Un bilan très complet de l’action de pôle emploi, montrant notamment le faible appui apporté directement aux entreprises employeurs et les failles dans l’appui aux demandeurs d’emploi


« Pôle emploi à l’épreuve du chômage de masse », Cour des Comptes, juillet 2015

Avec 53 000 agents, un millier d’agences, 32Md€ d’allocations et d’aides versées et 5Md€ de budget, il s’agit du plus gros opérateur de l’État ; il a bénéficié dans un contexte de restriction budgétaire de 4 000 embauches en CDI depuis 2012. La majeure partie de ses ressources (70% hors conventions spécifiques) provient des fonds paritaires de l’assurance chômage, le reste étant financé pour l’essentiel par le budget de l’État.

 

La mise en place d’un « métier unique », qui consistait à confier à un même conseiller la mission d’indemnisation issue des Assédic et celle de placement issue de l’ANPE, a été rapidement abandonnée, du fait de l’augmentation du chômage et de la nature hétérogène de ces deux métiers.

 

De même le fait que tous les conseillers devaient assurer un entretien d’inscription unique ayant pour objet le traitement du dossier d’indemnisation et le projet de retour à l’emploi (entretien d’inscription et de diagnostic) ; le principal acquis opérationnel de la fusion, est l’un des points les plus insatisfaisants de l’offre de services.

 

À l’augmentation du nombre total de demandeurs d’emploi s’est ajoutée une évolution profonde des caractéristiques du chômage :

– la durée moyenne de l’inscription au chômage s’est allongée entre janvier 2009 et janvier 2015,  passant de 390 à 542 jours ; la proportion des chômeurs inscrits depuis plus d’un an est passée de 30% à 43%

– la frontière entre le chômage et l’emploi est devenue moins nette ; le nombre de personnes exerçant une activité réduite et demeurant inscrites à Pôle emploi a augmenté de 70% de janvier 2009 à janvier 2015, pour atteindre 1,8 million de personnes

– les fins de contrats précaires (contrats à durée déterminée, missions d’intérim, contrats saisonniers) représentent environ 30%

– dans le même temps, le nombre de demandeurs d’emploi qui n’avait eu aucune activité professionnelle pendant au moins 12 mois sur les 15 derniers mois d’inscription sur les listes a atteint 1,4 million de personnes fin 2014

– enfin, alors que le chômage des jeunes s’est stabilisé à un niveau élevé, celui des séniors continue à progresser fortement ; en mars 2014, 42% des demandeurs d’emploi de plus de 50 ans inscrits en catégorie A n’avaient exercé aucune activité pendant au moins 21 mois au cours des 24 derniers mois.

les métiers sont en mutation ; à l’horizon 2020, des études estiment à 2,2 millions le nombre d’emplois qui ne trouveront pas preneur faute de qualifications disponibles et 2,3 millions pourraient ne pas trouver d’offres d’emploi faute de disposer des compétences recherchées par les employeurs

– la fin en 2005 du monopole de placement dont bénéficiait Pôle emploi a vu croître une concurrence sur de nombreux segments de ses activités alors que le développement des services numériques modifie les opportunités d’accès aux offres d’emploi et aux profils des demandeurs d’emploi.

La moitié des reprises d’emploi se font par le biais de relations personnelles ou professionnelles, ou par candidature spontanée, pôle emploi ne serait, selon les déclarations des demandeurs d’emploi, à l’origine directe de la reprise d’emploi que dans 12,6% des cas

 

Estimer la performance de Pôle emploi est un sujet complexe, dans la mesure où les indicateurs principaux ne permettent pas de distinguer, dans les reprises d’activité, ce qui tient à l’action de Pôle emploi et ce qui relève d’autres facteurs qui lui échappent.

 

Plusieurs indicateurs sont utilisés :

le taux de retour à l’emploi (rapport entre le nombre mensuel de demandeurs d’emploi reprenant un emploi et le nombre total de demandeurs d’emploi) : il est passé de 5,3% en 2008 à 3,8% en 2013

le taux de retour à l’emploi durable (CDI, contrats de plus six mois, entrées dans la fonction publique et créations d’entreprise) est passé de 3% en 2011 à 2,5% en 2013

– la part des demandeurs d’emploi inscrits à Pôle emploi depuis plus d’un an, est passée de 40,1% en 2011 à 43% en 2013 ; celle des jeunes de moins de 25 ans encore inscrits à Pôle emploi un an après leur entrée au chômage est passée de 29% à 32%, et celle des séniors de plus de 50 ans de 56% à 58%.

la perte de contact avec l’emploi s’accroît : le nombre de demandeurs d’emploi de catégorie A, ayant une durée d’inscription cumulée de plus de 21 mois au cours des 24 derniers mois, a fortement progressé (de 497 000 en 2011 à791 000 en 2014).

un indicateur de satisfaction des usagers (services adaptés à leurs besoins) : de 2012 à 2013, il a augmenté de 58 à 68% pour les employeurs (66% en 2014) et de 52% à 57% pour les demandeurs d’emploi (57% en 2014).

Un autre indicateur de satisfaction globale est en baisse : 67% des demandeurs d’emploi étaient « globalement satisfaits » de Pôle emploi en 2014 contre 73% en 2009 ; pour les entreprises, on passe de 67% en 2009 à 60% en 2011 avant de revenir à 67% en 2014.

 

Les demandeurs d’emploi sont très majoritairement satisfaits de l’indemnisation en général, mais ils apparaissent plus réservés sur la qualité de l’information reçue lors de l’entretien d’inscription et de diagnostic, la principale source d’insatisfaction résidant dans les règles applicables : complexité de la réglementation de l’indemnisation avec des allocations nombreuses (une quarantaine d’allocations et aides), des règles d’éligibilité et de calcul peu lisibles, et la modification fréquente des règles d’indemnisation.

la confiance en Pôle emploi recule de 70 % en 2009 à 59% des employeurs en 2012 puis et de  64 à 50% pour les demandeurs d’emploi entre 2009 et 2014.

 

La politique en direction des employeurs

Les offres d’emploi collectées par Pôle emploi : le nombre d’offres collectées par Pôle emploi a diminué de 3,6 millions en 2007 à 2,561 en 2014. Selon le conseil d’orientation pour l’emploi, la part de marché de Pôle emploi est passée de plus de 20% en 2007 à moins de 15% en 2012 pour l’ensemble des emplois.

La part des offres non pourvues dans le total des offres collectées par Pôle emploi, est passée de 7,3% en 2008 à 15,1% en 2012 et 16% en 2013

La prospection est désormais ciblée sur les entreprises susceptibles d’embaucher les demandeurs d’emploi accompagnés par les agences : la prospection n’est plus mise au service de la connaissance du marché du travail, et Pôle emploi devient le représentant des entreprises des demandeurs d’emploi les moins autonomes.

 

Un socle de services minimum est offert à tous les employeurs :

– Recueil de l’offre d’emploi, sa diffusion et l’accès à la banque de curriculum vitae (CV) des demandeurs d’emploi, sans intervention de conseiller référent : 67% des offres enregistrées de janvier à mai 2014 ; seulement 7,3% ont bénéficié d’une aide à la rédaction de l’offre

33% des offres sont accompagnées : présélection des candidats, conseils en recrutement (analyse de poste, aide à la conduite d’entretiens), et actions d’adaptation au poste de travail) ; seul le service de présélection des candidats est largement mobilisé (95% des cas) ; les autres services (valorisation, évaluation des candidats, aide à l’analyse des postes, aide à la conduite d’entretien, adaptation des postes) ne concernent  qu’entre 2 et 6% des offres. En ce qui concerne ces offres, conseillers sur dix indiquent ne jamais proposer certains types de services aux entreprises relevant pourtant d’un suivi « renforcé ».

L’aide au recrutement pour les entreprises (traitement des offres, visite d’entreprises, prospection) ne représente enfin que 6% à 7% du temps de travail des agents soit entre 1 et 1,5 jour de travail par mois, mais la moitié du temps est consacrée à l’accueil téléphonique et à l’enregistrement des offres et moins d’1/2 journée pour la prospection

 

La politique en direction des demandeurs d’emploi

Le profil des demandeurs d’emploi (avril 2014) :

Fin de contrat,

licenciement

démission

Niveau BEP

ou moins

Chômage

depuis plus

d’un an

Moins

de

30 ans

Ouvrier

employé

non qualifié

Bénéficiaire

du

RSA

Sortant

d’inactivité

Résident

en ZUS

Travailleur

handicapé

56%

56%

42

30

30

26

13

10

8

L’action de loin prioritaire concerne les demandeurs d’emploi pour qui 4 modalités d’accompagnement sont en place :

Accompagnement (données au 1er janvier 2015)

suivi

Guidé

Renforcé

Global

Total

Définition

Public le plus proche

 du marché

 

Plus intensif

Difficultés extérieures

A l’emploi (social)

 

Nbre de demandeurs

935 237

1 483 415

283 697

5 018

2 707 367

répartition

35

55

10

0,2

100

Nbre de conseillers référents

4 700

12 693

4 422

150

21 965

répartition

21

58

20

1

100

Nbre moyen par conseiller (chiffres pole emploi)

199

117

64

33

123

Nbre moyen par conseiller (chiffres Cour Comptes)

200 à 350

100 à 150

70

   


L’accompagnement « global »,  créé en 2014 pour les demandeurs d’emploi dont l’importance des difficultés extérieures à l’emploi (problèmes sociaux, de logement, etc., qualifiés de freins périphériques à l’emploi), justifie un accompagnement social en plus de l’accompagnement professionnel ; il est mis en œuvre fin 2014, dans une vingtaine de départements.

A compter de 2015, un accompagnement « intensif jeunes » pour les jeunes demandeurs d’emploi ne présentant pas de frein périphérique à l’emploi, est aussi mis en place.

 

Jusqu’à fin 2014, quelle que soit la modalité de suivi, deux entretiens obligatoires sont prévus, le premier au plus tard au quatrième mois suivant l’inscription, le second au neuvième mois.

 

Le revirement de la politique d’externalisation du suivi des demandeurs d’emploi : L’ANPE, puis Pôle emploi, avaient décidé de confier le suivi des demandeurs d’emploi les plus éloignés de l’emploi à des tiers, afin de faire traiter les situations les plus complexes, impliquant parfois d’autres problématiques que l’emploi, pôle emploi centrant ses propres compétences sur le retour à l’emploi.

 La nouvelle stratégie de Pôle emploi inverse cette logique, considérant que son cœur de métier est désormais l’accompagnement « renforcé » et ne conserve que des contrats de cotraitance (exemple Cap emploi pour les personnes handicapées,  les missions locales pour les jeunes de moins de 26 ans peu qualifiés ou rencontrant des difficultés d’insertion, la défense pour les militaires en reconversion civile). Le nombre de demandeurs d’emploi pris en charge par des cotraitants est important ; dans ce contexte, les missions locales accueillent plus de 150 000 jeunes par an.

 

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Coût des prestations externalisées en M€

Total

442

511

384

347

305

343

Dont cotraitance

64

71

60

61

62

65

Dont sous-traitance

378

440

324

286

243

278

Flux annuel de demandeurs d’emploi en milliers

Missions locales et Cap emploi

nc

nc

206

240

234

269

Prestataire sous-traitant

516

522

436

274

240

136

  Dont prestation d’au moins 6 mois

156

172

129

150

140

136

total

   

395

390

374

404

Le dispositif d’évaluation des partenariats est aujourd’hui insuffisant :

  – l’évaluation de la sous-traitance a été jusqu’ici réalisée avec trop peu de recul, ce qui n’a pas permis de prendre en compte les effets d’apprentissage chez les sous-traitants

– l’évaluation des missions locales n’a porté que sur les modalités de fonctionnement, et non sur les résultats obtenus dans le placement des jeunes

– aucune évaluation globale ne permet de mesurer l’efficacité de la phase de diagnostic et d’orientation vers chaque structure d’accompagnement et chaque type de suivi

–  les évaluations ne permettent pas de comparer les performances obtenues par les différentes structures chargées de l’accompagnement, même lorsqu’il s’agit de publics similaires.

 

Par ailleurs, Il n’existe pas de formation initiale spécifique demandée pour exercer le métier de conseiller emploi ; les critères portent avant tout sur les qualités relationnelles, voire sur une éventuelle expérience en ressources humaines ou même voire un accompagnement des demandeurs d’emploi ; en revanche, la connaissance de l’économie, de l’entreprise ou du marché du travail ne sont pas mentionnées.

 De fait, les conseillers recrutés dans le cadre des plans gouvernementaux avaient, pour 64% d’entre eux, des profils généralistes (secrétariat, sciences humaines, métiers du social, lettres, enseignement, communication, santé, etc.) : les diplômés de formations commerciales ne représentaient que 15% des recrutements et les spécialités en économie, droit, gestion, et comptabilité, 14%.

Le même constat peut être dressé en ce qui concerne la formation interne des conseillers : à titre d’illustration, le support de formation est 3,6 fois plus long pour les problématiques des demandeurs d’emploi (40 pages sur le total de 66) que pour celles des entreprises (11 pages).

 

Enfin les modalités d’encadrement des conseillers ne garantissent pas la réalisation de la mission d’intermédiation :

-Il n’y a pas d’objectifs quantitatifs individuels mais des « contributions aux résultats collectifs » ; pourtant des objectifs quantifiés ont existé par le passé.

La taille moyenne des équipes peut être estimée à 15,9 conseillers, une taille trop importante, selon un grand nombre d’entre eux, compte tenu de la nature des activités à suivre et de la multiplicité des tâches de gestion qu’ils ont par ailleurs à assurer (planning, accueil, réunions externes à l’agence, etc.) ; l’accompagnement des agents – qui comprend des temps de management, comme l’entretien professionnel annuel ou l’entretien de suivi d’activité, mais aussi les formations et les tutorats – ne représente que 7,3% du temps de travail

 

Les entretiens  individuels entre responsable d’équipe et conseiller, ayant pour but de suivre l’activité de ce dernier, ne sont pas toujours acceptés et, selon les managers locaux, restent peu fréquents.

 

Des difficultés opérationnelles persistantes :

ü  Une connaissance insuffisante des besoins des demandeurs d’emploi et des entreprises

– Dans les faits, le diagnostic de la situation des demandeurs d’emploi souffre d’un manque de temps, les premières phases d’inscription et d’indemnisation étant chronophages et la durée totale du rendez-vous théoriquement limitée à 50 minutes ; alors qu’il suppose une compétence professionnelle particulièrement élevée, ce diagnostic est réalisé indifféremment par tous les conseillers et le diagnostic est effectué le plus souvent  au quatrième mois de chômage, ce qui est trop tardif. L’outil d’appui au diagnostic ne devrait être mis à la disposition des conseillers qu’à la fin du premier trimestre 2016.

– En ce qui concerne les employeurs, le diagnostic est réalisé lors de l’enregistrement de l’offre, mais là encore la faiblesse du diagnostic est flagrante : dans 53% des offres d’emploi, aucune spécificité (compétences, savoir-faire requis) n’est enregistrée.

ü  Une prise en charge imparfaite de la diversité des demandeurs d’emploi

– Selon une évaluation réalisée par Pôle emploi, 35% des conseillers (49% pour les conseillers de la modalité « suivi ») estiment eux-mêmes que plus de 25% des demandeurs d’emploi qui leur sont affectés devraient relever d’une autre modalité de suivi. Pourtant, paradoxalement, le changement de modalité est peu fréquent.

– Une prise en compte très insuffisante de l’allongement de la durée du chômage dans les modalités d’appui : les demandeurs d’emploi de longue durée sont 47% à bénéficier d’un accompagnement « suivi » (ce sont aux dires de pôle emploi les demandeurs les plus autonomes et proches de l’emploi !), soit « guidé » (42%) ; à l’intérieur de ces modalités, leurs difficultés ne sont pas clairement prises en compte.

Ancienneté du chômage

Suivi

guidé

Renforcé

Total

Moins de 3 mois

18

21

23

21

De 3 à 6 mois

14

16

17

15

De 6 à 12 mois

21

22

24

22

De 12 à 24 mois

21

21

19

20

Plus de 24 mois

26

21

17

22

Total

100

100

100

100

– Pôle emploi ne dispose pas non plus de références lui permettant de s’assurer que les actes proposés dans le cadre de l’accompagnement des demandeurs d’emploi et des entreprises sont suffisamment nombreux et adaptés à la typologie des publics de demandeurs d’emploi et d’entreprises.

– Le nombre de contact avec le conseiller est faible, tout comme les propositions d’action :

 

Contact dans les 12 derniers mois

 

Nbre entretien ou contact dans les 6 derniers mois

 

suivi

guidé

renforcé

global

   

suivi

guidé

renforcé

total

Sans entretien

29

21

12

3

 

1 ou 2

59

49

33

51

Sans proposition d’action

51

40

25

21

 

3 ou 4

33

39

42

37

Sans mise en contact avec une offre

66

60

51

44

 

5 et plus

8

13

25

12

Sans prestation prescrite et réalisée

72

59

40

36

 

Total

100

100

100

100

-L’intensité de l’accompagnement se réduit fortement avec l’ancienneté du chômage. La part des demandeurs d’emploi sans préconisation d’action entre 13 et 18 mois de chômage est comprise entre 60% et 85% selon la modalité de suivi ; elle est deux fois plus importante qu’entre 1 et 6 mois de chômage

 

Les préconisations d’action interviennent en plus grande proportion au moment des contacts obligatoires : entretien d’inscription, entretiens du 4e et du 9e mois.

Le constat est le même pour les mises en relation ; leur fréquence diminue avec la durée du chômage, la proportion mensuelle de demandeurs d’emploi ayant une mise en relation passant de plus de 6,5% jusqu’à 6 mois de chômage, à 5% après plus de deux ans de chômage ; leur périodicité est également principalement liée aux contacts obligatoires.

 

ü  Un contrôle insuffisant de la recherche d’emploi

Il n’existe pas, au sein de Pôle emploi, d’organisation particulière pour effectuer le contrôle de la recherche d’emploi ; celui-ci fait partie des missions des conseillers. Le défaut de suivi des demandeurs d’emploi a été mis en évidence par une étude menée en 2013 et 2014 par Pôle emploi révélant une insuffisance de recherche d’emploi dans 8% à 35% des cas dans les agences testées

 

ü  L’agrégation des offres d’autres sites en ligne sur celui de Pôle emploi, mise en place à partir de l’été 2013, est encore limitée : ainsi, au regard d’un marché total qui peut être estimé à 400 000 offres publiées quotidiennement sur plus de 3 000 sites, 85 000 offres environ étaient agrégées en octobre 2014, après suppression des doublons, élimination des offres présentant un risque de discrimination, et mise aux normes de la base recherche ; fin janvier 2015, ce chiffre atteignait 153 000 offres.

La part des demandeurs d’emploi qui présentent un curriculum vitæ en ligne n’était que de 26% en 2014 ; la CVthèque de Pôle emploi (4 millions de CV), est moins importante que celle des principaux sites d’offres en ligne : Viadéo comptait 7 millions de CV, Keljob 4 millions et Multiposting 3 millions.

Cette situation tient en partie au caractère inadapté du site de Pôle emploi (25% des demandeurs d’emploi abandonnent la création d’un CV en ligne après 20 minutes).

 

La répartition des effectifs de Pôle emploi fait une place insuffisante aux conseillers au contact des demandeurs d’emploi et des entreprises : sur un total de 50 724 agents en CDI en 2014, Pôle emploi compte 38 340 conseillers et agents d’appui à la relation de service (76%). 

 

L’analyse de la répartition de leur temps de travail fait apparaître des résultats insatisfaisants :

-Les activités de gestion et management (réunions, formation, participation à la gestion de l’agence) représentent  22% du temps de travail des conseillers

− L’accueil des demandeurs d’emploi et des entreprises, ainsi que l’inscription, entre 31% et 36%

L’accompagnement ne compte qu’entre 29% et 37% (10 375 équivalents temps plein en 2013, sur un total de 50 855 ETP), soit 5,5 à 7,5 jours par mois

− L’aide au recrutement pour les entreprises (traitement des offres, visite d’entreprises, prospection) ne représente enfin que 6% à 7% soit entre 1 et 1,5 jour de travail par mois dont moins d’1/2 journée pour la prospection.

L’indisponibilité des agents, qui n’est pas suivie de façon satisfaisante, car elle regroupe sans distinction des motifs d’indisponibilité très divers (absences dont maladie, congés/jours fériés, mandats syndicaux, temps partiels…) soit au total 31% du temps (en 2013, 24,8 jours calendaires par agent). Sa principale cause est l’arrêt maladie (17,7 jours) ; à titre de comparaison, les absences pour maladie (hors accident de travail et maladie professionnelle) étaient la même année de 12 jours pour la fonction publique d’État, 18 jours pour la fonction publique territoriale et 10,1 jours pour le secteur privé.

 

Par contre, alors que la référence était qu’au moins 80% des demandeurs d’emploi soient domiciliés à moins de 30 minutes d’une agence, ce taux a atteint 96,4% en 2012, et même 99,5% en prenant en compte l’implantation des partenaires de Pôle emploi ; à titre de comparaison, le temps d’accès moyen des hôpitaux/maternités et services d’urgence était en 2007 de 19 minutes en moyenne par habitant, et de 27 minutes pour le quart de la population le plus éloigné ou encore le temps moyen consacré aux trajets quotidiens domicile travail était de 72 minutes, selon l’enquête Emploi du temps de l’INSEE 2009-2010.

 

2 exemples étrangers

Au Royaume-Uni, la mission de l’opérateur, Job Centre Plus, n’est pas d’être un intermédiaire sur le marché du travail, mais de mettre un ensemble de services, de conseils et d’informations à disposition des demandeurs d’emploi et de s’assurer que ces derniers mettent tout en œuvre pour retrouver un emploi.

L’opérateur a pour objectif la sortie d’un maximum de demandeurs d’emploi du dispositif d’indemnisation du chômage (90% des demandeurs d’emploi doivent être sortis de l’indemnisation du chômage avant un an). Un indicateur principal (proportion des demandeurs d’emploi sortis de l’indemnisation chômage, avant 3 mois, 6 mois, 9 mois et un an) est partagé d’un bout à l’autre de la chaîne de pilotage, du niveau central jusqu’à l’agence et au conseiller.

Les demandeurs d’emploi sont divisés en trois groupes en fonction de leur distance à l’emploi : Self-Service (20%), les plus proches de l’emploi puis les Work Focused (60%), en position intermédiaire et les Solution Focused (20%) pour un accompagnement renforcé.

Sont citées comme qualités-clés des conseillers l’écoute, la capacité de communication, l’engagement, la compréhension du marché du travail et la connaissance de la situation locale, sujets sur lesquels ils continuent à être formés après leur recrutement.

Les conseillers ont des objectifs quantitatifs individuels : la part des demandeurs d’emploi sortis de l’indemnisation chômage en moins d’un an, un suivi des durées intermédiaires (à 3 mois, 6 mois et 9 mois) ; ils sont évalués deux fois par an, en plus de points réguliers (mensuels généralement) sur leur activité ; une partie des primes versées dépend de l’atteinte des objectifs individuels.

 

En Allemagne, les conseillers emploi sont spécialisés, soit sur l’accueil des demandeurs d’emploi, soit sur l’accompagnement des demandeurs d’emploi, soit sur la relation avec les entreprises. Deux différences peuvent être relevées par rapport à la situation française :

les conseillers accompagnement des demandeurs d’emploi et les conseillers relation entreprises sont conduits à travailler continûment ensemble, compte tenu des objectifs quantitatifs collectifs qui leur sont fixés ; pour cela, les conseillers « entreprises » doivent nécessairement prospecter et rechercher avec leurs collègues conseillers accompagnement les profils des demandeurs d’emploi les plus adaptés aux offres ; de même, chaque équipe de conseillers « accompagnement » a un objectif de nombre de demandeurs d’emploi à réintégrer au marché de l’emploi et de durée moyenne du chômage et doivent donc être en phase avec les besoins des entreprises.

-La répartition des effectifs entre les équipes de conseillers entreprises et de conseillers accompagnement est équilibrée.

L’offre d’emploi pour un poste de conseiller mentionne les caractéristiques attendues suivantes : un diplôme universitaire, par exemple dans les domaines de l’accompagnement social, de l’économie de l’entreprise, de l’éducation, des connaissances du marché du travail et du marché de la formation souhaitables, de même que l’expérience des relations avec les jeunes et autonomie, capacité de communication, capacité de travail et service au client.

Les objectifs quantitatifs ne sont pas fixés au niveau individuel, mais à celui des équipes de conseillers (5 ou 6 personnes), tels le nombre d’offres recueillies à pourvoir sur l’année (équipes de conseillers entreprises) ou la durée du chômage (équipes de conseillers accompagnement des demandeurs d’emploi).

Le diagnostic initial est précédé d’une préparation de 30 à 40 minutes environ, destinée au recueil de toutes les informations nécessaires pour éviter d’aborder des questions administratives lors du rendez-vous de diagnostic. L’entretien de diagnostic est réalisé par un conseiller accompagnement, qui a la possibilité de croiser leurs conclusions avec celles d’un logiciel d’évaluation de la distance au marché du travail ; l’entretien dure de 45 à 60 minutes.