Méthodologie : les données Ficus (1994-2007), Fare (2008-2022) et Lifi de l’Insee ont été mobilisées. Les variables relatives au total du bilan et au chiffre d’affaires, utilisées par l’Insee pour définir la taille d’une entreprise au sens de la loi de modernisation de l’économie (LME), ne sont pas considérées. Les différences de champ avec les publications Insee, expliquent l’écart (en 2022, 3,9 millions de salariés ETP employés par 6 800 ETI).
La forte progression favorable aux ETI en nombre d’entreprises et en effectif doit être relativisée du fait qu’une forte proportion de PME a accédé au statut d’ETI, notamment par le rachat d’entités plus petites, ou été intégrées dans une ETI existante.
La comparaison au sein de l’UE ne peut se faire, Eurostat n’ayant toujours pas adopté cette classification ; les ETI sont le plus souvent regroupées avec les grandes entreprises. Toutefois, selon les données de l’OCDE, la France comptait en 2020, 4 882 entreprises de plus de 250 salariés, contre 10 861 en Allemagne, 6 530 au Royaume-Uni (en 2018), 3 572 en Espagne et 3 647 en Italie.
⇒ Leur nombre et leur évolution selon la taille de leurs effectifs.
♦ Le nombre d’ETI (selon la définition de la loi LME) a connu une progression de 57% entre 1994 et 2022. passant de 2 777 unités en 1994 à 4 363 en 2022, tandis que les grandes entreprises ont enregistré une augmentation encore plus marquée de 69%, passant de 118 unités en 1994 à 199 en 2022, alors que la croissance des PME est restée limitée à 7,6% (de 119 980 à 129 065).
Cette dynamique a été profondément enrayée par la crise de 2008, le nombre d’ETI ne retrouvant son niveau de 2007 qu’en 2020.
♦ Les ETI se distinguent par une forte progression de leurs effectifs, qui passent de 2,17 millions de salariés en 1994 à 3,44 millions en 2022 (+ 59%), tandis que dans les grandes entreprises, les effectifs progressaient de 28,7% (de 3,03 millions à 3,9 millions). L’évolution des PME apparaît plus modérée, avec une hausse de 9,2% (de 3,69 millions à 4,03 millions).
En 1994, les PME représentaient 41,5% de l’emploi total dans les entreprises de plus de 10 salariés vs 35,4% en 2022 ; les ETI ont connu une dynamique inverse passant de 24,4 à 30,2%, les grandes entreprises conservant une part stable autour de 34%.
♦ Leur part dans la valeur ajoutée a progressé de 25,5% à 32,3% sur la période, quand celle des PME diminuait de 35 à 29%, tandis que celle des PME diminuait de 34 à 29,4%.
♦ Les ETI se distinguent aussi des PME et des grandes entreprises par une croissance légèrement supérieure de la productivité et de l’intensité capitalistique.
Entre 1994 et 2022, leur productivité a augmenté de 38%, passant de 58 450€ à 80 760€ par salarié (avec un taux de croissance annuel moyen de 1,16%), vs pour les grandes entreprises + 23,6%, atteignant 97 790€ contre 79 090€ en 1994 (soit un taux de croissance annuel moyen de 0,76%). À l’inverse, l’écart s’est creusé avec les PME, dont la progression a été relativement modeste (+24,4%), passant de 49 890€ à 62 060€ par salarié, soit une croissance annuelle moyenne de 0,78%. La productivité apparente du travail a été plus dynamique dans les ETI, avec une hausse de +1,1% par an, contre 0,8% pour les grandes entreprises et les PME.
L’intensité capitalistique, c’est-à-dire l’investissement en capital par salarié, suit une dynamique similaire. Les ETI et les grandes entreprises affichent une croissance quasi identique à hauteur de 307,8% pour les ETI, qui passent de 56 550€ à 230 600€, soit un taux de croissance annuel moyen de 5,15% et de 300% pour les grandes entreprises qui passent de 86 000€ à 344 410€, soit un taux de croissance annuel moyen de 5,08%. Les PME enregistrent également une forte croissance de moindre, à 258,2% (passant de 27 320€ par salarié à 97 860€), soit un taux de croissance annuel moyen de 4,66%.
⇒ En l’espace de 30 ans, l’industrie française a connu une profonde transformation marquée par un recul du nombre des PME et par une concentration croissante autour des ETI.
♦ Entre 1994 et 2022, le nombre de PME industrielles a chuté de 33%, passant d’environ 33 000 à 22 000 unités. En revanche, les ETI sont restées relativement stables (+1,1%, de 1 261 à 1 275 unités). À l’opposé, le nombre de grandes entreprises a progressé de 29% (passant de 38 à 49 unités).
Ces évolutions trouvent leur reflet dans l’emploi salarié : les PME ont vu leurs effectifs diminuer de 33% (passant de 1,2 million à 0,8 million de salariés), tandis que les ETI ont connu une croissance modérée (malgré la captation d’emploi provenant de PME), atteignant 1,05 million de salariés en 2022. Les ETI, qui comptaient pour 34% de l’emploi industriel en 1994 sont passées à 41,5% des effectifs industriels.
Malgré un nombre en hausse, les grandes entreprises ont vu leurs effectifs reculer de 7%, pour s’établir à 650 000 salariés.
♦ Les PME représentaient environ 40% de l’emploi industriel. Leur poids n’a cessé de diminuer pour frôler la barre des 30% en 2022. Les effectifs des PME sont passés de 1,2 million à environ 0,7 million (une chute de 42%).
La désindustrialisation ne s’est toutefois pas déroulée de manière linéaire. Pour les ETI, on peut distinguer 5 phases. Entre 1994 et 1998, leur nombre reste stable, autour de 1 250 unités. Une période de croissance s’amorce entre 1998 et 2001, avec une augmentation de 17% (de 1 256 à 1 470 unités). Cette dynamique s’inverse entre 2001 et 2011, où le nombre d’ETI industrielles chute notamment sous l’effet de la crise de 2008. Il se stabilise entre 2011 et 2020 puis une reprise s’enclenche à partir de 2021, qui permet aux ETI de retrouver en 2022 un niveau comparable à celui de 1994 (soit 1 230 entreprises et près de un million d’emplois).
Les PME suivent une trajectoire sensiblement différente : après une légère croissance entre 1994 et 1998, leur déclin se poursuit de manière quasi ininterrompue jusqu’en 2020, accentué par la crise de 2008. Ces 30 dernières années les PME industrielles ont subi un déclin continu, avec une chute d’un tiers de leur nombre et de leurs effectifs.
Les grandes entreprises ont connu une évolution plus irrégulière, alternant phases de croissance et de décroissance tout au long de la période étudiée.
⇒ Les ETI dans les services.
♦ Contrairement à l’industrie, le secteur des services s’est largement développé au cours des dernières décennies, avec une augmentation continue du nombre d’entreprises et de leurs effectifs salariés. Entre 1994 et 2022, cette expansion a concerné aussi bien les PME, les ETI que les grandes entreprises.
Les ETI ont enregistré la plus forte progression, avec une augmentation de 108% de leur nombre (de 1 356 à 2 824 unités), alors que les grandes entreprises ont presque doublé (passant d’environ 70 à 130 unités).
Les PME ont également suivi une trajectoire ascendante, bien que plus modérée, avec une croissance de 25% (passant de 67 000 à 84 000 unités).
♦ Entre 1994 et 2022, le nombre de salariés dans les ETI du secteur des services a doublé, atteignant 2,2 millions, tandis que les grandes entreprises y progressaient de 44% et les PME de 18%. Le poids des ETI a progressé de 7,7 points dans l’emploi serviciel et de 6,2 points dans la valeur ajoutée des services. Cette croissance est particulièrement marquée pour les secteurs Informatique et communication, commerce/réparation automobile et services aux entreprises. À l’inverse, les PME ont perdu 5,1 points dans l’emploi et 7,1 points dans la valeur ajoutée du secteur. Les grandes entreprises ont connu une évolution contrastée : leur contribution à la valeur ajoutée des services a légèrement progressé (+0,9 point), mais leur poids dans l’emploi a reculé (-2,6 points).
⇒ ETI, et unités légales.
♦ L’approche par unités légales conduit à une réévaluation : selon les années, elle enregistre entre 25 000 et 50 000 PME supplémentaires, 700 à 1 200 ETI et 45 à 85 grandes entreprises. La répartition des agrégats économiques (valeur ajoutée, emploi, etc.) par taille d’entreprise s’en trouve modifiée.
Par exemple, la part des ETI dans l’emploi, qui progresse dans l’approche LME, apparaît relativement stable autour de 30% lorsqu’elle est évaluée en unités légales. De même, la part des PME dans l’emploi, en diminution selon l’approche LME, demeure stable dans l’approche unités légales entre 1994 et 2022. En revanche, la part des ETI dans la valeur ajoutée augmente quelle que soit l’approche retenue.
Pour les grandes entreprises, la différence est particulièrement marquée : leur part dans l’emploi total s’établit à 34% dans l’approche LME, mais chute entre 15 et 18% selon les années lorsqu’elle est évaluée en unités légales.
♦ Dans l’industrie, la répartition des effectifs entre PME et ETI au sens d’unités légales est restée globalement stable sur la période 1994-2022, s’établissant en moyenne à 48% pour les premières et à 40% pour les secondes. Bien que le volume total d’emplois industriels diminue, la structure relative de l’emploi entre PME et ETI demeure inchangée, ce qui traduit une contraction homogène du secteur. L’approche LME donne une lecture différente : la part des PME dans l’emploi industriel recule tandis que celle des ETI progresse.
⇒ La transition des PME vers le statut d’ETI est le principal moteur du renouvellement des ETI.
Trois sources principales d’entrée dans la classe des ETI :
– Les entreprises qui apparaissent dans la catégorie des ETI sans transition depuis une autre classe, par création ex nihilo ou par fusion,
– Les PME qui franchissent le seuil des ETI, généralement par croissance interne ou externe,
– Les grandes entreprises qui sont « déclassées » en ETI, généralement à la suite d’une restructuration ou d’une réduction d’effectifs.
32% des ETI recensées en 2022 avaient un statut différent 5 ans plus tôt. Parmi elles, 6% étaient des TPE en 2017, 23% des PME (dont 20% d’entreprises de plus de 50 salariés et 3% de moins de 50 salariés) et 3% des ETI des créations ex nihilo entre 2017 et 2022.
Il semblerait qu’avant 2007, les TPE et les créations ex-nihilo étaient plus nombreuses qu’en 2022 et les PME d’un même ordre grandeur.
⇒ La pérennité des ETI nouvellement créées :
Prenons l’exemple des 232 entreprises qui ont accédé pour la 1ére fois au statut d’ETI en 2012. 4 ans plus tard, les 2/3 ont conservé ce statut. Après dix ans, cette proportion tombe à 41%, montrant qu’une partie de ces entreprises ne parviennent pas à maintenir leur croissance sur le long terme.
Parmi celles qui ont perdu leur statut d’ETI, 22% sont redevenues des PME, tandis que 4% ont régressé au statut de TPE. 10% ont cessé leur activité, 18 % ont disparu des bases de données sans que leur statut ultérieur soit connu, 3% se sont engagées dans une procédure de défaillance (redressement ou liquidation judiciaire) et 2% dans une procédure de sauvegarde.
Pour en savoir davantage : https://www.strategie.gouv.fr/files/2025-04/EditoCB-NA152-ETI-21avril20h.pdf