L’évolution de la fonction de manager a évolué avec celle des organisations (montée en puissance de la matière grise, de la digitalisation, des motivations des collaborateurs…).
⇒ Les formations au management adhèrent à trois modèles peu compatibles entre eux qui renvoient à trois figures du manager :
– le gestionnaire scrupuleux et discipliné qui contrôle les risques de déviance en s’appuyant sur des instruments de gestion, issus de l’organisation scientifique du travail (planifier, diriger, organiser, contrôler). Ce modèle est visiblement en crise, confronté à l’émergence de nouvelles aspirations des salariés et à de nouvelles formes d’organisation de la production ; il est considéré comme vecteur de souffrances chez les subordonnés comme pour le manager lui-même,
– Le leader charismatique suscitant l’engagement des collaborateurs. Il est en phase avec les figures l’économie numérique,
– le coach veillant à apporter son soutien bienveillant et discret aux collaborateurs autonomes. Ce modèle voit souvent le manager comme un obstacle à l’autonomie des salariés, voire comme une charge inutile. Appliquant le principe de subsidiarité, le manager coach dans l’organisation apprenante est là pour « faire grandir » les salariés, en favorisant l’esprit d’initiative, la coopération, la prise de risque et l’innovation par les membres de son équipe.
⇒ L’inévitable “bricolage” dans les fonctions actuelles de management
Tout en restant fidèle au culte traditionnel du leadership, la formation actuelle des managers valorise également la coopération comme source alternative de performance ; chaque manager est souvent obligé de « bricoler » entre des prescriptions, pour s’adapter concrètement à la situation.
Les managers font face à des situations complexes, aux déterminants multiples (écologiques, économiques, techniques, sociaux, politiques). Leur travail consiste à imaginer, en interaction et en collaboration avec d’autres, ce que pourrait être une situation différente, résolvant certaines difficultés, satisfaisant mieux certains objectifs. Les managers gèrent tout autant des personnes que le travail de ces personnes.
⇒ L’adaptation des modèles
De fait, progressivement depuis les années 1980-1990, dans un mouvement de changements organisationnels, les dispositifs de gestion et de contrôle, servant à rendre compte des résultats du travail pour les prises de décision, ont réduit ce travail à des chiffres dans des tableaux, minimisant une partie des résultats. Ce reporting éloigne les managers de la prise en charge de problèmes concrets. “En minimisant les caractéristiques du travail réel, cela conduit à ne laisser passer que ce qui est lisse, transparent, façonné aux tableaux de reporting. La conséquence reste que les salariés sont alors peu écoutés, peu impliqués et leurs marges décisionnelles réduites. Les managers se retrouvent pris dans l’engrenage.”
Classiquement, le manager est pensé comme l’acteur chargé d’identifier les facteurs de blocage, les entraves au bon fonctionnement du dispositif productif, et de définir et mettre en place les modifications nécessaires. Mais la vision traditionnelle de ce qu’est une organisation a bougé, passant d’une organisation vue comme une structure hiérarchique et fonctionnelle à une vision dynamique où l’organisation est un système vivant, un lieu de tension et de régulation permanente entre acteurs, le lieu d’un travail d’organisation en état transitoire, instable, toujours renégocié.. La question est alors non d’appliquer des modèles préconstruits, mais de favoriser des dispositifs adaptatifs.
La formation des managers passe par deux canaux : la formation, initiale ou continue, d’une part, et les dispositifs d’intervention formative, d’autre part. Dans les deux cas, il ne s’agit plus de transmettre les « bonnes pratiques » pour résoudre des problèmes déjà identifiés mais de permettre le développement de pratiques singulières pour concevoir et résoudre des problèmes tout aussi singuliers, et ce, à travers la réflexion sur ces pratiques.
Pour ne savoir davantage : Développer les compétences des managers | Cereq
Pour une excellente illustration vous pouvez lire “Le management créatif, la deuxième révolution Netflix”, David Barroux, le 28/02/21 Les Echos entrepreneurs et hebdo