Une approche des revenus des Français par type de territoire.


"La France et ses territoires : édition 2021", Insee Références, mai 2021

L’article aborde les disparités entre départements, espaces urbains et ruraux, tailles de communes.

 

En France, en 2017, un habitant sur deux vit avec moins de 21 000€ par an ; ce niveau de vie médian annuel correspond à un revenu disponible de 1 750€ par mois pour une personne seule, et à 3 700€ par mois pour un couple avec deux enfants de moins de quatorze ans.

 

Les disparités entre les territoires sont marquées, tant entre départements qu’au sein des départements voire des agglomérations. Les départements les plus pauvres se situent dans les DOM, au nord et dans une partie du centre et du littoral méditerranéen.

⇒ Une typologie des départements

♦ Une approche explicative

 

-Les habitants des départements du nord de la France, de l’ancienne région Languedoc‑Roussillon et d’outre‑mer (DOM) disposent d’un niveau de vie médian inférieur au niveau national. Il est par exemple de 18 610€ par an dans le Pas‑de‑Calais et de 18 560€ dans l’Aude. Le taux de chômage important, respectivement de 11,5% et 12,5%, contre 9,4% en France en 2017, explique en partie ces faibles revenus.

 

-Dans le centre de la France également (la Creuse, l’Indre, la Dordogne, etc.), le niveau de vie médian est en deçà du niveau national, mais pour des raisons différentes : les salaires sont faibles et la proportion de retraités modestes est importante.

 

-À l’inverse, des populations à plus forts revenus, du fait des salaires plus élevés des travailleurs transfrontaliers, sont situées à proximité de la Suisse, de l’Allemagne ou du Luxembourg.

 

-Également, des nombreux retraités aisés s’installent le long du littoral méditerranéen (Menton, Nice, Saint‑Tropez, etc.), océanique (La Rochelle, les Sables‑d’Olonne) ou même de la Manche (Cabourg, Deauville, Granville). Le revenu médian est élevé aussi autour de certaines régions viticoles (Champagne, Bourgogne).

 

-Mais c’est surtout dans les plus grandes villes que le niveau de vie est le plus important, en premier lieu en Île‑de‑France, mais également dans les plus grandes métropoles (Lyon, Toulouse, Bordeaux, Nantes, Strasbourg) qui bénéficient d’une forte proportion d’emplois qualifiés.

 

♦ 6 profils de départements selon le niveau de vie des habitants  :

 

-« Les départements pauvres » (16 départements) se situent le plus souvent dans le nord (Aisne, Ardennes, Nord, Pas‑de‑Calais) et le sud (de l’Ariège et des Pyrénées‑Orientales au Vaucluse), mais aussi la Seine‑Saint‑Denis et les DOM. Les habitants les plus pauvres y sont surreprésentés (29% de la population de ces départements ont un revenu inférieur au 2e décile, contre 20% au niveau national), et symétriquement les individus les plus aisés sont sous‑représentés.

 

-« Les départements de classe moyenne inférieure » (32 départements) se situent principalement dans le centre de la France : le Cher, la Corrèze, la Loire, le Lot, le Tarn, la Vienne, mais aussi la Seine‑Maritime et les Hautes‑Pyrénées. Les populations les plus surreprésentées sont celles ayant un niveau de vie un peu inférieur à la médiane nationale. Les habitants ayant un revenu compris entre le 2e et le 5e décile national de niveau de vie représentent 34% de la population de ces départements contre 30 % en France métropolitaine. La proportion des personnes les plus modestes est la même qu’au niveau national (proche de 10%), en revanche, seuls 6,3% des habitants ont un niveau de vie supérieur au 9e décile du niveau de vie national.

 

-« Les départements de classe moyenne » (25 départements) sont situés majoritairement dans l’ouest comme le Calvados, l’Eure, l’Eure‑et‑Loir, le Finistère, ou dans le Loiret. Les individus les plus surreprésentés sont ceux du centre de la distribution des revenus, entre le 3e et le 7e décile, avec 46% de la population, alors que les populations les plus modestes et les plus aisées sont sous‑représentées.

 

-« Les départements aisés » (7 départements) sont ceux du Doubs, de la Gironde, du Bas‑Rhin, de Savoie. Ils sont souvent industriels, frontaliers, situés à l’Est et dans les Alpes ou abritent une métropole. À l’exception des 10% les plus riches, la population y est d’autant plus surreprésentée que son niveau de vie est plus élevé : 35% entre le 6e et le 9e décile.

 

-« Les départements très aisés » sont ceux des Yvelines et de la Haute‑Savoie, du fait de la proximité avec Genève. La proportion des habitants aisés est très élevée (22% de ces habitants bénéficient d’un niveau de vie supérieur au 9e décile de la France métropolitaine), celle des plus modestes est très basse : 19% de la population a un niveau de vie inférieur au 3e décile pour ces deux départements (30% pour la France).

 

-« Les départements de métropoles » (16 départements) regroupent ceux de certaines métropoles comme Toulouse, Lyon, Marseille, Nice et 5 départements de l’Île‑de‑France, notamment Paris et les Hauts‑de‑Seine. Les personnes ayant un niveau de vie compris entre les 3e et 6e décile représentent 25% de la population. Les populations les plus aisées y sont à l’inverse surreprésentées : entre le 8e et le 9e décile et au‑dessus du 9e décile national on compte respectivement 12% et 15% de la population du département, sans que les populations défavorisées soient sous-représentées (10% de la population de ce profil a un niveau de vie inférieur au 1er décile calculé au niveau national).

⇒ Au regard du type d’espaces urbains et ruraux

La taille de l’aire d’attraction des villes, qui définit l’étendue de l’influence d’un pôle sur les communes environnantes à travers les déplacements domicile‑travail, et la position des communes au sein de l’aire, expliquent également les écarts de niveau de vie.

 

-De manière générale, le niveau de vie médian est plus élevé dans les aires plus peuplées et, à l’intérieur des aires, il est plus élevé dans la couronne que dans le pôle de l’aire d’attraction de la ville. Les habitants du pôle de l’aire de Paris disposent annuellement de 2 110€ de plus que ceux des pôles des aires de 700 000 habitants ou plus, et ces derniers perçoivent eux‑mêmes 1 070€ de plus en moyenne que les habitants des aires de 200 000 à 700 000 habitants. Ces écarts ne tiennent pas compte des différences de coût de la vie, lequel est notamment plus élevé à Paris.

 

-Les habitants des pôles d’aires de 50 000 à 200 000 habitants ont le niveau de vie le plus faible. Ces écarts tiennent notamment au profil de la population active dans ces territoires : le taux d’emploi des 25‑64 ans est de plus de 75% dans le pôle de Paris, proche de 70% dans les pôles des aires de 700 000 habitants ou plus et atteint seulement 66% dans les autres pôles, 1/3 des personnes en emploi du pôle de Paris sont cadres, 1/4 dans ceux des aires de 700 000 habitants ou plus contre moins d’1/5 ailleurs.

 

-Les couronnes regroupent globalement une population plus aisée que leur pôle, et ce indépendamment de la taille de l’aire. Les résidents des couronnes des aires de 700 000 habitants ou plus bénéficient par exemple d’un revenu disponible médian par unité de consommation supérieur de près de 10% à celui de la population de leur pôle. Le taux d’emploi y est généralement supérieur à celui de leur pôle.

 

-Mais les inégalités entre individus sont plus marquées dans les pôles des aires, les plus peuplées comme les moins peuplées.

Les disparités entre habitants sont les plus fortes au sein des départements frontaliers, la plupart de ceux abritant une métropole et ceux du pourtour méditerranéen. Les disparités de niveau de vie infra‑départementales sont fortes dans le nord de la France, en Seine‑Saint‑Denis et sur le littoral méditerranéen en raison des faibles niveaux de vie des plus modestes.

⇒ L’évolution 2012-2017

♦ Entre 2012 et 2017, les écarts entre départements se sont en partie réduits. Le niveau de vie médian des habitants dans les dix départements les plus modestes a progressé annuellement de 0,9% en euros constants soit deux fois plus que pour la population des dix départements les plus aisés (+ 0,5% en moyenne annuelle). Les inégalités entre départements restent toutefois supérieures à 2008.

 

♦ À une échelle géographique plus fine, entre 2012 et 2017, les disparités selon la taille des aires d’attraction des villes se sont également réduites : le niveau de vie a moins augmenté dans les aires les plus grandes, dont les habitants sont en moyenne plus aisés, que dans les aires plus petites. Sur cette période, le niveau de vie médian a ainsi progressé de 0,4% par an en euros constants dans l’aire de Paris, contre + 0,9% dans les aires les plus petites et + 1% par an en moyenne dans les communes hors attraction des villes.

 

♦ Si la situation se rééquilibre entre aires de taille différente, c’est l’inverse à l’intérieur des aires. Le niveau de vie augmente davantage pour les habitants des couronnes des aires, dont la situation était déjà plus favorable, que pour ceux des pôles.

 

♦ Entre 2008 et 2011, les écarts entre hauts et bas revenus se sont accrus au sein de tous les départements : les inégalités ont augmenté au niveau national, avec la hausse du niveau de vie des plus aisés (+ 0,5% par an en euros constants au niveau national) et la baisse du niveau de vie des plus modestes (– 1,2%).

 

♦ Depuis 2012, les disparités au sein des départements se réduisent, sous l’effet de la hausse des revenus les plus modestes. Au niveau national, le niveau de vie plafond des 10% d’individus les plus modestes augmente (+ 0,5% par an en euros constants entre 2012 et 2017) alors que le niveau de vie plancher des 10% les plus aisés stagne (+ 0,1%). La réduction des inégalités de revenus à l’intérieur des départements est générale.

⇒ Les départements les plus modestes ont été les plus touchés par la crise de 2008

Par exemple, le niveau de vie médian a nettement reculé dans le Pas‑de‑Calais, l’Aude, l’Aisne et l’Orne (– 0,8% par an en moyenne entre 2008 et 2011 en euros constants). Au cours de cette période, il a aussi fortement baissé en Seine‑Saint‑Denis (– 1,8% par an) .

 

La crise de 2008 a particulièrement affecté les départements industriels où le niveau de vie de la population était déjà relativement bas : les Vosges, la Haute‑Saône, la Haute‑Marne, l’Aube et tous les départements des Hauts‑de‑France hormis le Nord. Les seuls départements avec une forte part d’activité industrielle (plus de 18% de l’emploi en 2007) où la baisse du niveau de vie est restée limitée, sont ceux limitrophes du Luxembourg, de l’Allemagne et de la Suisse.

 

Plus généralement, les départements où le niveau de vie médian progresse en euros constants entre 2008 et 2011 abritent une grande métropole (Lyon, Marseille, Toulouse, Bordeaux, Nantes et l’ouest de la région parisienne) ou sont dans l’influence d’une métropole étrangère, le niveau de vie médian étant déjà élevé.

⇒ Évolution des emplois et de la population selon les aires d’attraction des villes

La population, et surtout l’emploi, sont de plus en plus concentrés dans les grandes agglomérations. Les aires d’attraction des villes de 700 000 habitants ou plus (y compris Paris) rassemblent ainsi 43% de l’emploi en 2017, soit 1,4 point de plus en dix ans. Ces aires concentrent 38,9% de la population (+ 0,8 point en dix ans). Inversement, le poids des aires d’attraction en dessous de 700 000 habitants recule, de même que celui des communes hors attraction des villes.

 

Pour en savoir davantage : La France et ses territoires – La France et ses territoires | Insee

Article “Les inégalités territoriales de niveau de vie en France entre 2008 et 2017” page 49