Les autoentrepreneurs : motivations, création de l’entreprise, accompagnement…


"Auto-entrepreneurs : parcours, projets et perception du statut", Credoc, Cpsti, septembre 2024

Méthodologie : 

Une enquête quantitative auprès d’auto-entrepreneurs (régimes fiscaux et sociaux simplifiés) basée sur un échantillon de 60 000 AE transmis par l’Acoss, actifs à fin septembre 2023, avec une adresse mail pour au final interroger 3 366 AE entre le 29 novembre 2023 et le 8 janvier 2024 selon la méthode des quotas (Sexe, Âge Groupe professionnel, Région, Secteur d’activité, Ancienneté, Cumul avec un emploi salarié) ; 2 625 sont encore en activité fin 2023 (base de l’analyse).

Une enquête qualitative :  10 entretiens sur la base d’une typologie des AE réalisée en fin de phase quantitative, avec une focale sur les questions de protection sociale et de bascule possible vers un autre statut, à partir des AE ayant répondu à l’enquête et ayant accepté
de participer à l’étude.

Cette étude a donné lieu à 2 articles distincts.

 

Une vaste étude pour aborder les motivations, les modalités de création, et l’avenir.

⇒ comment s’est faite cette création ? 

♦ 55% étaient salariés avant de se lancer dans l’entrepreneuriat (dont 8% de la fonction publique) vs 72% les 5 ans précédant la création. 23% étaient demandeurs d’emploi (dont 6% non indemnisés), mais seulement 5% 5 ans avant la création. 12% étaient inactifs (étudiant, retraité, au foyer) et 5% à leur compte. Manifestement le chômage est passé par là.

 

Pour 51% cette création était un choix, pour 30% une opportunité et pour 19% une nécessité économique (39% pour les 65 ans et + et 33% pour les chômeurs non indemnisés)

 

♦ Les motivations pour cette création :

– Celui de créer une entreprise : concrétiser un projet, une idée (36), se mettre à son compte (33), créer quelque chose qui appartienne (32), 

– Améliorer son vécu professionnel : prendre en main son destin professionnel (36), pas de hiérarchie (28), se reconvertir (18), 

– La question financière :  arrondir ses fins de mois (21), gagner plus d’argent (14), le fait de ne plus avoir d’indemnité chômage (4),

– Un mieux vivre : le souhait de mieux équilibrer vie personnelle et vie professionnelle (37%), 

– La proposition d’une entreprise en termes de marché ou de collaboration (13).

 

♦ La création de l’entreprise a été déclenchée par :

– Une rencontre, une opportunité : la rencontre inspirante d’un entrepreneur (33%), celle d’un réseau d’accompagnement (9), d’une opportunité d’affaire (9), la constitution d’un capital financier suffisant (7),

– Des évènements personnels, comme un déménagement, un mariage, un décès (24), le covid (17), l’approche de la retraite (10), le départ des enfants (4),

– Un évènement professionnel (licenciement, mobilité…) pour 34%, les tensions avec l’ex employeur (2), 

⇒ Selon quelles modalités cette création ?

♦ L’ensemble des répondants se positionnent pour 39% dans les professions libérales, 35% dans l’artisanat et 26% le commerce. 

Les libéraux sont dans les services aux entreprises (31%), l’enseignement (6), la santé (4) ; les autres services regroupent 28% (services aux particuliers 12, arts et spectacles 8, et par ailleurs transport 4, activités immobilières 3 et activités financières 1) ; enfin 13% sont dans le commerce et HCR, 10% dans le BTP et 8 l’industrie.

 

♦ 56% des auto-entrepreneurs disposent d’un autre statut en parallèle : 28% le cumule avec un emploi salarié, 16% sont à la recherche d’un emploi, 8% sont retraités, 5% en formation, 3% déclarent un autre statut au moment de l’enquête. 

Pour 44% c’est l’unique activité professionnelle ; pour 56% une activité secondaire (pour 39% celle-ci représente moins de la moitié des revenus et pour 17% plus de la moitié des revenus).

28% cumulent avec un statut de salarié (737 répondants), dont 63% salariés d’une entreprise privée (et 24% dans la fonction publique, ou dans un organisme public) ; 80% sont sous contrat à durée indéterminée, et à temps plein, 20% ont un contrat à durée déterminée ; 35% sont à temps partiel.

 

Que recherchent-ils dans ce cumul ? 54% de ces salariés recherchent un complément de revenu (15% de l’ensemble des AE interrogés) 28% conservent leur activité principale par sécurité pendant la phase de lancement de leur projet entrepreneurial et 11% en font activité saisonnière ; 19% exercent leur activité sous plusieurs statuts.

 

D’ailleurs quel est leur chiffre d’affaires ? En 2022, 89% ont déclaré un CA inférieur au seuil de 34 400€ et 11% un CA 2022 au-dessus du seuil de 34 400€ ; 1/3 ont un CA inférieur à 10 000€ ; 25% n’ont pas renseigné leur CA (dans près de la moitié des cas, il s’agit d’activité créée récemment en 2021 et 2022 et 1/3 sont en emploi salarié).

⇒ La préparation du projet.

♦ La moitié ont concrétisé leur projet en moins de 6 mois, 30% entre 6 mois et un peu plus d’un an et 20% 2 ans et plus.

♦ 42% ont mobilisé leur épargne (49% les CA 2022 les plus élevés) ; 52% ont bénéficié d’une aide financière dont l’ACRE (42), l’ARE (17) et l’ARCE (8). 

Les peu formés, les peu accompagnés et ceux qui n’ont pas fait d’études de marché, ont moins bénéficié d’aides financières.

 

♦ Seuls 23% ont réalisé une étude de marché avant de lancer leur activité, avec une légère surreprésentation des 25-35 ans (27%) et des commerçants (26%). 

 

♦ 36% n’ont bénéficié d’aucun accompagnement, alors que 43% disent avoir été accompagné par des professionnels de l’accompagnement (26, une CCI ou CMA, et 17 un réseau d’accompagnement), 22 par un entrepreneur expérimenté, 21 par Pôle Emploi (+2 par l’Apec), 16% par l’Urssaf (?), 13% par un professionnel des entreprises (expert-comptable 7, banque 4, notaire 1, avocat 1).
L’étude ne précise pas le contenu de cet accompagnement (visite d’orientation, information, préparation du projet ?)

 

♦ 28% disent avoir suivi une formation à la création d’entreprise (41% les artisans, 33-34% les 45-65 ans, 33% ceux au CA le plus élevé, mais 21% pour ceux qui cumulent avec un emploi salarié). Là, encore, on ne sait rien de la durée et du contenu de ces formations.

Cette formation a été suivie dans une CMA (41%, la formation obligatoire d’une époque ?), une CCI (18%), un autre organisme de formation (11), une BG (8), Pôle Emploi (8) et autre (11).

 

♦ Le type d’accompagnement souhaité : une formation à la création, gestion d’entreprise (36) un réseau d’accompagnement (24), 2 éléments plus souvent cités par ceux qui ont déjà suivi une formation), puis des échanges avec des pairs (23, notamment ceux qui en ont déjà bénéficié), un conseil comptable (20), des échanges avec l’Urssaf (20), un accompagnement financier (20), un conseil fiscal (15), un conseil juridique (14).

 

Leurs besoins actuels :

– Pour développer leur entreprise : avoir suffisamment de clients (43), des échanges avec d’autres indépendants (10), des collaborations avec d’autres auto-entrepreneurs (9), un  accompagnement au développement économique (8),

– Pour alléger leurs finances : une baisse des charges sociales (29), une baisse des impôts et taxes (28), des financements (12), 

– Pour gérer leur entreprise : des conseils comptables (12), des conseils fiscaux (11), des conseils juridiques (7), une aide au changement de statut de l’activité (8), un accompagnement technologique, digital (8), une formation à la gestion d’entreprise (7), un accompagnement par un réseau (7),

Une couverture sociale qui réponde davantage aux besoins (19).

 

♦ Lorsqu’ils sont confrontés à des difficultés de gestion 62% s’informent très souvent ou assez souvent sur internet (et les réseaux sociaux 20), loin devant les proches (famille, ami, 38), un pair auto-entrepreneur (37), ou encore le conjoint (36) et plus encore loin des Urssaf (18), des mentor, coach, ou parrain (14), des réseaux d’accompagnement (10), des  CMA et CCI (8), des experts-comptables (7) et des banquiers (4).

⇒ Le statut d’autoentrepreneur.

♦ 80% connaissaient un autre statut juridique avant de lancer leur activité : les 2/3 ceux de l’entreprise individuelle et la SARL, la moitié les statuts d’EURL, SAS et SASU, trés peu celui du portage salarial et de la SA. Parmi ceux qui connaissaient d’autres statuts, les 2/3 avaient uniquement envisagé celui d’autoentrepreneur.

 

56% ont opté pour le statut d’autoentrepreneur pour la simplicité des démarches,  55% par sécurité (tester le projet ou la capacité d’entreprendre, limiter les risques financiers). 

 

♦ En quoi la simplicité des démarches ? Le fait de payer les cotisations en fonction du CA, la gestion comptable facilitée, le peu de formalité, l’inexistence de la TVA et sa gestion.

– Les avantages les plus souvent mentionnés : des procédures simplifiées en termes de comptabilité (27%) et de gestion (26%), la facilité de création (26%), la possibilité de cumuler avec un autre statut et le fait de ne pas avoir besoin d’un capital financier (19%). 

– Les inconvénients les plus signalés : 48% le fait que les cotisations soient payées sur la base du chiffre d’affaires et non du bénéfice (pas de déduction des frais réels généraux), 42% l’insuffisance de la couverture sociale, 15% le coût des assurances, 14% une image peu crédible sur le marché vis-à-vis de la concurrence, 13% des plafonds du chiffre d’affaires trop bas, et 13% la TVA applicable au-delà d’un certain plafond.

En ce qui concerne la protection sociale (42), sont plus insatisfaits les professions libérales (55),  les 35-45 ans (48) et les femmes (47). Sont le moins concernés ceux qui cumulent un emploi salarié (37) et les moins de 25 ans (28). 

 

D’ailleurs 71% considèrent que la protection sociale obligatoire est insuffisante. Elle est jugée insuffisante dans les cas de perte d’activité, pour la retraite, l’invalidité, les accidents du travail, les maladies professionnelles et globalement les indemnités pour maladie et maternité et les remboursements de soins.

 

23% n’ont adhéré à aucune couverture en complément de la couverture obligatoire (33 parmi ceux qui cumulent avec un emploi salarié et pour ceux en étude, déjà couverts au moins partiellement ailleurs).

48% ont adhéré à une seule couverture supplémentaire, 29 a au moins 2 couvertures. Ces dernières sont : une complémentaire santé (74%), un régime de prévoyance complémentaire (19), à une assurance contre le risque professionnel (15), à une assurance retraite supplémentaire (11), une assurance contre le risque de perte d’activité (9).

L’absence de couverture est avant tout justifiée par un coût trop élevé (45 à 55% selon le type de couverture) ; entre 23 et 42% (1/4 en moyenne) considèrent ne pas en avoir besoin ; 10% expriment la difficulté de choisir l’organisme, 3 à 6% la complexité de la démarche de souscription.

 

44% sont prêts à payer des cotisations minimales (52 ceux au chômage, 50 ceux dont le CA 2022 est le plus faible, 50 ceux dont c’est la seule activité, 49 commerçants. Par contre, 30% n’y sont pas prêts (les retraités 49, les 65 ans et + 46, et ceux qui cumulent un emploi salarié 37).

⇒ Comment envisagent-ils l’avenir ?

♦ 36% (49 les 35-49 ans et 44 les moins de 25 ans) envisagent faire évoluer leur entreprise dont 32% à moyen et long terme ; ces derniers optent plutôt pour l’entreprise individuelle classique (58 en moyenne dont 73 les professions libérales, 64 les femmes) ; 42% envisagent le passage en société (63% en Sarl/Eurl, 57 en SAS, SASU et SA).

 

Les raisons sont : le besoin d’investir (33), celui de protéger son  patrimoine personnel face au risque financier (29), du fait du dépassement des plafonds maximaux de chiffres d’affaires (22), pour s’associer (19) ou par besoin de lever des fonds (11).

 

Mais 22% ont cessé leur activité en 2023 (base 3 366 entreprises), qui sont-ils ? Des moins de 25 ans (46% de cette tranche d’âge), des célibataires (35), des commerçants (34 vs 18 les artisans et 20 et 6 les libéraux), ceux avec 2 à 3 ans d’ancienneté (34 vs 29 les 1-2 ans d’ancienneté, 21 les 3-4 ans, 16 les 4-5 ans, 11 les 5-10 ans et 8 les 10 ans et +), ceux qui cumulent avec un emploi salarié (28). 

 

♦ Que sont-ils devenus ? 

– Ils se sont majoritairement tournés vers le salariat : 32% ont repris un emploi salarié, 17% n’exercent plus que l’emploi salarié qu’ils avaient cumulé avec le statut d’AE, 2% sont en recherche d’emploi,

– Ils ont rencontré d’importants problèmes au sein de leur entreprise : 20% la non viabilité, 2 des problèmes techniques,

– Ils ont choisi d’autres voies : formation (9%), ont crée une nouvelle entreprise (6), ou n’ont pas encore démarré leur activité (2), et encore en étude (1), en reconversion (1), un statut qui ne correspond pas à l’activité (1), 

– Ou encore des problèmes personnels : santé (5), départ en retraite (4), déménagement (1), situation familiale (1).

 

Pour en savoir davantage : https://snpcc.com/wp-content/uploads/2024/10/3-Etudes-OSI-CREDOC-AE.pdf