Cette hausse des effectifs a aussi connu une modification du profil des apprentis.
♦ Entre 2016 et 2021, le nombre d’entrées de jeunes en alternance est passé de 438 000 à près de 800 000 (+82%, largement imputable aux années 2019 à 2021). Si les entrées des jeunes en contrat de professionnalisation se sont effondrées (-57% entre 2019 et 2021), les entrées en apprentissage ont augmenté de 98% entre 2019 et 2021, soutenues par les aides exceptionnelles versées aux employeurs d’alternants pour faire face à la crise.
♦ Les facteurs de cette forte croissance sont doubles : la mise en œuvre de la réforme de l’apprentissage intervenue fin 2018 et les aides exceptionnelles accordées aux employeurs à la rentrée 2020. L’apprentissage est désormais perçu comme une voie d’accès à des niveaux élevés de qualification.
♦ Cette hausse des effectifs a aussi connu une modification du profil des apprentis : de 63% en 2016 avec des apprentis de niveau inférieur ou équivalent au bac, à 49% en 2020. Parallèlement, les effectifs se concentrent sur le tertiaire, plutôt que sur les secteurs traditionnellement concernés, comme l’artisanat, l’industrie, la construction ou l’agriculture.
♦ Malgré le développement des effectifs, des limites d’accès à l’apprentissage pour certaines catégories de jeunes persistent. Le nombre d’apprentis préparant des diplômes du secondaire, pour lesquels l’apprentissage favorise le mieux l’insertion, a nettement baissé de 2000 à 2017 et a peu augmenté depuis, malgré l’essor récent de l’apprentissage. Le potentiel de croissance des apprentis d’âge scolaire est plus faible que dans l’enseignement supérieur, en raison du profil de ces élèves de plus en plus jeunes à la sortie de la classe de troisième, peu mobiles, probablement hésitants à entrer dans une formation plus exigeante que la voie professionnelle sous statut scolaire. En outre, l’accès à l’apprentissage reste difficile pour les jeunes décrocheurs du système scolaire, tant les difficultés semblent importantes pour cette population fragile.
♦ Cette recomposition ne correspond pas aux objectifs historiquement associés à la politique de l’apprentissage qui visait à améliorer l’insertion professionnelle des jeunes présentant les plus bas niveaux de qualification (CAP, baccalauréat professionnel), ceux qui rencontrent le plus de difficulté à s’insérer sur le marché du travail. À partir du niveau de la licence, la plus-value sur l’insertion professionnelle est faible, l’apprentissage améliorant plutôt la qualité de l’emploi obtenu (type de contrat, rémunération, etc.).
♦ Une réforme du financement des centres de formation des apprentis s’impose.
Depuis le 1er janvier 2020, les centres de formation des apprentis (CFA) sont financés à titre principal par les opérateurs de compétences, chaque contrat d’apprentissage faisant l’objet d’une prise en charge financière, définie par les branches professionnelles ou, à défaut, par l’État sur recommandation de France compétences. On constate une croissance du coût des formations par apprenti (d’au moins 17%) et à des écarts injustifiés entre formations de même niveau et de même domaine, ce qui demande une redéfinition des niveaux de prise en charge, sur la base du coût de revient de chaque diplôme et une modulation des branches.
♦ En 2018, le montant total des dépenses d’apprentissage était de 5,5 Md€. En 2021, il pourrait atteindre 11,3 Md€, sous l’effet de l’augmentation du coût des aides (5,7 Md€) et du nombre des contrats d’apprentissage (5,3 Md€). La hausse des dépenses d’apprentissage a fortement contribué au déficit enregistré par France compétences en 2020 (4,6 Md€) et 2021 (3,2 Md€), ainsi qu’aux fortes tensions de trésorerie en 2021, qui ont conduit l’établissement à recourir à l’emprunt à hauteur de 1,7 Md€ et l’État à lui verser des subventions exceptionnelles pour un montant de 2,75 Md€. Malgré ce soutien massif, de nouvelles difficultés de trésorerie sont prévues dès l’été 2022.
Suivent 10 recommandations.
Pour en savoir davantage : https://www.vie-publique.fr/sites/default/files/rapport/pdf/285484.pdf