Les 7 années d’observation des jeunes sortis de formation initiale en 2010, qui complètent celles des Générations antérieures (1998 et 2004), permettent de pointer les évolutions majeures des 20 dernières années : une entrée plus difficile dans l’emploi et des écarts de rémunération plus faible entre le salaire de démarrage et 7 ans après.
⇒ Quels sont les premiers apports du suivi sur 7 ans de la Génération 2010
La mauvaise conjoncture en début de carrière a retardé durablement le processus d’accès à l’emploi de la Génération 2010 et s’est traduite par :
-La réduction du temps passé en emploi, et donc de l’expérience professionnelle accumulée (61 mois contre 67 mois pour la génération 1998.
-La part des jeunes dont la trajectoire est marquée par un certain éloignement de l’emploi (17% des jeunes de 2010 contre 11% de ceux de 1998) dû soit par du chômage persistant ou récurrent (13% contre ), soit par des situations d’inactivité durable 4 % pour les deux Générations). Ils sont par ailleurs davantage à avoir repris des études ou une formation longue (9 % contre 5).
-Au-delà d’une conjoncture défavorable, la génération 2010 a dû composer avec des transformations plus structurelles du marché du travail : pratiques de recrutements, dont les modalités d’embauches privilégient toujours plus les différentes formes de contrats à durée limitée, avec le risque d’une trappe à précarité; les trajectoires de stabilisation en emploi à durée indéterminée sont moins nombreuses (de 66% à 55), alors que la part des emplois à durée limitée reste stable (18% contre 19); la part de jeunes en emploi à durée indéterminée 7 ans après la sortie est en baisse d’une génération à l’autre (86% contre 80).
–La valorisation de l’expérience acquise étant plus faible, les évolutions professionnelles tant en matière de rémunérations que de positions professionnelles, sont d’ampleur plus modérée : le niveau de salaire médian à la première embauche progresse seulement de 19% en 7 ans, contre une hausse de 38% pour leurs aîné·es; 27% des jeunes de la Génération 2010, contre 31 de ceux de la Génération 1998,, ont connu une progression dans la hiérarchie des catégories socioprofessionnelles et 13% une régression dans cette hiérarchie (contre 11% pour leurs aîné·es).
⇒ Qu’en est-il pour les non diplômés ?
La précédente enquête Génération 2004 montrait déjà que, dans un contexte conjoncturel marqué alors par la crise de 2008, le rôle protecteur du diplôme s’était renforcé; de même, au sein de la Génération 2010, les variations en fonction du diplôme se sont creusées : les chances de connaître une trajectoire de stabilisation en CDI étaient 6 fois moins élevées pour un·e sortant·e sans diplôme que pour un·e diplômé·e de l’enseignement supérieur au sein de la Génération 1998 ; c’est désormais 9 fois moins dans celle de 2010.
Ce sont les non-diplômé·es qui ont vu leur situation se dégrader le plus fortement : la part de temps qu’ils et elles ont passé en emploi sur les 7 années chute de 65 à 46%. Les trajectoires marquées par un éloignement de l’emploi :
– du fait d’un chômage récurent ou persistant (34%) ou d’une inactivité durable (11%)
– sont désormais aussi fréquentes que celles dominées par l’emploi, alors qu’elles ne représentaient que 28% des trajectoires de leurs aîné·es non diplômé·es;
-de plus, parmi les parcours dominés par l’emploi, on constate la très forte érosion des trajectoires de stabilisation en CDI (21 contre 41% pour la Génération 1998), désormais dépassées par celles caractérisées par un enchaînement durable de CDD (24%). Au bout du compte, le CDI apparait de moins en moins accessible pour les non-diplômé·es, puisque seul·es 56% de ceux en emploi 7 ans après la fin de leur scolarité en bénéficient (contre 72% pour la Génération 1998).
Toutefois :
–Pour ceux qui accèdent à l’emploi, les possibilités de progression dans l’échelle des catégories socioprofessionnelles entre la première embauche et le dernier emploi occupé, comme les risques de régression, restent comparables par rapport à leurs aîné·es.
-Le niveau des salaires perçus a progressé par rapport à ceux de leurs homologues de 1998, sous l’effet protecteur des revalorisations successives du SMIC.
⇒ Qu’en est-il pour les jeunes diplômé·es de l’enseignement secondaire
Ces cerniers sont également affecté·es par un accès à l’emploi, et en particulier au CDI, plus difficile pour la Génération 2010. Pour autant, les trajectoires dominantes restent celles marquées par l’emploi et la stabilisation en CDI (49 contre 61%). Pour ces diplômé·es, se manifeste également une tendance croissante à la reprise d’études, notamment des sortant·es au niveau IV.
⇒ Qu’en est-il des conditions d’emploi offertes aux diplômé·es du supérieur ?
La stabilisation en CDI demeure la norme et concerne les 3/4 d’entre eux. L’expérience en emploi accumulée lors des 7 premières années reste massive, est comparable à celle accumulée par leurs homologues de la Génération 1998.
Cependant, cette expérience est devenue moins rémunératrice : l’accroissement du salaire médian entre la première embauche et le dernier emploi occupé, qui oscillait entre 44 et 54% selon le type de diplôme entre 1998 et 2005, plafonne au mieux à 31% entre 2010 et 2017 (pour les bac+5 et plus); au point que les derniers salaires perçus, après environ 6 ans d’expérience accumulée, sont inférieurs, en euros constants, aux salaires perçus par leurs homologues de 1998.
Cette modération de la progression salariale se conjugue à une baisse marquée des évolutions de carrière ascendantes (23 contre 30%) et donc un accès plus lent et moins fréquent aux postes de cadres (1,8 fois moins de chances d’être classé·es cadre et 1,4 fois plus de chances d’être classé·es en profession intermédiaire)
Noter que ceux qui ont perdu le plus en salaire entre le premier salaire et le salaire 7 ans après pour les générations 1998 et 2010 sont les plus diplômés (L3, M1 et M2) et le moins les sans diplôme et les diplômés du bac :
⇒ Et les femmes ?
Plus diplômées, les femmes ont été moins touchées par cette dégradation : si les probabilités d’être cadre au dernier emploi occupé sur les 7 années d’observation sont très proches pour les jeunes femmes diplômées de l’enseignement supérieur long en 2010 et en 1998, leurs homologues masculins ont en revanche près de deux fois moins de chances de l’être que leurs aînés. Les écarts femmes-hommes se réduisent dans l’accès à ce statut, même si, « toutes choses égales par ailleurs », les femmes ont toujours moins de chances d’accéder à ces postes.
Face à cet état de fait, les jeunes n’en demeurent pas moins positifs,
puisqu’ils et elles sont 79% à se déclarer optimistes pour leur avenir professionnel, soit sensiblement autant que la Génération 1998 (77%).
Pour en savoir davantage :
https://www.cereq.fr/sites/default/files/2019-10/Bref%20382-web_2.pdf