Des programmes à la création d’entreprise se mettent en place pour aider les détenus à se réinsérer.


"La formation à l'entrepreneuriat en prison réduit la récidive", Les Echos du 31/10/2023

Plusieurs programmes sont à l’œuvre et permettent une éventuelle réinsertion dans la société lors de leur sortie de prison ; pour qui ne créera pas, il devrait permettre d’intégrer plus aisément une entreprise comme salarié.

 

“La formation à l’entrepreneuriat en milieu carcéral n’est pas une idée neuve. Elle est née aux Etats-Unis pour lutter contre la récidive. Depuis 2004, le Prison Entrepreneurship Program a accompagné plus de 3.300 prisonniers au Texas. Avec un taux de réussite incontestable puisque les personnes suivies ont été seulement 6,1% à être à nouveau condamnées, contre 21,7% sans le programme. “

 

En France, l’Agence du travail d’intérêt général et de l’insertion professionnelle (Atigip) a recensé 15 formations à l’entrepreneuriat et à la gestion d’entreprises en prison, pour 199 bénéficiaires en 2022. Selon les données 2016 du ministère de la Justice, un tiers des sortants de prison sont à nouveau condamnés un an après leur libération.

« Quand on s’est livré au trafic de stupéfiants, on a des compétences en comptabilité et en organisationnel », soutient le responsable de l’accompagnement vers l’emploi à l’Atigip. Vendre des produits, gérer les stocks ou faire ses comptes, ce sont les fondements de la gestion de l’entreprise, que ce soit un business légal ou illégal. Mais avant de se lancer, ils devront aussi lever des freins annexes, comme trouver un logement, payer leurs amendes ou encore recevoir des soins.

 

Dans les faits, un détenu sur deux ne possède aucun diplôme et moins d’un sur dix a le baccalauréat ; c’est le 1er frein pour entreprendre après la prison. Et pour entreprendre, il faut se former et connaître l’écosystème.

 

Par ailleurs, Aurélien Ferry, directeur de CNAM Entrepreneur, est fondateur du programme Emergence, actif de 2016 à 2020 a consacré à la formation à l’entrepreneuriat pour les personnes incarcérées.

Ce programme a accueilli une cinquantaine de détenus dans plusieurs établissements pénitentiaires d’Ile-de-France et du Centre Val de Loire. Pendant les six mois de la formation, les participants ont appris à se connaître grâce à des quiz, des cartes de personnalité , des questionnements avec l’équipe chargée du programme. Tout est fait alors pour redonner confiance aux participants : évaluation de la motivation, accompagnement sur les projets, recensement des aides financières … et remise d’une attestation de réussite. Le programme, actif de 2016 à 2020, est actuellement en pause, mais reste un modèle pour former les détenus à l’entrepreneuriat.

 

Autre expérimentation, l’excubateur, depuis janvier 2023, propose, en Occitanie, d’accompagner les personnes pendant et après la case prison. Pour sa première promotion, l’Excubateur a recruté 5 détenus au centre de détention de Muret, en Haute-Garonne ;  3 ont souhaité concrétiser leur projet.

Autre expérience encore, celle de Justice Deuxième Chance où intervient un cadre retraité de l’industrie auprès des détenus de la maison d’arrêt de Villepinte.

 

Les différents programmes amènent le réseau en milieu carcéral, faisant intervenir des entrepreneurs lors des ateliers collectifs, pour qu’ils témoignent de leurs expériences. 

 

La formation à l’entrepreneuriat par ce public demandeur n’amène pas forcément à créer sa boîte, mais aussi à réintégrer plus sereinement une entreprise. Cela reste donc une piste prometteuse pour les 73.693 détenus en France, dont on a du mal à suivre la réussite