2 267 dispositifs d’aides publiques aux entreprises et une évaluation plus que difficile.


"TRANSPARENCE ET ÉVALUATION DES AIDES PUBLIQUES AUX ENTREPRISES : UNE ATTENTE DÉMOCRATIQUE, UN GAGE D’EFFICACITÉ ÉCONOMIQUE", Sénat, juillet 2025

L’estimation, selon les organismes qui ont tenté d’évaluer les montants concernés, chiffre ces aides entre 205 et 223Md€ annuels.

 

Soutien à l’investissement, aide à l’apprentissage, crédit d’impôt recherche, tarifs réduits sur la taxe sur la valeur ajoutée, prêt garanti par l’État, exonérations de cotisations sociales…Plus de 2 200 dispositifs, relevant pour la plupart de la compétence de l’État, des organismes de sécurité sociale, des collectivités territoriales ou encore de l’Union européenne, sont aujourd’hui recensés.

⇒ Une évaluation du montant des aides par 3 organismes.

– Dans son rapport « Les politiques industrielles en France. Évolutions et comparaisons internationales » publié en novembre 2020, France Stratégie propose une estimation de l’ensemble des aides publiques aux entreprises pour l’année 2019, en retenant 4 périmètres concentriques. Cet exercice d’estimation conduit à un résultat pour 2019 compris entre 223Md€ pour le périmètre le plus large et 139Md€ pour le périmètre le plus restreint.

 

Le Centre lillois d’études et de recherches sociologiques et économiques (Clersé) a publié en mai 2022 son rapport « Un capitalisme sous perfusion. Mesures, théories et effets macroéconomiques des aides publiques aux entreprises françaises ». Il propose une évaluation conduisant à un montant annuel global de 205Md€, en adoptant un périmètre légèrement différent de celui de France Stratégie.

 

– Dans une note du 12 juillet 2023, l’institut Rexecode a confirmé la robustesse des travaux de France Stratégie et du Clersé.

 

L’évaluation conduit à chiffrer au profit des entreprises les dépenses fiscales entre 61 et 66Md€, les allégements de cotisations entre 55 et 64Md€, les dépenses budgétaires entre 32 et 45Md€, les participations financières à 11M€ et les dépenses dites fiscales déclassées entre 44 et 48Md€ pour atteindre un total de 205 à 223Md€.

⇒ Le site de référence www.aides-entreprises.fr, tenu par la Chambre des métiers et de l’artisanat France, dénombrait 2 267 aides publiques aux entreprises.

– Deux tiers des aides aux entreprises sont des subventions (1 697 aides), tandis que les avances remboursables sont 165, les prêts 111, les allègements fiscaux 96 et les autres aides (500).

– 64% des aides interviennent dans le domaine de l’économie au sens large, 11% dans le domaine du développement durable, 9% dans la culture, 7% pour le tourisme, 7% pour l’innovation, 2% pour l’international.

– 40% des aides sont financées par le bloc communal, les communes et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), notamment compétents pour les aides en matière d’investissement immobilier des entreprises, tandis que les régions (26%) et les départements (6%) puis l’Europe (7%) dont les aides sont trés contrôlées.

⇒ La commission d’enquête a chiffré le montant des aides publiques aux entreprises pour l’année 2023 à au moins 211Md€.

Ont été retenues les subventions de l’État, les aides versées par Bpifrance (41Md€), les dépenses fiscales et les dépenses fiscales « déclassées » (88 Md€) ainsi que les allègements de cotisations sociales (75Md€) et les subventions aux entreprises (7Md€). N’ont pas été retenues en revanche les compensations pour charge de service public.

 

Devraient être ajoutées à ce chiffrage, réalisé par la commission d’enquête à partir de données officielles, les aides versées aux entreprises par les régions (2Md€ par an selon Régions de France), les aides versées par le bloc communal, ainsi que les aides versées par l’Union européenne en gestion indirecte (y compris la PAC), dont le montant annuel est compris entre 9 et 10Md€ selon l’Inspection générale des finances, et les aides européennes en gestion directe, difficiles à estimer selon le Secrétariat général des affaires européennes.

 

L’absence de données statistiques a entravé les travaux de cette commission.

Il n’existe pas en droit interne de définition juridique transversale des aides publiques aux entreprises, ni de leur périmètre d’un point de vue économique. l’Insee ne dispose pas de données ventilées sur l’ensemble des aides publiques aux entreprises. En effet, les comptes de la Nation établis par l’Insee ne distinguent que deux lignes, les subventions sur la production et les aides à l’investissement.
Aucun tableau de bord ne permet de connaître le montant des aides publiques octroyées aux grandes entreprises, car les obligations de transparence en vigueur sont parcellaires, de portée limitée et peu opérationnelles. 

⇒ Par ailleurs, les grandes entreprises encaissent des aides publiques et licencient.

– Le groupe Auchan a annoncé mardi 4 novembre 2024 son intention de procéder à un PSE concernant 2 384 de ses 54 000 salariés employés en France, alors que le groupe a bénéficié entre 2013 et 2023 de 636M€ d’aides fiscales et de 1,3Md€ d’allègements de cotisations sociales.

– Le 5 novembre 2024, le groupe Michelin a annoncé la mise en place d’un PSE concernant 1 254 salariés parmi les 19 000 collaborateurs du groupe en France. Le groupe a bénéficié d’aides publiques, notamment 32,4M€ d’exonérations de cotisations sociales en 2023 et 40,4M€ de crédit d’impôt recherche (CIR) en 2024, tout en versant environ 1,4Md€ de dividendes la même année.

– Le groupe ArcelorMittal a annoncé le 23 avril 2025 son intention de mettre en place un PSE qui devrait concerner près de 600 salariés parmi les 15 400 employés en France. Le groupe a versé en moyenne 200M€ de dividendes chaque année depuis dix ans au niveau mondial, alors qu’il a bénéficié en 2023 en France de 298M€ d’aides, dont 195M€ en raison du prix de l’énergie, 41M€ d’allègements de cotisations sociales et 40M€ de CIR.

– Le 30 avril 2025, le fabricant de semi-conducteurs franco-italien STMicroelectronics, qui emploie 11 500 personnes en France, a annoncé un plan de départs volontaires sur trois ans concernant 1 000 postes, alors que l’entreprise a bénéficié en 2023 de 487 M€ d’aides (dont 334M€ de subventions, 119M€ de CIR et 34M€ de remboursements ou allègements de cotisations). En 2023, la société a versé 212M€ de dividendes.

– Le même jour, le groupe LVMH a fait part de son intention de supprimer 1 200 postes, en ne remplaçant pas les départs à la retraite notamment, dans sa filiale Moët Hennessy qui regroupe ses activités vins et spiritueux, soit plus de 12% de ses effectifs. En 2023, les aides publiques versées à ce groupe ont atteint 275M€, tandis que 20% de la valeur ajoutée du groupe en 2024 (37 Md€) ont été affectés aux dividendes en 2024.

 

La conditionnalité regroupe deux notions distinctes : les conditions d’éligibilité et les contreparties.
Les contreparties à l’octroi d’une aide peuvent être immédiatement exigées ou à l’issue d’un délai. Elles peuvent avoir un lien direct avec l’objet de l’aide (on parle alors de contrepartie intrinsèque), ou en être dépourvues (on qualifie alors la contrepartie d’extrinsèque).
La multiplication des PSE et des plans de départs volontaires a donné lieu à un débat nourri. 

 

Pour en savoir davantage : https://www.senat.fr/rap/r24-808-1/r24-808-1-syn.pdf