Méthodologie : Cette note du CAE vise le petit commerce de proximité, dans un sens très large : la vente de biens dans des magasins de petite taille, implantés à proximité des lieux de vie (y compris dans les centres commerciaux), mais également l’artisanat commercial (charcuteries, boulangeries, etc.), les bars et la restauration, et certains services aux ménages (dont les salons de coiffure), et exclue les grandes surfaces, mais inclue les établissements indépendants et les magasins de petite taille succursales de grands groupes, comme les supérettes. A contrario, les notes de conjoncture de l’Insee sur le commerce retiennent soit le commerce dans son ensemble (y compris le commerce de gros), soit le commerce de détail (y compris les grandes surfaces), mais excluent dans ce cas les commerces de services aux ménages (coiffure, restauration).
Il est rare qu’une étude s’intéresse au commerce de proximité dans son ensemble, comme le propose cette étude qui malheureusement nous apporte fort peu d’éléments nouveaux.
⇒ un chiffrement
♦ Le petit commerce (au sens de cette note) compterait, en 2019, un peu plus de 430 000 établissements, représenterait environ 12% de l’emploi total (1 824 000 salariés et 710 000 emplois non salariés) et 6% du PIB.
Le nombre de commerces a crû très nettement entre 2008 et 2013 (4,1%), et légèrement entre 2013 et 2019 (0,7%), principalement porté par le secteur de la restauration. Sans tenir compte des bars et des restaurants, on observe une baisse de 2% du nombre de commerces sur la période 2013-2019.
♦ Cette évolution recouvre des disparités importantes entre le dynamisme des centres-villes et des périphéries et le net recul du nombre de commerces hors restauration en zone rurale.
Les pôles commerciaux représentent 1/4 des établissements, les 2/3 de la surface commerciale et 45% des emplois.
D’après l’Insee, si l’emploi global dans le secteur du commerce de proximité (au sens de cette étude) s’est accru entre 2009 et 2015, cet accroissement était essentiellement porté par le dynamisme des pôles commerciaux de périphérie (vs une baisse, dans les pôles de centre ville).
En comparant l’évolution de la population et du nombre de petits commerces depuis 2008, on constate que le dynamisme commercial diminue dans toutes les zones, sauf dans les banlieues, où le nombre de commerces continue à croître plus vite que la population. La décroissance de la densité commerciale (nombre de commerces par habitant) s’accentue dans les zones rurales.
⇒ 3 modalité concurrentielles
♦ Les grandes surfaces : selon l’Insee 2 ans après l’implantation d’une grande surface, la probabilité de sortie des petits commerces de proximité est importante.
Toutefois, après une période de forte expansion des implantations, le nombre de m2 de locaux commerciaux autorisés et mis en construction (y compris de commerce de gros) a connu une longue période de stabilité depuis la fin des années 1990 et tend à reculer depuis 2018. En revanche, la part des entrepôts dans les bâtiments à vocation économique a triplé entre 2000 et 2019 avec le notamment le développement du commerce électronique.
♦ Le commerce électronique : Le secteur du e-commerce représente 14,1% du commerce de détail. Entre 2010 et 2020, le taux de croissance annuel moyen des ventes était de 14% pour le commerce électronique, contre 1,4% pour le commerce en magasin.
Tous les biens sont désormais concernés : le commerce en ligne le plus développé concerne l’équipement du foyer (36% des dépenses de high-tech, 21% de celles de meubles), les produits culturels (24 des biens « physiques »: livres, DVD, CD, etc.) et l’habillement (21% des dépenses), alors que es ventes en ligne dans l’alimentaire se situerait entre 8 et 9% en 2020.
Le développement du commerce électronique induit non seulement une baisse du niveau et de la dispersion des prix, mais aussi une réallocation des parts de marché vers les entreprises les plus efficaces. Cette situation a été vérifiée empiriquement dans plusieurs secteurs aux États-Unis entre 1994 et 2003 ; par exemple, dans le secteur des agences de voyage, un accroissement de 15% du recours des consommateurs au commerce électronique est associé à un déclin du nombre des petites entreprises du secteur de l’ordre de 13% pour les agences de 1 à 4 employés, et de 21% pour les agences de 5 à 9 employés.
De même pour le marché de la distribution des livres aux États-Unis : entre 2016 et 2019, avec la chute des petites librairies, sauf celles qui se spécialisent sur une niche étroite sur laquelle elles disposent d’un large assortiment.
♦ Les drives et le quick commerce.
De moins de 10 drives actifs sur le territoire en 2006, on est passé à près de 3 000 en 2017. En 2018, 81% des ventes alimentaires réalisées en ligne étaient retirées dans des points de collecte drive, le reste étant livré à domicile.
Le quick commerce propose une offre de livraison très rapide (dans l’heure ou parfois moins) de produits alimentaires ou de première nécessité, essentiellement en zone urbaine, les commandes étant préparées dans des dark stores.
⇒ Différents programmes pour revitaliser le commerce dans les villes
♦ Action cœur de ville : ce programme a été initié en 2018 pour une période de 5 ans, avant d’être prolongé en 2022 pour une période de 4 ans. Il vise à soutenir les collectivités locales dans les villes moyennes souhaitant réinvestir leurs centres-villes. 140 villes ont été soutenues par le fonds « friches », 250 locaux commerciaux ont été construits ou réhabilités. Le bilan officiel du programme annonce avoir stabilisé le taux de vacance commerciale à 12% dans les villes concernées.
♦ Petites Villes de demain : ce programme, lancé en octobre 2020, est destiné à améliorer les conditions de vie des habitants et des territoires alentours. Il cible 1646 communes de moins de 2 0000 habitants. Les projets ne concernent pas uniquement la revitalisation commerciale, mais aussi l’habitat et les aménagements urbains. À la fin juin 2022, la Banque des territoires avait financé le recrutement d’environ 300 « managers » de commerce pour 450 communes et un peu moins de 1000 communes avaient pu bénéficier d’un diagnostic sur la situation du commerce.
♦ Opération de revitalisation des territoires : L’ORT est un outil visant une requalification d’ensemble d’un espace déjà urbanisé (surtout des centres-villes). Il facilite la rénovation du parc de logements, de locaux commerciaux et artisanaux, et, plus globalement, le tissu urbain, pour créer un cadre de vie attractif propice au développement à long terme du territoire.
La forte croissance du nombre de grandes surfaces pendant les années 2005-2015, ainsi que les changements de modes de consommation et de déplacements ont conduit à un accroissement du nombre de friches commerciales, notamment dans les zones périphériques des grandes villes et les entrées de petites villes. Les maires et les intercommunalités ont la possibilité d’instaurer une taxe sur ces friches commerciales. En 2018, un peu plus de 1200 villes avaient mis en place cette taxe.
Le rapport propose 4 recommandations.
Pour en savoir davantage : https://cae-eco.fr/les-petits-commerces-declin-ou-mutation