37% des PME-ETI sont opérationnelles pour une industrie du futur.


"L'avenir de l'industrie", Bpifrance le Lab, novembre 2018

Méthodologie : 2 055 dirigeants, de tous les secteurs industriels manufacturiers et de tous les territoires, ont  répondu; 32 ont fait l’objet d’un entretien en face à face. Enquête menée d’avril à juillet 2018.

Effectif moyen (70 salariés) et médian (28 salariés); 82% sont des entreprises familiales ou patrimoniales et 15% des filiales (9% de groupes étrangers et 6 de groupes Français), 3% des coopératives.

 

63% des PME-ETI sont dans une démarche d’évolution ou de transformation pour aborder l’industrie du futur.

 

♦ En bref quelques chiffres sur l’industrie manufacturière :

⇒ 213 303 entreprises dont 190 164 TPE, 22 900 PME, 1 598 ETI et 81grandes entreprises

⇒ 2,815 millions de salariés (11,1% de l’emploi total); 13% des salariés en Ile-de-France, 16% en Auvergne-Rhône-Alpes, 10% dans le Grand Est et 9% dans les Hauts-de-France.

⇒ 223Md€ de valeur ajoutée (10,2% du PIB Français)

⇒ la 7éme puissance mondiale et la 3éme en UE

⇒ 436,4Md€ de produits exportés, 3,5% des exportations mondiales et un déficit commercial de 49,5Md€

⇒ 247 secteurs d’activité dont 20% les industries mécaniques (6éme rang mondial), 19% les industries agroalimentaires (4éme exportateur mondial), 9% l’automobile (3éme rang en UE), 8% la chimie (2éme rang en UE) et 5% la pharmacie (4éme rang en UE), l’aéronautique (2éme rang mondial), la plasturgie-caoutchouc (4éme producteur mondial) et 28% de divers.

 

La France fait partie des pays où la part de l’industrie manufacturière dans le PIB a le plus diminué au cours des 20 dernières années, pour atteindre environ 10%.

 

♦ Toutefois, depuis quelques mois, un vent d’optimisme souffle sur l’industrie : chiffre d’affaires reparti à la hausse après des années de stagnation, marges reconstituées à leur plus haut niveau depuis le début des années 2000, solde net des créations d’usines sur le territoire français redevenu positif en 2017, emploi et part des exportations françaises stabilisés après des années de baisse.

Du côté des dirigeants de PME-ETI, la confiance est de retour : 70% sont optimistes quant à la capacité de l’industrie française à se relever.

Mais les difficultés de recrutement ont atteint un sommet dans l’industrie en 2018 (46% des entreprises).

 

77% des dirigeants de PME-ETI disent avoir une vision stratégique pour leur entreprise; 62% l’ont partagée avec leurs associés, leurs managers, leurs collaborateurs ou leurs clients, 35% l’ont partagée avec l’ensemble de leurs collaborateurs 12% avec leurs clients. 42% l’ont formalisée dans un document (rapport d’activité, business plan…).

 

♦ Quelles sont les raisons de ce déclin industriel ? Sont souvent citées :

-le (mauvais) positionnement de gamme des produits français,

-le retard d’investissement dans l’outil de production et dans les technologies numériques qui pénalise la compétitivité coûts et hors coûts et l’effort d’innovation insuffisant,

-Un trop grand nombre de petites entreprises et un nombre insuffisant d’ETI,

-La financiarisation du capital des entreprises industrielles au détriment d’une vision et d’une approche de long terme, et démantèlement de grands groupes industriels têtes de filière (Alcatel-Alsthom, Péchiney, Rhône-Poulenc, Arcelor…),

-La mauvaise qualité du dialogue social et la mauvaise image de l’industrie, source de difficultés de recrutement.

 

♦ Ce qu’industrie du futur signifie pour les dirigeants de PME-ETI :

-42% une industrie automatisée, robotisée, digitalisée

-28% une industrie innovante et positionnée haut de gamme

-18% des enjeux forts autour des hommes et des compétences 

-13% une industrie agile, flexible et réactive

-12% passer d’une industrie contrainte et réglementée à un marché européen cohérent, en évitant le nationalisme

-11% une industrie propre et responsable

 

42% des dirigeants définissent l’industrie du futur en se référant aux nouvelles technologie. 58% laissent cette dimension technologique à l’arrière-plan et se concentrent sur d’autres dimensions (politique, écologique, humaine…).

 

♦ 63% des PME-ETI sont dans une démarche d’évolution ou de transformation, 22% dans une phase de réflexion, mais tout à fait conscientes qu’il faudra évoluer, alors que 15% ne considèrent pas qu’une évolution de leur organisation / schéma industriel / modèles économique… soit nécessaire. Parmi les 63% :

 

-13% considèrent être à un stade bien avancé de leur transformation : le renouvellement de l’équipement de production, l’intégration des nouvelles technologies, la mise en place d’une démarche RSE, la formalisation d’une vision stratégique… Leur enjeu est de franchir un nouveau cap dans la digitalisation. Leurs principaux freins se situent dans la difficulté à recruter des talents et à trouver certaines compétences (notamment informatiques). 

Leur profil :  taille dans la moyenne du panel, équipement récent ou à la pointe, entreprise très ouverte sur l’extérieur, filière Électronique/TIC, perspectives de croissance bonnes, voire très bonnes.

 

24% estiment avoir franchi une 1re étape, typiquement la mise en place d’un ERP,
ou d’un nouvel équipement de production, d’une nouvelle organisation du travail ou d’une démarche RSE. Les principales difficultés perçues sont liées à la gestion du changement : résistances internes et crainte de déstabiliser leur organisation.

Leur profil : entreprise moyenne ou ETI, ouverte aux partenariats externes, positionnement de l’offre de l’entreprise à repenser.

 

-26% sont au stade des 1res expérimentations : réflexion sur leur positionnement, sur l’investissement dans la modernisation de leur parc de machines. Les freins les plus fréquents sont les compétences internes et l’identification de fournisseurs de solutions internes.

Leur profil : taille et âge de l’équipement dans la moyenne du panel, enjeu stratégique saillant,  repenser le positionnement et l’offre de l’entreprise.

 

-22% sont au stade de la réflexion :

Leur profil : une petite entreprise à l’équipement âgé, voire vétuste, peu innovante, très peu ouverte (peu de partenariats); aucun enjeu stratégique n’est saillant; c’est la lutte pour la survie; solitude dans la réflexion, accès au financement peu facile.

 

-15% sont ne sont pas dans une dynamique de transformation :

Leur profil : TPE ou petite entreprise, filière agroalimentaire, pas ou peu innovante, très peu ouverte (peu de partenariats); aucun enjeu stratégique saillant; perspectives, stabilité de l’activité.

 

♦ La modernisation des équipements

“Il n’est pas nécessaire de sensibiliser les dirigeants de PME-ETI à l’enjeu de modernisation de leur outil de production. 70% en font un enjeu important, voire prioritaire de ces prochaines années…. L’un des grands points d’étonnement de notre enquête est le suivant : alors que les mondes politique et économique s’accordent à penser que l’une des grandes faiblesses de notre industrie est son retard d’investissement dans l’équipement de production, ce n’est visiblement pas un diagnostic que partagent les dirigeants de PME-ETI manufacturières. 90% d’entre eux pensent, au contraire, que leur équipement est performant, en tout cas suffisamment pour ne pas être un handicap. 44% disent avoir un outil de production récent et performant (38%) ou à la pointe (6%). 46% considèrent que leur équipement est âgé mais néanmoins performant et 10% à renouveler.

Les dirigeants des PME-ETI manufacturières sont-ils lucides dans leur évaluation ? Ont-ils assez de points de repère pour se comparer à l’international ?”

 

Seuls 46% des dirigeants de PME-ETI manufacturières font de la digitalisation (présence numérique, ERP, supply chain…) un enjeu stratégique important (35%) ou prioritaire (11%). La digitalisation, sur une liste de 8 enjeux proposés, arrive en 7e position. La digitalisation reste donc un enjeu secondaire pour les PME-ETI, sauf pour celles qui sont bien avancées dans leur cycle de transformation.

L’exploitation des données de production apparaît comme un gisement important d’économies on estime en effet les gains de productivité liés à l’exploitation des données de production entre 20 et 30%.

 

♦ Pour les dirigeants, la modernisation n’est qu’une clé d’avenir parmi d’autres. Les 7 leviers pour réussir demain sont à leur sens :

 

-Affiner son positionnement concurrentiel (développer une vision, choix stratégiques forts en termes de positionnement et de différenciation, revisiter en permanence sa stratégie et son positionnement sur le marché).

-Refonder la relation donneur d’ordre/sous-traitant (sortir d’une relation de domination et de dépendance économique , se positionner comme partenaire technologique ou apporteur de solutions)

-Innover autrement (innover avec des partenaires, innover au plus près des besoins et des usages des clients, innover en reconnectant conception et fabrication).

-Développer son écosystème pour créer plus de valeur  (développer les partenariats et les collaborations externes, créateurs de valeur pour l’innovation, la formation, le recrutement, nouer des relations de qualité, pérennes et de confiance, avec les acteurs-clés de la filière tels les fournisseurs, clients,)

-Produire de façon propre et responsable (devancer le durcissement de la réglementation et les attentes des consommateurs en termes de qualité, traçabilité, sécurité, naturalité des produits, et respect de l’environnement et des hommes).

-Articuler l’international et le « made in France » (repenser son schéma industriel en lien avec les nouvelles technologies et les attentes des clients, s’appuyer sur la marque France).

Développer le capital humain de l’entreprise (accompagner la mutation de métiers et des compétences dans l’entreprise, transformer l’entreprise sans perdre la force du capital humain, faire évoluer le management et la gouvernance, créer un cadre favorable à la participation et au bien-être).

 

♦ Et l’innovation ?

-52% estiment qu’elles sont innovantes, voire très innovantes :  42% se disent innovantes, 9% très innovantes, 37% moyennement innovantes et 12% pas ou peu innovantes.

62% ont  innové au cours  des 3 dernières années :  60% ont commercialisé un nouveau produit ou utilisé un nouveau procédé de production, de commercialisation ou d’organisation, 30% ont déposé un brevet, une marque, un modèle et 28% ont fait les deux à la fois.

-47% investissent plus de 2% de leur chiffre d’affaires en R&D, mais 10% plus de 10% de leur CA, 10% entre 5 et 10% de leur CA, 27% entre 2 et 5% de leur CA.

-32% ont recours à l’open innovation, c’est-à-dire nouent des partenariats avec des partenaires externes dans le cadre de leur activité de recherche, développement et innovation : 60% s’associent à des instituts de recherche, 52% à d’autres PME-ETI, 21% à de grandes entreprises et 15% à des startups.

 

Le partenariat

45% ont développé au moins un partenariat ou une collaboration externe; il porte avant tout sur l’innovation; il est suivi de l’export et de la formation/recrutement.

Les PME-ETI collaborent principalement avec d’autres PME-ETI (64%), des écoles ou des instituts de recherche (61%), plus rarement avec des grandes entreprises (25%) ou des startups (12%).

34% ont noué au moins 3 partenariats, 31% deux et 35% un seul. Cette propension croît avec la taille : 67% des ETI ont au moins un partenaire, contre 34% pour les entreprises de moins de 10 salariés.

 

♦ Le lien avec l’environnement

A la question « qu’est-ce que l’industrie du futur selon vous ? », 11% font spontanément référence à la dimension environnementale.

60% ont investi ou sont sur le point d’investir dans une solution d’efficacité énergétique ; 49% ont développé ou sont en train de développer une offre « green » ou une chaîne d’approvisionnement responsable; 34% ont déjà mis en place une démarche RSE.

 

L’export

70% exportent : 19% au moins 50% de leur CA, 31% de 11 à 49%, 40% entre 1 et 29%.

 

♦ Les conditions de réussite

-Construire une vision et une stratégie industrielle bottom-up

-Communiquer au grand public une autre image de l’industrie et de l’industrie du futur

-Reconnaître et célébrer les « champions cachés »; l’industrie, contrairement aux idées reçues, ce sont aussi des entreprises en forte croissance, leaders mondiaux sur leur marché.

-Développer le patriotisme industriel / porter haut le drapeau du « made in France ».

-Faire respecter des règles du jeu identiques pour tous

-Faire en sorte que les entreprises, têtes de filière, développent un sentiment de responsabilité à l’égard de l’écosystème de leurs sous-traitants

-S’atteler à un vrai plan d’actions en faveur de la formation professionnelle dans l’industrie