâtiment.
-Ceux dont la dynamique des effectifs contribue à hauteur d’au moins un quart aux postes à pourvoir : cadres administratifs, comptables et financiers, cadres commerciaux et technico-commerciaux, aides à domicile, aides-soignants, infirmiers, sages-femmes, ouvriers qualifiés de la manutention, médecins et techniciens de la maintenance. Enfin, les ingénieurs de l’informatique et les ingénieurs et cadres techniques de l’industrie se distinguent par leurs dynamiques propres, car les créations d’emplois y représentent au moins la moitié des postes à pourvoir.
-Dans certains métiers, les déséquilibres pourraient représenter environ un tiers des besoins de recrutement.
Ces déséquilibres sont en outre « partiels », au sens où ils seront comblés, ou accentués, au moins en partie, par les mobilités professionnelles, par les allers-retours emploi-chômage, par des inactifs réintégrant le marché du travail (ou en sortant, hors retraite) ou enfin par le solde migratoire.
♦ Parmi les 15 métiers aux plus forts déséquilibres potentiels, 9 figurent dans les 15 métiers aux plus forts besoins de recrutement. On retrouve ainsi les agents d’entretien et les aides à domicile, les conducteurs de véhicules, les ouvriers qualifiés de la manutention, deux métiers de cadres (cadres commerciaux et de services administratifs et financiers), les aides-soignants, les ouvriers qualifiés du second œuvre du bâtiment et, enfin, les enseignants.
3 métiers afficheraient des déséquilibres potentiels importants en raison d’un faible afflux de jeunes débutants : les employés de maison (dont font partie les personnels de ménage), les assistants maternels (respectivement 8% et 10% de jeunes débutants) et les professions intermédiaires et administratives de la fonction publique (13% de jeunes débutants).
Tous les métiers à forts besoins de recrutement ne présenteraient pas de déséquilibres aussi élevés. Chez les enseignants, les ingénieurs et cadres techniques de l’industrie ainsi que les ingénieurs de l’informatique, les jeunes débutants combleraient plus des trois quarts des besoins de recrutement.
Ces besoins seraient presque totalement couverts par les arrivées de jeunes débutants chez les infirmiers et sages-femmes, les médecins et les techniciens et agents de maîtrise de la maintenance.
Parmi les domaines professionnels comptant plus d’un million de personnes, 2 afficheraient des déséquilibres potentiels élevés qui représenteraient au moins la moitié de leurs besoins de recrutement : les transports, logistique et tourisme et les services aux particuliers et aux collectivités.
Dans les métiers du soin et du nettoyage (aide à domicile, agents d’entretien) souvent choisis comme solution de repli après un épisode de chômage ou d’inactivité, le nombre d’arrivées en cours de .carrière pourrait néanmoins atténuer leur déséquilibre potentiel
♦ La majorité des métiers en tension aujourd’hui continuerait de l’être ou verrait leurs difficultés de recrutement s’aggraver d’ici 2030 (47 sur un total de 83 métiers). Dans ces professions, la résorption des tensions actuelles et des déséquilibres futurs passerait principalement par une amélioration de leur attractivité (aide à domicile, personnels de ménage, conducteurs d’engins du bâtiment et des travaux publics).
Pour une large part, l’exercice de ces métiers nécessite des compétences techniques spécifiques qui s’acquièrent par le biais d’une formation professionnelle initiale ou continue (aides-soignants, cadres du bâtiment et des TP, ingénieurs de l’informatique, ingénieurs et cadres de l’industrie ou encore bouchers, charcutiers et boulangers.
⇒ Une typologie des métiers
En fonction de leurs modes d’alimentation et de leur dynamisme démographique et économique.
♦ La 1ére catégorie rassemble des métiers particulièrement attractifs à la fois pour les jeunes sortis d’études et pour les professionnels déjà en poste, dynamiques en termes d’emploi et moins affectés par les départs en fin de carrière. Ils ont des besoins de recrutement spontanément largement couverts par leur vivier de recrutement (professionnels du droit, professions paramédicales, techniciens des services administratifs, comptables et financiers, personnels d’études et de recherche.
Les ingénieurs et cadres de l’industrie, les ingénieurs de l’informatique et les cadres du bâtiment feraient exception, en léger déficit de main-d’œuvre, étant donné leur dynamique très forte d’emploi.
♦ La 2éme catégorie rassemble des métiers de première expérience, alimentés par des jeunes en début de carrière qui, après plusieurs années d’expérience, évoluent vers un poste de niveau de qualification supérieure ou vers d’autres métiers proches en termes de situations de travail.
Les sorties importantes dans ces métiers témoignent soit d’une promotion de travail jugées difficiles (employés de l’hôtellerie-restauration, ouvriers qualifiés du gros œuvre du bâtiment), soit encore de la non-durabilité de l’emploi (professionnels de l’action culturelle et sportive ou agents administratifs d’entreprise). La majorité de ces métiers devrait avoir un vivier de recrutement suffisant pour pourvoir les postes inoccupés. Certains seraient même en excès de main-d’œuvre, soit parce que les jeunes débutants y sont particulièrement nombreux (professionnels de l’action sociale, culturelle et sportive), soit parce que le métier est peu dynamique (employés administratifs d’entreprise).
♦ La 3éme catégorie regroupe les métiers de seconde partie de carrière. Ils recrutent plutôt des personnels expérimentés (peu de jeunes débutants) conduisant à d’importants départs en fin de carrière. Ils ont par le passé attiré de nombreux professionnels en provenance d’autres métiers. Dans d’autres métiers expérimentés, dont l’emploi ne progresse pas, les postes vacants pourraient plus aisément être pourvus par des professionnels promus (cadres de la banque et des assurances, secrétaires de direction).
♦ La 4éme catégorie regroupe les métiers qui ont du mal à attirer. Ils se caractérisent par la maturité des personnels qui les occupent mais également par une faible attractivité pour les débutants: ils ne devraient pas avoir un vivier de recrutement suffisant pour compenser les départs des seniors. Les employés de maison (personnels de ménage), les agriculteurs, les ouvriers du textile et du gros œuvre du bâtiment sont dans cette configuration.
Si la faible attractivité de certains métiers, souvent peu qualifiés, pose la question de leurs conditions de travail (pénibilité, non-durabilité de l’emploi) et de rémunération, ce sont aussi des métiers qui recrutent plus souvent des chômeurs et qui constituent des voies d’insertion pour les immigrés. Pour les métiers expérimentés, attirer les professionnels déjà en poste pourrait ne pas suffire et nécessitera sans doute de faire appel à des jeunes débutants et des chômeurs, qu’il s’agira de former à des situations de travail spécifiques.
Pour en savoir davantage : https://www.strategie.gouv.fr/publications/metiers-2030