Le périmètre d’observation de cette étude est celui des secteurs représentés par l’Union des Entreprises de Proximité (U2P) : ceux de l’artisanat, ceux du commerce alimentaire de détail et de l’hôtellerie-restauration et ceux des activités libérales, qu’ils relèvent des secteurs du droit, de la santé, ou des professions techniques ou du cadre de vie.
Au total, ces secteurs rassemblent les deux tiers des entreprises du secteur marchand, mais ne prennent pas en compte le commerce notamment de détail non alimentaire. Leurs entreprises sont majoritairement positionnées sur des marchés locaux et régionaux. Elles se distinguent par leur ancrage territorial, la proximité géographique et relationnelle qui les lient à leur clientèle. La formulation « entreprise de proximité », qui est aussi la signature de l’U2P, se réfère à cette caractéristique économique et fonctionnelle des très petites entreprises. Les artisans, commerçants, hôteliers-restaurateurs et professionnels libéraux irriguent en effet l’ensemble du territoire et emploient près de 3,5 millions de salariés, sans compter les très nombreux apprentis et stagiaires formés en alternance. Noter que les autoentrepreneurs sont compris.
Sources : Recensement de la population (INSEE 2015), emplois non salariés (ACOSS / Sécurité Sociale des Indépendants), emplois salariés (INSEE, DADS 2015) , apprentis (ISM, d’après l’enquête SIFA / MEN-MESR, DEPP DEPP).
Dans la suite de l’article, j’intitulerais “services aux entreprises”, ce que l’étude appelle “Professions libérales techniques et du cadre de vie”, pour la commodité de lecture.
Une approche qui permet de chiffrer les femmes dirigeantes d’entreprise individuelle en nombre par activité, en profil (âge, diplôme, vie familiale…), sans oublier les femmes salariées de ces entreprises.
Les femmes cheffes d’entreprises
⇒ Le flux, sa composition et son évolution
Au sein des dirigeants de proximité, les femmes représentent un dirigeant sur trois : elles sont 41% des professionnels libéraux, 36% des commerçants (au sens de cette enquête), 22% des artisans et 17% des dirigeants d’entreprises de 10 salariés et plus.
Parmi la totalité des 794 700 cheffes d’entreprises, 67% appartiennent au secteur libéral (59% au secteur de la santé, 34% aux activités de services aux entreprises et 7% aux activités du droit), 26% à l’artisanat (dont 68% dans les services, 21% dans la fabrication), 9% au commerce (dont 66% à la restauration-hébergement et 34 au commerce alimentaire hors fabrication).
A titre de comparaison,les chefs d’entreprises hommes les plus nombreux sont localisés dans les activités construction (39%), santé (21%) et services aux entreprises (18%), alors que les cheffes d’entreprises les plus nombreuses le sont dans la santé (49% , notamment les infirmières), la coiffure/soins de beauté (20%) et les services aux entreprises (17%).
Entre 2013 et 2015, on observe une légère augmentation de la part des dirigeantes d’entreprise libérale (+2 points) et des entreprise de 10 salariés et plus (+1 point). Noter aussi que la part des dirigeantes a doublé dans l’artisanat en l’espace de 30 ans (11% en 1984 vs 22 en 2017 mais intégrant les autoentrepreneurs).
Les femmes sont majoritaires dans la coiffure et soins de beauté (88% des chefs d’entreprise), la fabrication textile et cuir (80%), la santé (61%, avec une très forte présence chez les infirmières libérales), les activités de formation et de RH (56%), le droit (53%).
Elles sont par contre très peu nombreuses dans la construction (3%), la réparation et l’installation de machines industrielles (4%), le travail des métaux (6%), la réparation auto (6%), les transports (10%), les activités de récupération (11%), les services informatiques (13%), la boucherie-charcuterie (15%).
Leur présence est plus faible qu’en moyenne dans le travail du bois (19%), les activités de réparation hors auto/moto (20%), les agents et courtiers d’assurance (21%), la boulangerie-pâtisserie (25%), les activités comptables (25%), la fabrication de meubles (26%).
⇒ Le profil
♦ En termes de répartition territoriale
Selon le Recensement Général de la population, les dirigeantes sont davantage présentes dans les régions du Nord-Ouest du territoire (Hauts-de-France, Normandie, Bretagne et Pays de la Loire), mais moins présentes dans les régions Corse et Sud-Provence-Alpes-Côte d’Azur. Ceci étant, les écarts sont faibles (entre 27,3% en Corse et 32,3 en Hauts de France).
Dans les entreprises artisanales et commerciales, la part des femmes parmi les chefs d’entreprise est plus élevée dans le quart Nord-Ouest (Hauts-de-France avec 29,5%, Normandie avec 28,8% et Bretagne avec 28,1%).
Dans les entreprises libérales en revanche, les femmes sont plus présentes dans le Sud-Ouest (Occitanie, 41,8% et Nouvelle-Aquitaine, 41,5%), ainsi qu’en Bretagne (40,7%); elle est la plus faible dans la région Centre-Val de Loire ainsi que dans le Nord-Est (Hauts de Seine et Grand Est).
Par ailleurs, Les dirigeantes apparaissent également un peu plus mobiles géographiquement dans leur parcours de vie que les dirigeants : si 47% vs 40 résident en métropole ailleurs que dans le même département, 40% (et 43 pour les hommes) résident dans leur département de naissance.
63% des dirigeantes, vs 60% des hommes, travaillent dans la même commune que leur lieu de résidence, alors que 11% (femmes ou hommes) travaillent en dehors de l’unité urbaine dans laquelle ils habitent, les autres travaillant à proximité de leur lieu de résidence mais hors leur commune de résidence.
Les dirigeants d’entreprise artisanale et commerciale travaillent et résident davantage dans une commune rurale que les dirigeants d’entreprise libérale, qui eux, sont principalement installés en milieu urbain.
♦ En termes d’âge : si la pyramide des âges des dirigeants et des dirigeantes est proche, les dirigeantes sont un peu plus jeunes (35% ont moins de 40 ans vs 29% des hommes), alors que ces derniers sont plus âgés (41% 50 ans et plus vs 36).
Les femmes sont toujours plus jeunes, notamment dans les activités de santé et du droit, alors que l’écart est faible dans l’artisanat de fabrication et de services. :
♦ En termes de diplôme
Dans les secteurs de proximité, un type de diplôme est souvent requis pour pouvoir exercer (CAP dans les métiers de l’artisanat, diplômes d’État de niveau III, II ou I dans les professions libérales réglementées). Cette réglementation explique les disparités de diplôme observées d’un secteur à l’autre.
Dans l’artisanat des services (essentiellement la coiffure), les femmes ont l’obligation de détention d’un titre de niveau IV pour exercer l’activité de coiffure, ce qui n’est pas la cas des services automobiles ou les activités de réparation pour les hommes.
Deux autres facteurs peuvent être avancés pour expliquer cette distinction entre les femmes et les hommes : celles qui se sont formées au métier de leur entreprise ont poussé plus loin leur parcours de formation et par ailleurs une partie des dirigeantes ont réalisé leur parcours de formation dans un autre domaine que le métier de leur entreprise.
Les dirigeantes d’entreprise sont plus nombreuses à avoir un diplôme d’études supérieures (50% contre 36% des hommes). Globalement, le niveau d’études tend par ailleurs à s’élever.
♦ Conciliation vie familiale / vie professionnelle
Les dirigeantes sont moins nombreuses à vivre en couple (72% contre 79), notamment dans les professions libérales (67 à 72% vs 78 à 84%). Par contre, il n’y a pas ou peu d’écarts dans l’artisanat du BTP (80%), l’artisanat et le commerce de l’alimentation (82 vs 80), et l’hôtellerie-restauration (74% vs 77), ces entreprises étant plus souvent pilotées en couple.
Les dirigeantes vivent plus souvent en famille monoparentale que les hommes (10% contre 4) et lorsqu’elles sont en couple, elles ont moins d’enfants que les dirigeants (27% vs 32 ont au moins 3 enfants).
Par ailleurs, 18 % des dirigeants déclarent que leur conjoint travaille régulièrement dans l’entreprise. La gestion familiale de l’entreprise est plus fréquente dans les entreprises de l’alimentation (31%), de l’hôtellerie-restauration (36%) et du commerce alimentaire de proximité (38%) . C’est également dans ces secteurs que le conjoint contribue plus fortement au fonctionnement de l’entreprise (entre 38 et 40 heures par semaine).
Les conjoints sont davantage présents dans les entreprises de 6 à 10 salariés; ils y travaillent en moyenne 34hres30 par semaine, contre 29hres dans les 1-5 salariés, et 24hres30 dans les entreprises sans salarié. En moyenne, les conjoints actifs dans l’entreprise ont 49 ans. Ils sont plus jeunes dans les entreprises de 10 salariés et plus (39,5 ans).
Noter que les conjoints collaborateurs (les statistiques ne permettent pas de chiffrer les conjoints salariés ou associés) sont principalement des femmes (20 950, 84% des conjoints collaborateurs); ce régime est plus largement utilisé dans l’artisanat et le commerce de l’alimentation et le BTP.
51% des conjoints collaborateurs femmes ont 50 ans et plus, dont 7% 60 ans et plus; du coté des hommes conjoints collaborateurs, 67% ont plus de 50 ans (dont 27% 60 ans et plus); ce régime est donc moins attractif pour les conjoints les plus jeunes; d’ailleurs, leur nombre a diminué de près d’un tiers entre 2015 et 2017 (-34 % dans les activités artisanales et commerciales et -9 % dans les activités libérales); dans les entreprises ayant des salariés, les conjointes choisissent majoritairement le statut de salarié.
Les femmes salariées des entreprises de proximité
♦ Les entreprises des secteurs de proximité emploient plus de 3,3 millions de salariés où les femmes représentent 43 % des salariés (1 450 000 salariées).
En volume, le secteur des professions libérales de services aux entreprises est le premier secteur pour l’emploi salarié de femmes (347 900 salariées), devant l’hôtellerie-restauration (250 000).
En matière de mixité, de fortes disparités sont observées entre les secteurs; les salariés des activités libérales du droit et de santé sont très majoritairement des femmes (les femmes y représentent respectivement 88 et 82% des salariés), alors que ceux de l’artisanat du BTP sont pour 89% des hommes. Une relative parité existe en revanche parmi les salariés de l’hôtellerie-restauration, l’artisanat et le commerce de l’alimentation, l’artisanat des services, les professions libérales techniques et du cadre de vie.
♦ Le choix de métiers des femmes salariées diffèrent souvent de ceux des hommes, les femmes exerçant davantage des métiers de services (coiffeuse) ou occupent des postes dans les fonctions transversales de vente (vendeuse en alimentation) et de gestion-administration ( secrétaire, d’employée comptable). Dans les activités libérales, les métiers les plus occupés par des femmes sont ceux de préparateure en pharmacie et d’employée des assurances.
La plupart de ces métiers sont fortement féminisés : les femmes y occupent souvent plus de 70% des postes (93% des secrétaires, 92% des préparateurs en pharmacie, 81% des vendeurs, 81% des employés d’assurance, etc.).
Quelques métiers sont à recrutement plus mixte (36% des employés polyvalents de la restauration sont des femmes, de même que 47% des serveurs qualifiés).
♦ CDI, temps partiel et salaires
Concernant les contrats de travail, la part des femmes en contrat à durée indéterminée (82%) est légèrement supérieure à celle des hommes (80%); un secteur d’activité fait cependant exception : l’artisanat des services (la coiffure avec 68%).
Par contre, le temps partiel est plus répandu dans certains métiers fortement féminisés comme la vente en alimentation, la coiffure ou le métier de préparateur en pharmacie; dans certains cas également, le temps partiel peut être « choisi » par les femmes pour des raisons personnelles et familiales.
Concernant les conditions salariales, à poste et âge égal, l’écart salarial est au désavantage des femmes dans la plupart des métiers : les femmes gagnent en moyenne 13,2% de moins que les hommes (sur le plan national, pour l’ensemble des secteurs de l’économie, cet écart est de 18,5 %). Cet écart progresse avec l’âge.
♦ Les apprenties
Au cours de l’année scolaire 2016-2017, près de 200 400 apprentis ont suivi une formation en apprentissage au sein d’une entreprise de proximité, dont 64 200 femmes (32% des apprentis).
En nombre d’apprenties formées, ce sont les secteurs de l’artisanat des services, de l’artisanat et commerce de l’alimentation et de l’hôtellerie-restauration qui accueillent le plus d’apprenties (respectivement 23 200, 13 400 et 11 800). Mais la part de femmes formées est plus importante dans le secteur des professions libérales de santé (88% des apprentis sont des femmes), et dans les activités juridiques et judiciaires (69% des apprentis sont des femmes).
Ces dernières sont sous-représentées parmi les apprentis, sauf dans l’artisanat des services et dans les professions libérales de santé où cette part est similaire.
Le choix des métiers reste donc particulièrement sexué, la plupart des activités formant majoritairement des apprentis masculins (BTP et services automobiles). Inversement, quelques métiers forment essentiellement des apprenties, notamment au sein de l’artisanat des services : les soins à la personne (90% de femmes), le commerce de fleurs (84%), professions médicales (88 %) et en particulier les métiers d’auxiliaire vétérinaire (95%) et de préparateur en pharmacie (88%). De la même façon, dans l’artisanat de fabrication, les apprenties sont plus nombreuses à s’orienter vers des activités de fabrication d’articles divers, telles que la bijouterie (67%) ou les activités de textile, habillement (61%).
À noter : le nombre d’apprentis et d’apprenties a diminué de 8% entre 2012-2013 et 2016-2017, à l’exception de l’artisanat et du commerce de l’alimentation (+9%).
Les apprenties représentent 27% des effectifs en niveau V, 39% en niveau IV et III et 44% en niveaux II et I, parce que les femmes poussent plus loin leurs parcours scolaires et choisissent davantage des métiers exigeants des diplômes de gestion par exemple, se préparant le plus souvent à travers des BTS ou des diplômes de niveaux supérieurs.