Les non qualifiés ont difficulté à se reconvertir avec succès.


"Se reconvertir, c’est du boulot ! enquête sur les travailleurs non qualifiés", Cereq Bref N° 418, février 2022

Méthodologie : enquête défis, observation de 4 ans, entre 2015 et 2019.

 

Les cadres et professions intermédiaires, quoique moins demandeurs de reconversion, sont ceux qui en tirent les meilleurs résultats.

 

Changer de métier est le souhait de 33% des salariés, 39% pour les emplois peu qualifiés, 32% les ouvriers et employés qualifiés et 29% les cadres et professions intermédiaires.

 

4 ans plus tard, sur 100 salariés aspirent à la reconversion, 34 réaliseront leur reconversion, 29 occuperont un emploi (dont 25 en 2019), et 12 dans leur entreprise d’origine.

⇒ Quels sont les raisons de vouloir quitter le métier ?

♦ La situation des ouvriers et employés peu qualifiés

L’idée d’une reconversion se forge plus souvent à l’occasion de difficultés rencontrées sur le marché du travail. L’aspiration à changer de métier s’exprime aussi quand la part du salaire de base est diminuée pour laisser place à la part variable selon la performance.

Se lancer dans une reconversion est rarement pensé de manière préventive, en dehors de toute menace, ou en réponse à des conditions de travail dégradées. Cependant, il est d’autant plus facile de s’y projeter que l’entreprise a établi un plan de sauvegarde de l’emploi intégrant un plan de reclassement.

 

♦ La situation des ouvriers et employés qualifiés

Ce souhait intervient moins souvent de manière brutale. Vouloir investir un nouveau métier se forge aussi dans le refus de la précarité, dans l’expérience d’emplois à durée limitée. Les raisons de vouloir quitter sa profession se concentrent sur des motifs qui découlent du travail lui-même et de sa reconnaissance (impression de ne pas être assez payé compte tenu du travail réalisé, sentiment que l’emploi occupé ne correspond pas à ses qualifications, sentiment de déclassement, conditions de travail qui rappellent les organisations tayloriennes), mais aussi sur le fait de pouvoir mieux concilier vies personnelle et professionnelle.

Autant de raisons qui ne surgissent pas comme priorités absolues pour les salariés en emploi peu qualifié.

 

♦ La situation des professions intermédiaires et des cadres

Ils sont moins touchés par le chômage ou exposés à des conditions d’emploi défavorables, et sont plus attentifs aux changements qui interviennent dans leur entreprise (risques ou des menaces sur leur emploi) ; ils le sont aussi moins quant aux décalages entre leurs aspirations individuelles et le travail lui-même (un travail plus intéressant, travailler moins souvent en flux tendu, ne plus être en porte-à-faux avec sa vie personnelle). Autant d’éléments qui amènent à penser que le virage tient plutôt à une recherche d’épanouissement, avec un travail et une vie qui aient du sens.

Ce type de reconversion est plus souvent mieux préparé et mieux maîtrisé que celles des autres catégories de salariés.

⇒ Quels dispositifs ont-ils sollicités ?

Les non qualifiés bénéficient au moins autant que les autres des dispositifs pour une reconversion. Entre 2015 et 2019, 22% ont eu recours au CPF (vs 10 les employés et ouvriers qualifiés), 14% ont réalisé un bilan de compétences, 12% ont pratiqué une VAE, 6% un CEP.

⇒ Quels résultats suite à leur reconversion ?

♦ En 2015 sur 100 salariés, 33 souhaitent changer de métier ou de profession. 4 ans plus tard, 10 d’entre eux réaliseront leur reconversion, 9 occuperont un emploi, 7 seront en emploi stable et 4 dans leur entreprise d’origine.

♦ Les taux de réussite de reconversion les plus élevés concernent les salariés dans les emplois les plus qualifiés, mais les différences restent mesurées entre les catégories : 39% des cadres et professions intermédiaires, contre 31% des ouvriers et employés non qualifiés et 29% des ouvriers et employés qualifiés.

 

♦ Ce sont les salariés les moins qualifiés qui sont, tout à la fois, les plus exposés à des conditions d’emploi dégradées et, paradoxalement, les moins enclins à penser à se reconvertir. Ils semblent davantage intérioriser les contraintes, leur capacité à changer s’en trouve entravée. Et puis, quels bénéfices attendre d’un changement !

 

♦ A l’issue de la reconversion, le retour à l’emploi est nettement plus marqué du sceau des inégalités : en 2019, à peine un non qualifié sur 5 sera en emploi, contre un sur 4 pour les qualifiés et un sur 3 chez les cadres et professions intermédiaires. 

Le maintien dans l’entreprise d’origine creuse le fossé entre les cadres et les ouvriers et les employés qualifiés ou non : 18% pour les cadres et professions intermédiaires vs 7 et 5 pour les 2 autres catégories.

 

Pour en savoir davantage : Se reconvertir, c’est du boulot ! Enquête sur les travailleurs non qualifiés | Cereq