Les personnes sorties définitivement de l’emploi avant 60 ans connaissent des trajectoires professionnelles stagnantes peu qualifiées et sont plus exposées au cumul de pénibilités physiques que les autres personnes de 60 ans ou plus. Leur sortie de l’emploi relève plus souvent de choix contraints en lien avec la sphère professionnelle. Leurs carrières sont davantage affectées par une santé plus dégradée.
Les ressources financières reflètent la trajectoire professionnelle ; on peut estimer à environ 1 600€ nets le revenu mensuel moyen par an en 2010 pour les ménages dont l’homme est sorti de l’emploi avant 60 ans, contre 2000€ pour ceux qui sont toujours en activité ; la nature des ressources changent aussi (peu de perception de loyer, moins de revenus d’épargne mais plus de prestations liées à la maladie à l’invalidité, plus d’aides au logement).
Parmi les individus âgés de 60 à 78 ans en 2010 et ayant exercé au moins 10 ans d’emploi, un peu moins de 7% des hommes et de 8% des femmes sont encore un emploi en 2010. Pour ceux ayant déjà cessé toute activité professionnelle, l’âge moyen au dernier emploi est d’un peu moins de 57 ans pour les hommes et de 55,5 ans pour les femmes. Ces personnes sont beaucoup moins nombreuses à déclarer un niveau de diplôme supérieur au baccalauréat (forte surreprésentation des postes d’ouvrier chez les hommes et d’employées chez les femmes).
Pour les hommes comme pour les femmes, plus les individus se sont retirés tôt de l’emploi et plus la part relative du temps passé à exercer un emploi avec de multiples pénibilités physiques s’avère importante (35% pour les hommes sortis avant 50 ans, 25% autour de 55 ans et un peu plus de 20% juste avant 59 ans ; pour les femmes, respectivement 20%, 15% et 10% environ).
59% des hommes et 35% des femmes sortis avant 60 ans ont connu des situations pénibles contre respectivement 36 et 30% pour ceux sortis après 60 ans. Par pénibilité, il faut entendre : travail physiquement exigeant, exposition à des produits nocifs, travail répétitif sous contraintes de temps et travail de nuit .
Ils déclarent plus souvent une santé altérée au moment de l’enquête, santé qui commencerait à se dégrader à partir de 40 ans pour les hommes ; 41% des 60-64 ans le disent contre 28% pour les autres (ceux qui ne sont pas sortis de l’emploi avant 60 ans) ; 1/4 indiquent que leur santé a joué un rôle dans la fin du dernier emploi, contre 15 % pour les autres.
En outre, ils semblent évoluer dans un contexte psycho-social moins favorable ; si, pour le dernier emploi exercé, ils ne déclarent pas significativement plus de difficultés à concilier leur travail et leurs obligations familiales, et entretiennent d’aussi bonnes relations avec leurs collègues que les autres, ils sont plus nombreux à exprimer des sentiments de frustration professionnelle (manque de reconnaissance ou compétences personnelles partiellement employées) ; qui plus est, 65% des hommes et 45% des femmes seulement ont choisi de partir en retraite (contre 89% pour les autres), ayant été plus souvent licenciés ; noter que les femmes parties avant 60 ans ont plus souvent choisi la démission (15% contre 1 à 2% pour les autres catégories).
Les indépendants, notamment les hommes, tout comme les cadres, sont nettement moins souvent sortis du travail à 60 ans ; cela est moins vrai pour les femmes indépendantes :
Indépendants |
Dont artisans, commerçants |
Dont agriculteurs |
Cadres |
Professions intermédiaires |
Employés |
Ouvriers |
||
Hommes |
Sortis avant 60 ans |
9 |
6 |
4 |
11 |
20 |
15 |
44 |
Pas sortis à 60 ans |
24 |
12 |
8 |
23 |
19 |
11 |
27 |
|
Femmes |
Sortis avant 60 ans |
7 |
7 |
5 |
6 |
19 |
45 |
17 |
Pas sortis à 60 ans |
12 |
7 |
8 |
11 |
16 |
46 |
11 |
Une typologie a été effectuée :
La démarche vise à caractériser les parcours professionnels masculins et féminins sur les 35 années comprises entre 15 et 49 ans au regard notamment de l’exposition ou non à au moins deux pénibilités physiques simultanées rencontrées par les personnes âgées de 60 ans et plus en 2010 et ayant travaillé au moins 10 ans
La classe 1 (55 % des hommes et 52 % des femmes) est caractérisée par des carrières continues non exposées aux pénibilités cumulées
La classe 2 regroupe des hommes (15 %) et des femmes (10 %) qui présentent également des carrières professionnelles assez continues jusqu’à 49 ans, mais subissent une plus forte instabilité de l’emploi (10,4 ans d’emploi court contre 3,7 ans en moyenne pour les hommes, et 13,1 ans contre 3,3 ans pour les femmes). Toutefois, les emplois occupés sont relativement peu pénibles physiquement.
La classe 3 regroupent 14 % des hommes et 8 % des femmes ; ces hommes et femmes entrent plus tôt dans la vie active (autour de 16 ans en moyenne) et passent plus de temps en emploi (32,5 ans essentiellement en emploi long, pour les hommes contre 31,3 ans pour l’ensemble des hommes et 27,9 ans pour les femmes contre 25,5 ans pour l’ensemble des femmes) ; ils sont exposés à au moins deux pénibilités physiques simultanées (89 % pour les hommes et 76 % pour les femmes). Il s’agit donc d’itinéraires « très exposés physiquement ». En lien avec des études plus courtes, ils finissent plus souvent leurs études sans diplôme et occupent plus fréquemment des postes d’ouvrier (notamment de l’industrie) ; les femmes de ce groupe vivent moins souvent en couple (un quart vivent seules autour de 30 ans et un tiers à 60 ans).
La classe 4 rassemble 6 % des hommes et 2 % des femmes ; les études sont plus courtes et sont suivies d’une période quasiment ininterrompue de 31 ans d’emplois longs jusqu’à leurs 50 ans ; si les emplois occupés sont très pénibles physiquement en début de carrière, les conditions de travail s’améliorent continûment à partir de 25 ans.
Les hommes de la classe 5 (4 % des hommes) passent autant de temps en emploi long que l’ensemble des hommes, mais sont 2,5 fois plus souvent exposés aux cumuls de pénibilités ; ils sont plus souvent sans diplôme et occupent des postes d’ouvrier (notamment dans la construction) ; on y trouve plus d’étrangers (15 % contre 7 %) ; ils ont plus souvent connu des situations de célibat ou de séparation (20 %).
Les hommes de la classe 6 (6 %) se caractérisent par une absence d’exposition au cumul de pénibilités ; dès leur entrée dans la vie active, ils occupent de manière continue des emplois longs peu ou pas exposés physiquement ; ils terminent leurs études initiales tard (à 24,4 ans contre 17,3 ans pour l’ensemble des hommes) ; 90% d’entre sont diplômés du supérieur. Les salariés du public (34 % contre 24 % en moyenne) et les emplois dans le secteur tertiaire (67 % versus 51 %) y sont assez nettement surreprésentés.
Les classes 5 et 6 des femmes, regroupant chacune 14 % d’entre elles, se rattachent au « modèle féminin familial ».
Plus précisément la place des indépendants dans ces 6 groupes : les indépendants hommes, et plus encore les femmes indépendantes sont moins exposés à la pénibilité que les salariés du privé ; ceci étant, ils sont présents dans chacun des groupes.
-
Exposés à la pénibilité
Pas exposés
Ensemble des
groupes
Groupe 3
Groupe 5
Groupe 4
Groupe 1
Groupe 2
Groupe 6
Indépendants
Hommes
10
22
12
18
18
18
17
Femmes
5
6
10
13
9
8
9
Salariés du privé
Hommes
70
63
62
55
70
47
59
Femmes
66
58
64
52
68
74
61
Salariés du public
Hommes
20
15
26
28
12
35
24
Femmes
29
37
26
35
23
17
29
Les artisans, commerçants connaissent une situation intermédiaire entre celles des cadres et des professions intermédiaire et celles des employés et des ouvriers :
-
Selon les différentes
CSP
Exposés à la pénibilité
Pas exposés
Ensemble des
groupes
Groupe 3
Groupe 5
Groupe 4
Groupe 1
Groupe 2
Groupe 6
Cadres
Hommes
3
2
8
16
20
71
17
Femmes
1
3
3
14
7
2
8
Profession intermédiaire
Hommes
12
15
24
21
21
18
20
Femmes
9
12
23
24
14
9
17
Artisan, commerçant
Hommes
6
15
8
9
13
3
9
Femmes
4
6
8
8
8
7
7
Employé
Hommes
15
3
20
13
14
3
13
Femmes
50
60
54
35
61
56
47
Ouvrier
Hommes
60
58
35
32
31
4
36
Femmes
28
17
6
9
9
25
15