Source : Si des études existent sur le sentiment des salariés à l’égard de la protection de l’emploi, plus rares sont celles qui portent sur le ressenti des employeurs; l’enquête Offre d’emploi et recrutement (Ofer 2016) permet de documenter cette question; elle a pour objectif l’étude approfondie des différentes étapes du recrutement.
En 2015, les recrutements en contrat à durée déterminée (CDD) représentaient 87% des intentions d’embauche (hausse de 12 points depuis le début des années 2000).
« Toutes choses égales par ailleurs », les établissements ayant recruté en CDD appartiennent moins souvent aux secteurs des services aux particuliers, de l’enseignement et de la santé.
S’ils diffèrent peu des établissements ayant recruté en CDI au regard de leur taille, ils sont moins fréquemment de création récente; au cours des trois dernières années, la tendance générale de leurs effectifs était plutôt à la stabilité ou à la baisse. Cette embauche a plus fréquemment bénéficié d’une incitation ou d’une aide financière. Elle avait également davantage pour objet le remplacement d’un salarié momentanément absent.
Ce qui motive les employeurs dans leur choix de recruter en CDD plutôt qu’en CDI est d’abord le fait que leur besoin était limité dans le temps (69% des établissements), mais au même niveau le souhait d’évaluer les compétences de la personne avant de la recruter durablement (65%), et bien sur la volonté de réduire les risques en cas d’un ralentissement de l’activité (57%), voire l’habitude de recruter en CDD pour ce type de poste (57%); mais aussi, les questions de réglementation associées au CDI (coût financier du licenciement 38% et complexité réglementaire en cas de rupture 31%, cumulés 45%).
En janvier 2017, l’Insee a introduit de nouvelles questions sur les freins à l’embauche en CDI et en CDD de longue durée dans ses enquêtes de conjoncture; si les résultats ne sont pas directement comparables à ceux d’Ofer, les 4 grands types de freins recensés sont identiques : incertitude sur la situation économique, indisponibilité d’une main d’œuvre compétente, coûts trop élevés (salaires, coût de recrutement, cotisations sociales) et contraintes réglementaires (coûts de licenciement, risques juridiques associés au licenciement, pérennité de la législation du travail); ceux liés à la législation du travail arrivent en dernière position.
Les établissements de petite taille invoquent davantage comme motifs de recours au CDD leurs craintes sur la pérennité de leur activité et la réglementation associée au CDI (respectivement 63% vs 40 pour les établissements de plus de 200 salariés et 55 vs 19). En revanche, l’influence de la limitation du besoin dans le temps varie peu selon la taille et le secteur d’activité de l’établissement.
Les établissements dotés d’un service des ressources humaines mentionnent moins souvent la réglementation du CDI pour expliquer leur recours au CDD.
La localisation semble jouer un rôle : les établissements situés dans le bassin parisien, dans le Nord ou dans les DOM et à l’étranger invoquent plus souvent des motifs réglementaires comme cause de recours au CDD. Noter que l’ancienneté de la structure n’a presque pas d’effet.
Les établissements de la construction, et de l’industrie, évoquent plus souvent l’ensemble des obligations liées à l’embauche en CDI; les premiers indiquent également plus fréquemment le souhait de tester les compétences de la personne avant de la recruter durablement ainsi que celui de limiter les risques en cas de ralentissement de leur activité.
Si les établissements du secteur des services aux particuliers mentionnent également plus souvent des craintes à l’égard d’un éventuel ralentissement de leur activité, celle-ci ne s’accompagne pas particulièrement de la volonté de tester les compétences du candidat ou d’éviter la réglementation associée au CDI.
Le CDD comme moyen d’évaluer les compétences du candidat est également une raison de recours moins souvent avancée par les établissements des services aux entreprises ou de l’enseignement et de la santé. Ces derniers évoquent en revanche plus souvent l’habitude de recruter en CDD sur le poste considéré.
Hors le besoin limité dans le temps qui privilégie le CDD, quel que soit le type de poste (cadre, profession intermédiaire, employé, ouvrier), les autres motifs (risque de ralentissement de l’activité, habitude de recrutement, évaluation des compétences, évitement de la réglementation du CDI) vont croissants du cadre à l’ouvrier non qualifié.
Les motifs le plus souvent cités par les établissements comme importants ou très importants pour un recours aux CDI sont en 1er lieu le fait qu’une relation stable est nécessaire pour le poste en question (88%), puis les perspectives d’activité favorables (84%), l’habitude de recruter sous ce type de contrat (79%), la motivation du salarié (78%), le fait d’attirer les meilleurs candidats (67%), de ne pas avoir besoin d’évaluer les compétences (56%), et peu la rupture plus facile en CDI (37%) ou le coût financier du CDD (32%).
Le recours aux conseils de prud’hommes (travaux menés à partir des données juridiques) montre que depuis 1983, le nombre annuel de demandes s’est stabilisé autour de 200 000; le taux de recours n’est pas plus élevé en France que dans les autres pays européens (7,8 demandes pour 1 000 salariés en 2010 vs 10,6).
Ce taux diffère selon la nature du licenciement : en 2006, pour les licenciements pour motif personnel, il était compris entre 17 et 25%, tandis qu’il variait entre 1 et 2% pour les licenciements pour motif économique.
Les taux de recours et de victoire des salariés aux prud’hommes ne semblent jouer que marginalement et n’auraient que peu d’effets sur la part des CDD dans les embauches des établissements de 50 salariés ou plus.
Enfin, depuis 2008, la « rupture conventionnelle » est fréquemment utilisée, notamment dans les petits établissements (en 2012, 16% des fins de CDI)