Qu’en est-il des entreprises familiales ?


"Entreprises familiales et COVID, quelles tendances pour le monde d’après ?", Observatoire National de l’Entrepreneuriat Familial français, opinion, Way, janvier 2021

Méthodologie : 2 échantillons, l’un de 500 dirigeants d’entreprises de 10 salariés et plus, dont la moitié pilote des entreprises familiales, un second concerne 500 salariés travaillant dans des entreprises de 10 salariés et plus. 

L’échantillon n°1 a été constitué selon la méthode des quotas, selon les critères de la taille de l’entreprise, du secteur d’activité et de la région. L’échantillon n°2 a été également constitué selon la méthode des quotas, selon les sexe, âge, région, CSP, taille d’entreprise et secteur d’activité. Les interviews ont été réalisées du 8 mars au 9 avril 2021.

 

À propos de la Chaire Entrepreneuriat Familial et Société : la chaire a été lancée en juin 2013 sous l’impulsion de l’entreprise familiale Fleury Michon, des grands groupes EY, Crédit Mutuel Equity et le CIC Ouest, en partenariat avec le Medef Vendée. Sa mission est de contribuer à consolider leur pérennité et de soutenir leur croissance en développant des travaux de recherche, des programmes de formation et des événements dédiés en associant la dimension académique à l’expertise et à l’expérience des acteurs de terrain. En intégrant le projet mondial STEP (Successful Transgenerational Entrepreneurship Practices), la chaire est devenue le Pilote France d’une équipe de six chercheurs, travaillant dans des universités et des écoles de commerces. En France, elle a lancé en 2016 l’Observatoire des entreprises familiales en Pays de la Loire, avant d’étendre son projet pour créer en 2019 l’Observatoire National de l’Entrepreneuriat Familial.

 

Si les entreprises familiales se portent plutôt bien et conduisent une politique favorable à leurs salariés, non sans tension, elles intègrent aussi davantage la culture entrepreneuriale, ce qui peut les conduire à chercher un repreneur extérieur à la famille.

⇒ La crise sanitaire n’a pas d’impact sur le niveau de confiance en l’avenir économique des entreprises familiales

♦ 91% des dirigeants des entreprises interrogés restent confiants en l’avenir économique de leur entreprise ; le nombre de dirigeants « tout à fait confiants » a même doublé entre la 1ére et la 2éme édition de l’Observatoire (32% en 2021 contre 16% en 2019).

 

Les dirigeants des entreprises familiales sont plus optimistes (38%) que leurs homologues des entreprises non familiales (29%). Plus de 90% de leurs dirigeants estiment que leurs entreprises ont été performantes en matière de chiffre d’affaires contre 82% pour les TPE. Ils sont plus confiants dans le développement de leur entreprise, sa croissance et sa pérennité. 

 

80% des entreprises familiales interrogées considèrent avoir été beaucoup plus performantes dans leurs capacités d’innovation (contre 53% en 2019) pendant la période du COVID. Cette démarche renforcée d’innovation se reflète notamment dans les investissements en R&D et dans les projets entrepreneuriaux. 

 

De surcroît, plus le chiffre d’affaires de l’entreprise est élevé, plus les dirigeants sont optimistes (93% des entreprises avec un CA supérieur à 10M€, dont 56% « tout à fait confiants »).

 

♦ 83% des dirigeants d’entreprise familiale envisagent avec confiance l’avenir de leur famille au sein de l’entreprise dans les 5 prochaines années. Le taux des répondants «tout à fait confiants » a augmenté de 15 points entre 2019 et 2021.

 

Et les salariés ?

♦ Au cœur des entreprises interrogées, 67% des salariés se disent optimistes quant à l’avenir économique de leur entreprise pour les 5 prochaines années ; ceux des secteurs de l’industrie et des services sont les plus confiants, en particulier les 50-64 ans (75%).

Ils sont majoritairement confiants quant au développement (63%), à la pérennité et à la croissance (61%) et en la capacité d’innovation de l’entreprise (58%).

 

♦ Toutefois, les salariés sont moins confiants s’ils travaillent en famille. En effet, ils sont relativement moins confiants en la santé financière de l’entreprise (65% contre 76% pour ceux qui ne travaillent pas en famille), et la pérennité de leur emploi (64%). Si l’entreprise rencontre des difficultés, les salariés pourraient craindre un licenciement pour eux et/ou le membre de leur famille. Les conséquences seraient alors préjudiciables au niveau non seulement individuel mais aussi familial, sans oublier la menace que le travail en famille représente sur la frontière vie privée/vie professionnelle (pour 65% des salariés).

⇒ Les relations avec les salariés

♦ Diriger dans un contexte familial, cela procure une proximité avec les salariés selon 88% des dirigeants, une meilleure qualité de vie au travail pour 83%,et une communication interne plus facile pour 72%.

 

♦ Dirigeants et salariés s’accordent sur le fait que la performance de leur entreprise est positive en matière de : qualité des relations clients, fidélisation des talents, croissance du chiffre d’affaires, développement personnel des salariés, politique RSE, attractivité, et capacité d’innovation.

 

♦ Toutefois, les risques de tension entre les membres de la famille sont davantage présents à l’esprit des salariés que des dirigeants d’entreprises familiales. Recruter un autre membre de la famille ou ne pas le recruter, le faire évoluer, le licencier ou le voir quitter volontairement l’entreprise, tout comme avoir des divergences de point de vue sur l’avenir de l’entreprise, constituent autant d’événements possibles, à même de créer des tensions. Là où les dirigeants imaginent ces tensions possibles autant au sein de la famille qu’au sein de l’entreprise, les salariés les projettent surtout au niveau des relations avec l’entreprise.

 

Par exemple, l’entrée de membre(s) de la famille est associée à une expérience difficile pour 42% des salariés interrogés surtout pour ceux en posture d’encadrement (33%). De leur point de vue, ce type de recrutement peut créer en interne un sentiment de népotisme ou de favoritisme : 23% des salariés le ressentent encore aujourd’hui et 19% seulement au moment du recrutement.

⇒ La politique salariale

♦ Les entreprises ont beaucoup misé sur les salariés en les fidélisant (92% en 2021 contre 85% en 2019) et en maintenant les emplois en télétravail ou en chômage partiel. De nouveaux talents (79% en 2021 contre 71% en 2019) ont été recrutés pour développer le digital dans toutes ses formes (e-commerce, réseaux sociaux, site web, référencement etc…).

Face à la crise COVID, 81% des dirigeants pensent avoir été plus performants dans leur politique RSE en 2021 (contre 63% en 2019) : bien-être au travail (73% EF contre 52% ENF), engagement responsable (50% EF contre 36% ENF) ; par ailleurs, les nouveaux actionnaires familiaux arrivés au sein des instances de gouvernance d’entreprises familiales sont très attentifs à cette transformation.

 

♦ Des perceptions plus contrastées se font jour en matière de gestion des ressources humaines entre dirigeants et salariés : attractivité (58% des salariés l’évaluent positivement contre 79% pour les dirigeants), et fidélisation des talents (59% des salariés l’évaluent positivement contre 92% pour les dirigeants).

De même, les salariés sont plus sceptiques quant à la performance de leur entreprise en matière de politique RSE, qu’ils perçoivent positivement pour 64% d’entre eux contre 81% des dirigeants. La seule dimension de performance par rapport à laquelle les salariés se montrent plus positifs que les dirigeants est le développement international de l’entreprise (perçu positivement par 65% des salariés contre 22% des dirigeants).

⇒ L’intérêt de travailler en famille pour les dirigeants

♦ Travailler en famille est perçu comme un avantage (63%) : plus d’entraide lors des périodes de forte charge de travail (45%), une gestion quotidienne familiale plus pratique (35%), et des liens familiaux renforcés (32%).

De plus, travailler en famille facilite la diffusion des savoirs professionnels (45%), renforce la fidélité à l’entreprise (43%), la transmission de l’histoire de l’entreprise (43%) et de l’histoire familiale (40%), et augmente la motivation professionnelle (36%).

 

♦ L’attachement à l’entreprise est beaucoup plus fort chez les dirigeants lorsqu’ils travaillent pour un groupe familial. 97% se reconnaissent massivement dans l’esprit familial qui est propre aux entreprises familiales. L’attachement à l’entreprise est soutenu par la transmission et la communication autour des valeurs fortes comme la confiance mutuelle (86%) et les relations entre collègues (77%).

⇒ Les entreprises familiales connaissent toutefois un changement important dans la culture d’entreprise

♦ Par rapport aux entreprises non-familiales, et ceci quelles que soient le secteur d’activité ou la taille de l’entreprise, la culture familiale diminue légèrement par rapport au premier Observatoire (52% en 2021 contre 64% en 2019), alors que la culture entrepreneuriale augmente (49% en 2021 contre 25% en 2019), ce qui est également le cas de la culture de la communication (41% contre 36%) et de la culture de l’innovation (28% contre 26%).

 

La culture entrepreneuriale est soutenue par la culture familiale avec des investissements en faveur des projets entrepreneuriaux des membres de la famille (17% en 2021 contre 11% en 2019), qui ont autant leur place que le financement de la R&D (16% en 2021 contre 21% en 2019). Le soutien financier apporté à l’entrepreneuriat intergénérationnel est encouragé par la présence des membres familiaux aux postes de direction opérationnelle.

 

Pour alimenter cette culture entrepreneuriale au sein de l’entreprise, les dirigeants favorisent l’entraide entre les salariés (75%) en valorisant ceux qui prennent des initiatives sans craindre les échecs (66%).

 

♦ L’époque où les descendants de la famille fondatrice accédaient directement aux postes de direction est en passe d’être révolue dans la majeure partie des entreprises familiales. Les dirigeants actuels prennent la mesure des difficultés inhérentes à la reprise de l’entreprise familiale.

 

D’ailleurs, plus l’entreprise traverse les générations, plus le risque de conflits familiaux augmente car le nombre d’interlocuteurs et le nombre de rôles possibles que chacun d’eux peut exercer en lien avec l’entreprise augmentent.

 

♦ En 2019, 8 dirigeants d’entreprises familiales sur 10 souhaitaient transmettre la propriété et la direction opérationnelle de l’entreprise à un ou plusieurs membres du cercle familial. Aujourd’hui, seulement 6 dirigeants sur 10 le souhaitent et à plus forte raison s’il y a des membres familiaux qui y travaillent déjà. Les résultats de l’Observatoire montrent également qu’il y a environ 6 fois plus de dirigeants qui pourraient confier la propriété de l’entreprise à un ou plusieurs salariés et 7 fois plus pour la direction opérationnelle, par rapport à 2019.

 

♦ L’ouverture des salariés au capital : la France est la championne européenne de l’actionnariat salarié selon les derniers chiffres de Fédération européenne de l’actionnariat salarié de 2020 avec 3 millions de personnes actionnaires de leur entreprise. Pourtant, les résultats de l’Observatoire montrent que l’ouverture du capital aux salariés aurait un impact plutôt neutre pour 64% des dirigeants et 53% des salariés ; son impact est reconnu comme positif par 24% des dirigeants et 35% des salariés. Dans cette démarche, ceux qui investissent le plus sont ceux en responsabilités d’encadrement (48%), dans l’industrie (48%) et les professions intermédiaires (44%).

 

Pour en savoir davantage : Deuxième étude de l’Observatoire National de l’Entrepreneuriat Familial français : Entreprises familiales et COVID, quelles tendances pour le monde d’après ? | Newsroom (audencia.com)