La progression des femmes dirigeantes dans les entreprises de plus de 10 salariés se fait surtout via la création/rachat d’entreprise et la transmission familiale (cumulé 66%) et par la promotion (27%), peu par le recrutement ; la direction collégiale y est plus fréquente que chez hommes


« Portraits de femmes dirigeantes en France », KPMG, juin 2015

Sources : base Diane bureau Van Dijk

Trois photographies des dirigeants d’entreprise de 10 à 5 000 salariés en France ont été réalisées sur trois périodes : 2003 / 2008 / 2013.

Deux populations ont été testées : les effectifs dirigeants (évolution des femmes dirigeantes vs hommes dirigeants) et les équipes dirigeantes (les équipes masculines, les équipes féminines et les équipes mixtes). Pour ce faire :

• Une enquête d’opinion réalisée par l’Institut CSA auprès de 600 dirigeants (400 femmes et 200 hommes) ; 79% appartiennent à des entreprises de 10 à 49 salariés ; 85% sont DG, gérante ou co-gérante ; 19% ont moins de 40 ans, 37% 40-49 ans et 44% 50 ans et plus ; les 2/3 sont issues d’une formation supérieure ; 32% ont moins de 5 ans d’ancienneté dans la fonction de dirigeante, 19% de 6 à 9 ans, 49% 10 ans et plus. Echantillon raisonné. Interrogation par téléphone entre le 30 mars et le 15 avril

• Des entretiens et témoignages de 12 femmes dirigeantes à travers le réseau KPMG « Women for business ».

 

En dix ans, leur accession aux postes de décision a été très lente, avec une augmentation de seulement 1,2 point (de 12,8% en 2003 à 14 en 2013) ; si leur importance décroit avec la taille de l’entreprise (de 13-15% pour les moins de 500 salariés, contre 7 à 10% pour les 100 salariés et plus), celle-ci s’est davantage accrue chez les plus de 50 salariés, notamment les 200 salariés et plus :

Nbre de salariés de l’entreprise

10-20

20-50

50-100

100-200

200-250

250-500

500-1000

Plus de 1000

Ensemble

2013

15,4

13,5

11,7

10,2

10,6

9,0

7,4

7,5

14,0

2003

14,5

12,6

9,2

7,7

6,3

5,9

4,5

3,5

12,8

Ecart en %

6,2

7,1

27,2

32,5

68,3

62,5

64,4

114,3

9,4

La progression des femmes dirigeantes se fait surtout à travers la direction collégiale (une femme sur deux) ; ceci étant, la progression en 10 ans des femmes en équipe est moins marquée que celle des hommes (+21% contre +48) ; la progression des équipes dirigeantes mixtes est par ailleurs très importante dans les entreprises de plus de 200 salariés :

 

Homme dirigeant unique

Homme en équipe

Femme dirigeante unique

Femme en équipe

2013

59,4

27,0

6,8

6,8

2003

69,4

18,2

6,7

5,6

Ecart en %

-14

48,4

1,5

21,4

Les femmes dirigeantes de moins de 40 ans sont une forte minorité (38%), mais la progression se situe chez les 30-60 ans (un peu plus de 50%, quelle que soit la tranche d’âge) :

 

Moins de 30 ans

30-40 ans

40-50 ans

50-60 ans

Plus de 60 ans

Ensemble

2013

20,0

18,2

13,9

12,0

13,0

13,6

2003

19,5

12,1

8,9

8,0

11,4

9,4

Ecart en %

2,6

50,4

56,2

50,0

14,0

44,7

Les femmes dirigeantes sont plus nombreuses dans les activités plus dévolues traditionnellement aux femmes (social, services aux personnes et commerce), alors que leur progression s’est focalisée sur l’immobilier, les IAA, les services aux entreprises, l’industrie voire le commerce :

 

Social

Services

Aux particuliers

Commerce

IAA

Immobilier

Agriculture

Services

Aux entreprises

transports

industrie

Construction

2013

22,4

18,6

16,4

16,2

14,1

13,7

12,2

12,1

7,1 à 13,9

7,7

2003

22,4

18,0

14,7

13,1

11,6

12,7

10,7

12,4

3,1 à 12,8

8,1

Ecart en %

0

3,3

11,6

23,7

21,6

7,9

14,0

-2,4

(18)

-5,0

Comment devient-on une femme dirigeante d’entreprise ?

Si les femmes comme les hommes y accèdent d’abord en créant eux-mêmes ou en rachetant leur entreprise (44% pour les premières et 43% pour les seconds) et par promotion interne (27% pour les unes comme pour les autres); elles le deviennent davantage par transmission familiale (22%, contre 16% pour les hommes), et moins que les hommes par recrutement externe (7% contre 14).

 

Les femmes ont davantage bénéficié de la transmission familiale, quelle que soit la caractéristique observée ; idem, avec toutefois une fréquence plus faible, de la création/rachat d’entreprise et nettement moins via un recrutement externe.

 

Femme

Homme

Création

/rachat

Transmission

familiale

Promotion

interne

Recrutement

externe

Création

/rachat

Transmission

familiale

Promotion

interne

Recrutement

externe

Taille

entreprise

10-49 sal

48

24

22

6

43

16

27

14

50-249

33

17

39

11

27

8

34

31

250 et+

5

17

60

18

0

6

75

19

Secteur

BTP

49

32

7

12

58

21

17

4

commerce

48

20

28

4

48

12

21

19

Services

44

14

30

12

43

5

36

16

Industrie

29

48

23

0

23

34

32

11

Age

-40 ans

36

21

37

6

25

36

26

13

 

40-49 ans

34

20

37

9

41

12

36

11

 

50 et plus

55

24

14

7

55

8

20

17

Niveau

Diplôme

Inf bac

50

31

15

4

39

21

31

9

bac

45

19

28

8

46

19

11

24

Bac+2

44

25

25

6

34

29

32

5

Bac+3 et 4

49

25

22

4

41

4

38

17

Bac + 5

34

14

39

13

51

8

23

18

Ensemble

 

44

22

27

7

43

27

16

14

S’agissant des dirigeant(e)s ayant accédé à leur fonction par promotion interne, cette dernière se produit en moyenne après un temps comparable passé dans l’entreprise (10,6 ans pour les femmes et 10,3 pour les hommes) ; le niveau de diplôme joue un rôle d’accélérateur pour les femmes (une femme met 5,5 années de plus qu’un homme pour accéder au poste de dirigeant quand elle est de niveau inférieur au bac, et 1,5 année quand elle est de niveau bac+5).

 

Interrogé(e)s sur les raisons qui les ont poussé(e)s à accepter un poste de dirigeant(e), les valeurs des dirigeants ne paraissent pas différer fondamentalement ; toutefois, les femmes  citent moins le goût d’entreprendre (39%, moins que les hommes 46%) et  plus que les hommes l’épanouissement professionnel (38% contre 27%) ; néanmoins, 31% des femmes soulignent que l’opportunité s’est présentée alors qu’elles ne l’avaient pas particulièrement recherchée (23% des hommes) :

Deux réponses

possible

Gout d’entreprendre

Sens du risque, innovation

Epanouissement

personnel

Opportunité

Non recherchée

Participer à la

stratégie

Responsabilités

importantes

Indépendante plutôt

que salarié

Manager équipe plus importante

Femme

39

38

31

23

16

15

9

Homme

46

27

24

23

19

12

11

Ecart

-7

+11

+7

0

-3

+3

-2

Les atouts pour leur prise de fonction sont plus que les hommes, la motivation (37% contre 30), et moins l’expérience (21 contre 30) ou les performances (6 contre 9) ; capacités (14 et 12), et soutien de l’entourage (12 et 13) sont au même niveau.

 

Les dirigeantes sont plus nombreuses (84%) que les dirigeants (74%) à déclarer avoir bénéficié de soutiens lors de leur prise de fonction, ces soutiens sont sensiblement les mêmes : la famille, les amis ou relations (61% contre 49), d’anciens collègues, confrères ou consœurs (32% vs 23%) et des réseaux d’accompagnement (15% vs 19%). La famille, les amis ou relations jouent un rôle primordial pour les dirigeantes de moins de 40 ans (80%) ; ce rôle est plus restreint pour les dirigeantes plus âgées.

 

Si les dirigeants partagent tous une même passion de l’entreprise, les femmes y mettent une composante humaine et relationnelle plus forte : trois éléments arrivant en tête : le management (31% vs 33%), la prise de décisions stratégiques (28% vs 36%) et le développement commercial de l’entreprise (26% vs 30%). Cependant, les femmes insistent davantage que les hommes sur la relation client (20% vs 12%), les rapports avec les parties prenantes de l’entreprise (20% vs 11%) et le fait d’encadrer d’autres personnes (14% vs 6%).

 

Concernant les obstacles rencontrés, les hommes comme les femmes citent d’abord la difficulté à concilier vie professionnelle et vie personnelle (respectivement 28% et 25%). Mais elles ont moins confiance en elles que les hommes (20% vs 13%) et ce même à un niveau élevé d’étude Bac +5 et plus (17% contre seulement 6% des hommes).

Autres obstacles fréquemment cités par les femmes : leur manque d’expérience (17% ; même proportion chez les hommes), leur âge (14% vs 15%) et leur genre (11%, alors que le genre n’est pas considéré comme un obstacle par les hommes) ; cette perception se manifeste davantage parmi les dirigeantes de moins de 40 ans (16%).

 Parmi des autres éléments constituant des difficultés dans leur fonction, les dirigeantes sont davantage sensibles à la pression et au stress que les hommes (39% vs 28%) ; cette difficulté concerne cependant moins les dirigeantes de moins de 40 ans (24%) que celles de 40 à 49 ans (45%) et de 50 ans et plus (40%) ; les jeunes dirigeantes apparaissent même un peu moins gênées par la pression que leurs homologues masculins de la même génération.

La charge de travail constitue une difficulté plus importante pour les femmes (27% vs 22), tout comme la gestion financière (16% vs 13).

 

Les hommes voient davantage que les femmes le management comme une difficulté (25% vs 13%) et le fait d’encadrer d’autres personnes (15 vs 11%).

 

Alors que la mobilité géographique est souvent signe d’évolution au sein d’une entreprise, les femmes la perçoivent plus fortement comme une contrainte que les hommes : c’est parmi les femmes seules sans enfant et les dirigeantes d’entreprises de 250 salariés et plus que la mobilité est la plus perçue comme une opportunité.

 

Interrogés plus précisément sur l’implication dans l’amélioration de la situation des femmes dans l’entreprise (aménagement du temps de travail notamment), 34% des femmes se disent très engagées  (16% des hommes), et 44% plutôt engagées (vs 63). Elles n’envisagent pas pour autant une éventuelle discrimination positive à l’embauche en leur faveur : la question du genre n’est pas importante dans une perspective de recrutement pour 82% (vs 74). Dans l’ensemble, les dirigeantes semblent plus fermement convaincues des avantages de la mixité hommes-femmes dans les postes à responsabilités au sein des entreprises, qu’il s’agisse du dynamisme (57% vs 47% parmi les hommes), de la prise en compte des enjeux humains (61% vs 50%), de l’efficacité et de la motivation.

 52% des dirigeantes et 56% des dirigeants pensent que la situation de la mixité s’est plutôt améliorée dans les entreprises (notamment dans les 250 salariés et plus, 71%) ; en ce qui concerne leur entreprise, ils sont 44%.

La mixité est davantage porteuse d’efficacité (61% « Oui, tout à fait ») et de créativité (59% « Oui, tout à fait ») pour les femmes, alors que les hommes y voient davantage de confiance (56% « Oui, tout à fait ») et une meilleure prise en compte des relations sociales (55% « Oui, tout à fait »). Pour améliorer les relations dans l’entreprise ou pour créer plus directement de la valeur, chacun des dirigeants parle en fait de complémentarité.

Tout à fait

Efficacité

Meilleure prise

En cpte enjeux

Humains

Créativité

Dynamisme

Meilleure prise

En compte

Relations sociales

Motivation

Ethique

Confiance

Croissance

Création de

valeur

Long terme

Femme

61

61

59

57

57

56

50

49

48

47

Homme

54

50

51

47

55

51

50

56

47

44

Un double phénomène : montée en puissance des équipes dirigeantes (une entreprise sur cinq) et au sein de ces équipes l’existence et la croissance des équipes mixtes ; les équipes dirigeantes demeurent fortement liées à la notion de famille.  Cette montée concerne plus particulièrement les structures de 10 à 50 salariés et les entreprises de plus de 200 salariés ; toutes les strates d’âge sont concernées.

Par ailleurs, quand on observe les performances moyennes des trois dernières années en 2003, 2008 et 2013, le modèle de la direction mixte semble gagnant, d’autant que ces performances sont durables sur les dix années observées.