Méthodologie : l’objectif est d’examiner la propension des employeurs à rappeler des candidats sortis du système scolaire et ayant fait l’expérience de dispositifs d’aides publiques ad hoc. Pour ce faire, un testing sur CV avec différents profils de jeunes a été réalisé entre le 23 janvier et le 13 juillet 2018. 10 938 candidatures ont été envoyées pour les métiers de cuisinier et de maçon (une part importante de jeunes y sont recrutés chaque année, principalement au niveau CAP, mais aussi parfois sans diplôme). Cinq parcours-types et représentatifs ont été testés. Les réponses des recruteurs, envoyées par e-mail ou laissées sur le répondeur du téléphone, ont été collectées jusqu’à octobre 2018.
Intéressant de remarquer que les moins de 10 salariés sont moins regardantes sur le diplôme et que les zones au taux de chômage faibles sont favorables à l’embauche de décrocheurs ayant joué formation continue et exprience professionnelle en entreprise.
La lutte contre le décrochage scolaire semble commencer à porter ses fruits en France. Si, en moyenne, 122 000 jeunes sortaient du système éducatif sans diplôme ou avec au plus le brevet des collèges à la fin des années 2000, ce chiffre a été ramené à 90 000 en moyenne en 2015, 2016 et 2017 (soit environ 12% des sortants). Cependant, ces jeunes « décrocheurs » qui sortent du système éducatif sans diplôme se retrouvent durablement aux marges du marché du travail (en 2018, 67% des 16-25 ans sortis sans diplôme étaient sans emploi ni formation). En 2019, 47% des jeunes sortis sans diplôme et ayant achevé leur formation initiale depuis 1 à 4 ans étaient au chômage.
Le taux de rappel des jeunes ( le nombre de candidatures qui reçoivent une réponse du recruteur pour demander des informations complémentaires au candidat fictif, lui proposer un entretien, ou lui proposer une embauche, rapporté à l’ensemble des candidatures envoyées) qui sont allés au bout de leur formation initiale est de 28% vs celui des décrocheurs restés inactifs pendant 2 ans, de 10%. Le taux de rappel des candidats décrocheurs ayant obtenu un titre ou un diplôme en formation professionnelle continue est assez proche de celui des candidats ayant acquis une expérience professionnelle sans formation complémentaire (respectivement 22%). Lorsque les candidats combinent une expérience professionnelle et un CAP obtenu par une formation continue, leur situation, le taux de rappel est de 26%.
Une expérience professionnelle ou une formation professionnelle certifiante permet donc de compenser en partie le handicap lié au décrochage scolaire.
Les entreprises ayant jusqu’à dix salariés rappellent 26,7 % des candidats non-décrocheurs, alors que les entreprises avec plus de dix salariés en rappellent 32,2%. En ce qui concerne les décrocheurs le taux est de 9-10% pour les 2 types de taille ; par contre, il monte à 26% pour les moins de 10 salariés et 30% quand le décrocheur a acquis une expérience professionnelle et un diplôme en formation continue.
Noter que les entreprises avec plus de dix salariés favorisent moins les candidats sans diplôme.
La probabilité qu’un candidat non-décrocheur soit rappelé pour un CDI est moins forte d’environ 4 points que pour un CDD (respectivement 26% et 30%). Les écarts selon la situation post décrochage sont proche qu’un CDI ou un CDD soit recherché, hors ceux avec expérience d’un an dans le métier et une formation professionnelle (taux de rappel pour les CDD de 28% et de 24% pour les CDI).
L’environnement extérieur peut également avoir un impact sur les chances de rappel pour un candidat; il s’agit de la distance en kilomètres qui sépare le candidat du lieu de travail, et du taux de chômage de la zone d’emploi dans laquelle se trouve le lieu de travail.
Les candidats fictifs ont tous le permis auto indiqué sur leur CV ; le taux de rappel est plus élevé pour les candidats non-décrocheurs qui répondent à des offres d’emploi à moins de 30 km de leur lieu de résidence (31% contre 28%). Même constat pour les décrocheurs ayant bénéficié d’une expérience professionnelle associée à une formation diplômante. Ce n’est pas le cas pour les autres candidats décrocheurs, pour qui la distance n’a pas d’importance.
Par ailleurs le taux de rappel des candidats est plus faible dans les zones où le taux de chômage est plus élevé que la moyenne, quel que soit leur profil ; dans les zones de chômage plus intense comparé aux zones de chômage plus faible, les écarts sont importants que l’on soit non-décrocheur (17,5 vs 28%), décrocheur (2% vs 5,4), décrocheur avec formation professionnelle continue (11 vs 19%), expérimenté en entreprise pendant un an (10,5 vs 19%) ou encore bénéficiaire du cumul formation professionnelle continue et expérience professionnelle (14 vs 26%).
Pour en savoir davantage : https://dares.travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/dares_analyses_decrocheurs_scolaires__insertion_professionnelle.pdf