Les maires constatent une nette évolution de la typologie des commerces ; si les commerces alimentaires et les supérettes demeurent, en nombre, stables dans les petites villes, les maires diagnostiquent une baisse du nombre de commerces de détail, de l’offre de restauration et dans une moindre mesure des autres activités à dominante alimentaire. Cette perception des maires est nuancée par la réalité statistique (base SIRENE de l’INSEE) : 40% des villes ont vu leur nombre de commerces de détail et leur nombre de « cafés-hôtels-restaurants » augmenter significativement sur la période 2000-2012.
En ce qui concerne les services tertiaires et le secteur « Hygiène-Beauté-Santé », ils sont perçus par les maires, à juste titre, comme en nette progression. L’évolution réelle se situe même au-delà de la perception des maires : ces secteurs connaissent dans l’échantillon INSEE une progression dans plus de 90% des villes (en moyenne 40% de 2007 à 2012 par exemple).
La base SIRENE, tout commerce confondu, confirme cependant l’impression générale des maires, celle d’une stagnation du commerce de proximité (62% des villes de l’échantillon INSEE).
A quelles transformations les maires de petite ville attribuent-ils la baisse relative de la vitalité commerçante ? Les évolutions structurelles des territoires sont citées comme la première cause de désertion des centres commerçants : la concurrence des grandes surfaces, invoquée par 71% des maires de bourgs-centres et 89% des maires de villes périurbaine sondés et son corollaire, la mobilité des habitants. Mais les maires évoquent aussi des raisons conjoncturelles. Près de la moitié de l’ensemble des sondés attribue également cette baisse de la vitalité à la crise économique.
Pour agir en amont, la planification urbaine est le premier recours des maires.
Les territoires dotés d’un Scot semblent être mieux armés pour équilibrer les implantations commerciales. Les élus questionnent le lien entre Scot et CNAC (Commission nationale d’aménagement commercial), dont les rôles sont complémentaires. Il n’est cependant pas rare que le zonage dans un Scot ne soit pas suffisant pour empêcher le développement de zones commerciales directement concurrentielles pour les commerces de proximité. Les maires de petites villes réclament des moyens plus prescriptifs pour encadrer l’offre commerciale à l’échelle du bassin de vie.
Le plan local d’urbanisme est également un outil de référence, en particulier par les maires de villes périurbaines (71%).
Si ces outils ne sont pas plus utilisés cependant, c’est qu’ils ne sont pas jugés suffisamment prescriptifs.
Les CDAC (commission d’urbanisme commercial) ont autorisé 85% des implantations dans les trois dernières années, ce qui contrevient en partie aux objectifs de limitation de la consommation d’espace autour des villes que professent les PLU et les Scot. Comment réduire ce paradoxe ?
Les élus souhaitent donc que certains types de commerce, en développement fort, cessent d’échapper à ces instances de régulation. Il s’agit pour l’essentiel des « drive » (système de retrait des courses précommandées en voiture), mais également des moyennes surfaces, à nouveau en pleine expansion. Majoritaires « sur le papier » dans les CDAC, ils ne pouvaient pour l’heure s’y faire représenter. Tous les maires attendent donc de pouvoir rétablir cette entrave à leur représentativité.
Une bonne partie des maires est également opposée à l’ouverture des grandes surfaces le dimanche, qu’elles considèrent comme concurrentielles avec le commerce de centre-ville.
Les maires de petites villes ont souvent recouru au droit de préemption urbain ; malheureusement, ce mécanisme s’avère trop coûteux pour permettre aux maires de réellement influer sur le profil commerçant de leurs centres-villes.
Quant au droit de préemption commercial, outil par excellence du maintien ou du rétablissement de la diversité commerciale qui porte sur les fonds de commerces ou les baux commerciaux, il présente les mêmes limites aux yeux des maires, en plus de présenter un délai d’action trop court. Les maires demandent l’allongement du délai dans lequel ils sont tenus de revendre le bien acquis (deux ans).
La possibilité de déléguer ce droit à l’intercommunalité ou à d’autres opérateurs (notamment les établissements publics fonciers), crédités de moyens financiers plus importants, va dans le sens du besoin des maires ; les trois quart y sont favorables.
D’autres outils, relevant de l’aménagement urbain, sont utilisés pour favoriser l’attractivité du cœur de ville. La tendance est à l’amélioration de l’espace public pour favoriser la déambulation à pieds dans le cœur commerçant (avec une signalétique) et un reflux timide de la voiture, exigeant une politique de stationnement. Enfin, dans les bourgs-centre, les opérations de réhabilitation, que ce soit de l’habitat vétuste ou que cela consiste à rénover façades et enseignes, sont aussi entreprises par deux maires de petites villes sur cinq.
Face à l’évolution des pratiques de consommation, qui semble se tourner irrémédiablement vers les grandes surfaces, les maires ont considéré que la promotion du commerce de centre-ville, pratiquée par une large moitié d’entre eux, n’était pas un « bonus » mais une véritable politique publique. Pratiquement toutes les petites villes développent des actions d’animation (braderies, dispositifs particuliers pour la période des fêtes ou des soldes, marché bio, animations musicales, salon de métiers d’art, etc) ; les entretiens qualitatifs font apparaître une pratique en forte augmentation, celle du recrutement d’un « manager de centre-ville », chargé de travailler de concert avec les associations de commerçants pour dynamiser le commerce.
Les petites villes de l’espace rural, pourtant moins exposées à la prolifération des centres commerciaux, sont paradoxalement plus pro-actives en matière d’animation (63%, contre 47% seulement pour les villes périurbaines). Pour elles, la vitalité du centre est en effet un enjeu direct d’attractivité.
Le FISAC est de moins en moins utilisé : un maire de petite ville en zones rurales sur deux continue à y recourir, se battant contre la fermeture des derniers commerces ; mais ils déplorent unanimement de trop longs délais d’attente et la restriction progressive des critères. Les maires de villes périurbaines, pour les 4/5 d’entre eux, renoncent désormais à recourir au FISAC. Gagnés par le sentiment d’impuissance face à la concurrence des centres commerciaux, qui prospèrent en périphérie des grandes villes, ils concentrent leurs efforts en amont, d’où leur prédilection pour l’urbanisme