Méthodologie : ordres de grandeur du manque à gagner en cotisations sur le champs des indépendants non agricoles, estimés à partir d’une extrapolation des redressements enregistrés lors d’opérations de contrôles aléatoires.
Si les montants sont importants, ils ne sont que des ordres de grandeurs fondés sur des estimations macro-économiques ; faire rentrer ces cotisations est, semble-t-il, pour le moment plus que difficile.
Le manque à gagner en matière de cotisations sociales pour le secteur privé est évalué dans une fourchette comprise entre 4,7 et 6,0 Md€ sur le champ du régime général (champ du recouvrement des Urssaf hors assurance chômage) et 5,2 et 6,6 Md€ en incluant les contributions Unédic.
⇒ S’agissant des micro-entrepreneurs,
Le montant de cotisations éludées serait compris entre 0,6 et 0,9 Md€ en 2020 (soit un peu moins d’un quart des cotisations dues). Ce chiffrement repose sur les résultats du plan de contrôles aléatoires 2018-2019 qui affichait une fréquence des redressements de 40,4% et d’un taux de redressement des cotisations contrôlées de 29,6%.
⇒ S’agissant des travailleurs indépendants « classiques »,
Le montant du manque à gagner est chiffré à 250M€, sur la base des résultats de contrôles aléatoires menés en 2019, dont 10,3% avaient conduit à un redressement.
Rappelons que ces contrôles aléatoires sont effectués sur la base de contrôles partiels sur pièces, par définition moins poussés que les contrôles réalisés sur place.
Les résultats de contrôles aléatoires opérés sur un champ plus restreint excluant les employeurs et les praticiens et auxiliaires médicaux aboutit à une estimation comprise entre 75 et 105M€, soit entre 0,7% et 1,3% des cotisations dues.
⇒ S’agissant des indépendants sur les plateformes
Les opérateurs de plateforme d’économie collaborative doivent adresser annuellement à l’administration fiscale un document récapitulant l’ensemble des opérations réalisées par les utilisateurs de ces sites, données transmises ensuite à l’Urssaf. Les premières données ont été déclarées en 2020 au titre des transactions réalisées en 2019.
Les résultats portent sur 125 800 micro-entrepreneurs utilisateurs de plateforme(s) en 2020 (100 700 en 2019) ; 28 % (32% en 2019) n’ont pas déclaré de chiffre d’affaires à l’Urssaf et 35,6% (41,6% en 2019) ont déclaré un chiffre d’affaires positif mais inférieur aux montants communiqués par les plateformes. Ces populations représentent près des 2/3 des microentrepreneurs utilisateurs de plateformes en 2020 (près des 3/4 en 2019) : l’écart entre le chiffre d’affaires généré sur les plateformes et celui déclaré à l’Urssaf s’élève à 523,3 M€ (633,4 M€ en 2019) : les cotisations afférentes représentent 82,2M€ (95,7 M€ en 2019), soit un taux de cotisations éludées de 42% (55% en 2019).
⇒ S’agissant des particuliers employeurs,
Source, l’enquête réalisée en ligne par IPSOS pour le compte de l’ACOSS, de la FPEM et du HCFiPS entre le 19 avril et le 20 mai 2021 a permis d’isoler 2 204 particuliers employeurs parmi lesquels 693 n’avaient pas déclaré tout ou partie des personnes travaillant à leur domicile et 1 222 employés parmi lesquelles 528 ont indiqué ne pas avoir été déclarés totalement ou en partie par leurs employeurs.
34% des particuliers employeurs interrogés ont pratiqué, au cours des 2 dernières années, une sous-déclaration et un employeur sur 5 le ferait régulièrement; en 2020, la DARES estimait à 20% la proportion de ménages recourant à des services à la personne et ne déclarant pas cette activité, tout comme le Credoc en 2017.
La garde d’enfants (périscolaire…) et l’aide aux devoirs chiffre environ 60% de non-déclaration, 65% le ménage et le repassage, 67% le jardinage et les petits travaux.
Pourquoi cette sous-déclaration ou non-déclaration des employeurs ? Elle serait avant tout liée au faible nombre d’heures effectuées « insuffisant pour nécessiter une déclaration » (47% des réponses), puis au souhait d’éviter les démarches administratives (35% des réponses) ou de payer moins cher son salarié (30% des réponses) ; le souhait de ne pas acquitter de cotisations n’est cité que dans 15% des cas, la volonté de rendre service à sa famille ou son entourage est évoquée dans 21% des cas.
Du point de vue des salariés interrogés, un employé sur deux à domicile aurait été sous-déclaré ou non-déclaré au cours des deux dernières années.
Les intervenants non-/sous déclarés surreprésentés sont les jeunes, les hommes, les moins de 35 ans et les cadres et professions intermédiaires ; la garde d’enfants ou l’aide aux devoirs apparaissent comme les secteurs où la sous-/non-déclaration est la plus importante ; elle est expliquée par le souhait des intéressés de recourir à cet emploi pour « arrondir ses fins de mois » (53%) ou pour « rendre service à la famille, aux amis ou aux voisins » (45%).
La sous-déclaration est acceptée
Parmi les comportements frauduleux testés, la non déclaration d’un salarié à domicile suscite le moins de rejets (comportement jugé totalement inacceptable pour 38% des employeurs et 27% des salariés), alors que la fraude aux prestations est jugée totalement inacceptable par 81% des employeurs et 62% des salariés.
⇒ La sous-déclaration de revenu d’activité engendre un trop versé de prestations sociales (hors allocations chômage)
Celle-ci varie entre 10M€ et 210M€ par an, imputable principalement à un trop-versé de RSA (entre 360M€ et 510M€ selon les scénarios), d’aides au logement (entre 100 M€ et 140 M€) et plus marginalement de prestations familiales. Ce coût est en partie compensé par des économies sur le versement de la prime d’activité (entre 360M€ et 510M€ par an). Concernant les recettes fiscales, le travail dissimulé fait perdre aux finances publiques entre 50 M€ et 60 M€ d’impôt sur le revenu.
Pour en savoir davantage : Observatoire du travail dissimulé_Note de sythèse.pdf (securite-sociale.fr)