La psychologie du dirigeant est un actif clé à préserver pour le rebond de l’entreprise.


"La psychologie des dirigeants lors des situations de crise ; enjeux, constats, bonnes pratiques", ARE, décembre 2022

Constituée en 2002, l’Association pour le Retournement des Entreprises (ARE) regroupe l’ensemble des professionnels (avocats, auditeurs, conseils, administrateurs judiciaires, banquiers, fonds d’investissement, managers de crise, communicants, etc.) régulièrement impliqués dans les opérations de retournement, de refinancement ou de restructuration. Unique en France par son caractère pluridisciplinaire, l’ARE réunit plus de 270 membres.

 

Méthodologie : une enquête qualitative en 2022 à partir d’un questionnaire à questions ouvertes pour obtenir des réponses les plus spontanées possibles en auditionnant :
-50 dirigeants d’entreprises de toutes tailles (PME, ETI, grands groupes) et de tous les secteurs d’activité : dirigeants de groupes familiaux, dirigeants fondateurs, dirigeants devant rendre compte à des actionnaires ; certains ayant réussi à relever l’entreprise, d’autres étant encore en cours de redressement ,
-des associations (Observatoire AMAROK, APESA, 60 000 Rebonds) spécialisées dans l’accompagnement psychologique du dirigeant d’une entreprise en difficulté,
• des présidents de tribunaux de commerce,, présidents de chambre au sein des tribunaux de commerce ainsi que des greffiers,
• des praticiens du conseil en restructuring : administrateurs judiciaires, avocats, managers de transition ou de crise, auditeurs, investisseurs, communicants.

 

Le dirigeant fait quasi-systématiquement passer son entreprise avant lui-même et sa propre santé.

 

Les chefs d’entreprise travaillent en moyenne 55 heures par semaine, contre 45 pour les cadres et 39 pour les salariés, ce qui nuit à leur équilibre vie professionnelle/ vie privée ; ils  connaissent des problèmes de sommeil et font de leur sommeil une variable d’ajustement ; ils  considèrent souvent qu’ils n’ont « pas le temps », voire « pas le droit » d’être malade. Ils engagent pour la plupart leur patrimoine personnel, ce qui peut être une source extrême d’anxiété. 

 

Il en résulte que le dirigeant fait quasi-systématiquement passer son entreprise avant lui-même et sa propre santé : il entretient un rapport existentiel avec son entreprise, qu’il considère comme « son bébé ».
Or, force est de constater que la santé du dirigeant est un véritable « capital immatériel » pour l’entreprise, ce qui est d’autant plus vrai lorsque l’entreprise est de petite taille. Il faut donc que les dirigeants parviennent à prendre de la distance avec leur entreprise, afin de la considérer comme un outil de travail, et ne plus la faire passer avant leur propre santé.

 

Le ressenti des dirigeants au cours d’une procédure de prévention des difficultés ou de procédure collective.

♦ Vis-à-vis des tribunaux et des juges :

-Se sentir dépossédé de son entreprise, perdre le contrôle, et être confronté à l’inconnu.
-Être « sur le banc des accusés » ; être catalogué (comme « un nul », « un looser », « un voyou », être contagieux).
-Se sentir « petit » face aux juges, en raison de la configuration des salles et de la mise en scène (dirigeant debout face au tribunal surélevé).
-Devoir se justifier en permanence.
-Sentiment « d’injustice ».

 

♦ Vis-à-vis des conseils :
-Incompréhension face au « jargon » utilisé et à la technicité froide de certains.
-Sentiment de ne pas être suffisamment préparé à ce qui les attend.
-Sentiment que les protagonistes du dossier se connaissent tous et d’être exclu de leur monde.
-Sentiment de ne plus être accompagné dans l’après-crise.

 

♦ Vis-à-vis de son écosystème et de soi-même :
-Crainte de perdre une partie, voire la totalité de son patrimoine.
-Menaces de certains créanciers.
-Appréhension de la réaction des salariés (entre agressivité et effondrement humain).
-Sentiment d’être « étouffé » par les frais bancaires.
-Crainte pour sa vie familiale et conjugale.
-Incertitude, solitude, sentiment de déprime, parfois jusqu’aux pensées suicidaires.

 

Le rapport propose ensuite une succession de recommandations aux dirigeants concernés, aux conseillers experts en direction ce type de problème, au monde judiciaire, d’autant que tous considèrent primordial le rôle des juges. 

 

Pour en savoir davantage : ARE-Livre-blanc-Psychologie-des-dirigeants-VF.pdf