L’entrepreneuriat et l’enseignement supérieur.


"DE QUOI L’« ENTREPRENEURIAT » EST-IL LE NOM DANS L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ?", CEET CNAM, septembre 2019

“La formation à l’entrepreneuriat” dans le supérieur dépasse largement le fait de former des créateurs d’entreprise.

 

À partir du tournant des années 1990-2000, le terme d’« entrepreneuriat » s’installe dans la langue française, comme une traduction approximative d’entrepreneurship, pour désigner non seulement la création d’entreprise, mais aussi des compétences et des manières d’être associées à la figure de l’entrepreneur.

Ce terme se diffuse notamment dans l’enseignement supérieur, en lien avec des enjeux de la valorisation économique de la recherche d’une part, et d’éducation des étudiants à l’« entrepreneuriat » ou à l’« esprit d’entreprendre » d’autre part.

 

Après une décennie d’initiatives peu coordonnées en la matière, l’adoption, en 2009, du « Plan Étudiant Entrepreneur » dessine les contours d’une action publique nationale visant à encourager les universités à proposer des dispositifs dans ce domaine. La création en 2014 des Pôles étudiant pour l’innovation, le transfert et l’entrepreneuriat (Pépite, 30 à ce jour) puis du statut national étudiant-entrepreneur (SNEE) et du diplôme d’établissement étudiant-entrepreneur (D2E) ont marqué des étapes importantes dans la montée en puissance de cette politique. Mais la formation des étudiants à l’entrepreneuriat touche encore peu d’étudiants : seuls 3700 auraient bénéficié du statut en 2018 sur les 2,6 millions d’étudiants.

 

Les créations d’entreprises réalisées par les étudiants ou les jeunes diplômés restent assez rares quoiqu’en légère augmentation. En 2014, la figure du « jeune créateur diplômé » correspondrait en effet à 8% des nouveaux entrepreneurs.

 

L’enquête, menée auprès des agents impliqués dans les dispositifs au sein des établissements, donne à voir des appropriations plurielles, qui sont à la fois fonction des contextes locaux et des trajectoires de ces acteurs. La capacité de cette thématique à rencontrer des préoccupations d’ordre social (insertion), économique (innovation) et proprement universitaires (pédagogie, « gouvernance » des établissements, recherche) participe dès lors de son succès.

 

Si ces différents usages ne sont pas incompatibles les uns avec les autres, il n’en reste pas moins que leur coexistence est au principe de tensions entre les acteurs ainsi que d’une forme de perplexité de la part des pouvoirs publics quant à l’évaluation des dispositifs qu’ils financent : faut-il prendre comme indicateur le nombre d’étudiants formés ? L’insertion professionnelle de ces derniers ? Le nombre de créations d’entreprises ? Et à quel horizon temporel ? Seul le temps long permettra de mieux cerner les effets de ces formations en matière d’insertion des diplômés, de promotion des vocations entrepreneuriales et/ou de contribution de ces nouveaux entrepreneurs à l’innovation et à la croissance.

 

“Ce que l’introduction de ces dispositifs est susceptible de produire (ou de ne pas produire) à terme reste donc encore largement indéterminé, mais on peut néanmoins rendre compte, de manière plus immédiate, de leur impact sur le curriculum universitaire. Ce dernier prend la forme d’un processus croisé d’adaptation de l’université aux catégories du monde économique et de mise aux normes académiques de l’enseignement d’entrepreneuriat”

 

” Quoiqu’il en soit, hormis dans quelques grandes écoles où les étudiants possèdent des ressources spécifiques leur permettant d’envisager réellement la création d’entreprises, l’enjeu à l’université est sans doute moins, en tous cas à court terme, la fabrique d’entrepreneurs que l’élaboration d’un modèle d’enseignement supérieur s’éloignant de l’objectif de transmission de savoirs et de formation d’un esprit critique, au profit de méthodes et de contenus pédagogiques directement tournés vers l’entreprise. La création de ces filières et de ces dispositifs dédiés à l’entrepreneuriat participe plus généralement de la montée en puissance des savoirs gestionnaires dans l’enseignement supérieur – que l’on pense à la place croissante accordée, au sein des écoles d’ingénieurs, aux compétences managériales – comme dans les différentes sphères de la société”

 

Pour en savoir davantage : http://ceet.cnam.fr/publications/connaissance-de-l-emploi/de-quoi-l-entrepreneuriat-est-il-le-nom-dans-l-enseignement-superieur–1117502.kjsp