66% des Français affichent des fragilités, qui pèsent sur leur vie quotidienne.


"Dépasser la vision figée d’une fracture sociale : tous autonomes et fragiles à la fois", Credoc consommation et modes de vie N°310, février 2020

Méthodologie : l’enquête Conditions de vie et Aspirations des Français a été conduite entre décembre 2017 et janvier 2018. Elle intègre les critères sociodémographiques, mais aussi de nombreuses interrogations portant sur les conditions de vie, l’équipement du foyer ainsi que des variables d’opinions sur les valeurs ou les inquiétudes des Français.

3 000 personnes ont ainsi été interrogées en ligne. L’échantillon est constitué selon la méthode des quotas (région, taille d’agglomération, âge-sexe, PCS). Un redressement final est effectué pour assurer la représentativité par rapport à la population nationale (sexe, âge, catégorie socioprofessionnelle, taille d’agglomération, région.

 

L’enquête a détecté 6 groupes de personnes marquées par d’une ou plusieurs des fragilités observées; 15% font état d’au moins 3 fragilités souvent en corrélation.

 

“Dans une société qui valorise l’autonomie, la capacité à surmonter les obstacles et à être l’entrepreneur de sa vie, la ligne de partage souvent dressée entre, d’une part les individus maîtres de leurs destins et des publics dits « fragiles » semble donc très largement fantasmée. L’importance des situations de fragilité est d’autant plus notable qu’elle est vraisemblablement sous-estimée”.

 

66% des Français sont confrontés à au moins une fragilité :

*36% la santé (déclaration d’un handicap ou d’une maladie chronique et/ou sentiment d’être dans un moins bon état de santé que les gens de son âge),

*21% l’emploi (être au chômage et/ou temps partiel subi et/ou encore en emploi dans un contrat précaire) ,

*20% la pauvreté (niveau de vie inférieur à 60% du niveau de vie médian, et/ou perception d’un minima social, et/ou sentiment d’être défavorisé),

*19% le logement (le poids des dépenses de logement pèse une lourde charge dans le budget, et/ou habite dans un logement surpeuplé),

13% l’isolement (enquêtés qui indiquent qu’ils ne voient pas régulièrement des membres de leur famille et reçoivent du monde chez eux moins d’une fois par mois ,voire jamais),

11% la relégation territoriale (avoir « tout à fait » le sentiment de vivre dans un territoire délaissé par les pouvoirs publics).

 

L’estimation faite du nombre de personnes concernées est la suivante :

L’enquête montre que les six sources de fragilité étudiées sont souvent corrélées entre elles. 34% n’affichent qu’une fragilité, 18% deux, 10% trois, 5% quatre et plus vs 34% aucune. La relégation territoriale, en particulier, est corrélée à toutes les autres.

 

L’enquête permet d’identifier six groupes au sein de la population , en plus du tiers des Français épargné par les difficultés étudiées ici.

-2 catégories (23%) sont en prise avec essentiellement un seul type de fragilité :

*15% des Français, plus souvent des personnes de 70 ans ou plus ont des problèmes de santé, de handicap ou de maladie chronique,

*8% des Français, plus souvent des femmes et des jeunes, des classes moyennes inférieures, ont des difficultés professionnelles (chômage, sous-emploi ou emploi précaire).

 

Viennent ensuite deux groupes (20%) dont les membres cumulent systématiquement des difficultés dans plusieurs registres :
*8% des Français (plutôt des femmes, des jeunes, des personnes peu diplômées, locataires, célibataires) se distinguent avant tout par un faible niveau de vie combiné à d’autres obstacles,

*12% se caractérisent essentiellement par des difficultés de logement qui se cumulent avec d’autres (plutôt des habitants de grandes agglomérations, des locataires, des couples avec enfants, des chômeurs, des bas revenus, des femmes et des jeunes).

 

Enfin, les deux catégories le plus en difficulté (22%) mettent en évidence l’importance des interactions dans le processus de vulnérabilité. Les situations de ces personnes ont en commun la faiblesse du lien social ou de l’appui des pouvoirs publics :

*11% des Français se caractérisent par de nombreuses vulnérabilités dont le nœud semble être lié à l’isolement. En moyenne, ces individus affichent 2,2 facteurs de fragilité. Leur isolement relationnel s’entremêle à d’autres difficultés comme leur situation économique ainsi que des problèmes de logement ou d’emploi. Il s’agit un peu plus souvent de femmes, de célibataires, de personnes sans enfants,

* 11% également se caractérisent par une situation dont le sentiment de relégation territoriale est le marqueur le plus fort. Plus souvent que pour les autres catégories de population, cette forme de fragilité se cumule à d’autres comme la pauvreté, la santé ou encore le logement. En moyenne, ces individus affichent 2,5 facteurs de fragilité. Par rapport à la moyenne des Français, les personnes en situation de relégation ont un niveau de diplôme plus bas, sont plus souvent au chômage, ont des difficultés à boucler leurs fins de mois. Elles résident un peu plus souvent dans les zones rurales (30% contre 23% en moyenne). Ces deux types de vulnérabilité peuvent permettre d’en repérer d’autres et posent la question des interactions avec l’entourage (familial, amical, professionnel, etc.), et de la présence des biens et services de proximité de différents ordres (accès aux transports, santé, commerces, soins, etc.).

 

pour en savoir davantage : https://www.credoc.fr/publications/depasser-la-vision-figee-dune-fracture-sociale-tous-autonomes-et-fragiles-a-la-fois