Le travail dissimulé toucherait de l’ordre de 4,4% des personnes en emploi.


"Le Travail Dissimulé en France", Insee, Economie et Statistiques N°526-527, lu octobre 2021

Méthodologie : Plusieurs enquêtes sont utilisées :

L’EPMF, collectée conjointement avec l’enquête Conditions de Vie et Aspirations du Crédoc, a été réalisée en face‑à‑face en juin 2015 auprès de 2 004 personnes de 18 ans et plus vivant en France métropolitaine. Elle fournit des informations sur les décisions de travail dissimulé en 2015 au cours du mois précédant l’enquête et sur la période 2012‑2015, sur les comportements d’embauche des ménages dans le domaine des services à la personne, et sur les intentions de sous‑déclaration des revenus liées au niveau perçu des prélèvements obligatoires.

Concernant l’Eurobaromètre pour la France, la représentativité est un peu moins bonne du fait de la petite taille de l’échantillon. Il permet une comparaison européenne.

 

Un article de type académique, dont le thème est plutôt rare pour tenter de chiffrer la réalité du travail dissimulé.

 

⇒ 4 chiffrages différents :

♦ Parmi les 2004 individus interrogés dans l’EPMF 2015, 3,8% déclarent avoir travaillé de façon dissimulée le mois précédant l’enquête. Une autre enquête de l’EPMF au cours de la période 2012‑2015 conduisait à un taux de 8,8%. 

 

♦ Avec l’Eurobaromètre, le travail dissimulé est mesuré sur les 12 derniers mois. Le taux est de 4,4%

 

♦ L’Insee calcule la valeur ajoutée dissimulée, telle qu’identifiée par les contrôles et corrigée par la probabilité de contrôle ; la part de la VA dissimulée assimilable à du travail dissimulé se situe entre 3.2 et 3.7% de la masse salariale totale reçue par les ménages.

 

L’Acoss chiffre par ailleurs le manque à gagner de cotisations entre 1,5 et 1,9%.

⇒ Le profil des “fraudeurs”

Pour autant, on n’observe pas de profil démographique fort, excepté la variable « femme mariée avec enfant(s) », moins concerné par le travail dissimulé, ce qui s’explique intuitivement par une participation moins forte au marché du travail en général.

 

Par contre on constate une propension au travail dissimulé chez les hommes seuls, mais moins forte chez les plus de 40 ans.

Les personnes aux revenus inférieurs à 2 300€ par mois semblent plus susceptibles d’avoir recours au travail dissimulé, qui constitue d’ailleurs majoritairement une activité d’appoint.

⇒ Les raisons du recours au travail dissimulé

Dans la majorité des cas, les personnes qui effectuent du travail dissimulé occupent un emploi (déclaré) à temps complet : 78% des individus travaillent au moins 35 heures par semaine. La très grande majorité indiquent la nécessité d’arrondir les fins de mois comme motif principal,  en cumulant avec le motif proche “être mieux payé”, on atteint entre 50 et 60% des réponses pour tous les cas. Vient ensuite le manque d’emploi régulier, qui représente de 15 à 20% des réponses. Puis rendre service à la famille et aux amis; ensuite à la fois, ne pas déclarer au fisc, conserver ses droits et prestations sociales et éviter des démarches administratives ; très peu, être son propre patron.

 

Les enquêtés qui n’ont pas effectué de travail non déclaré citent plus souvent le motif d’échapper au fisc tandis que les autres invoquent d’autres motifs financiers (être mieux payé) ou personnels (rendre service à un proche) plutôt que la fraude.

 

L’influence de facteurs subjectifs (perception de l’entourage, des risques et sanctions, et acceptabilité) : le travail dissimulé est corrélé avec le degré d’acceptabilité de ce comportement, la faiblesse du risque perçu, la faiblesse de la sanction perçue, et la perception que les prélèvements obligatoires sont trop élevés.

⇒ Les ménages utilisateurs

Un chiffrage de la proportion de ménages ayant recours à des Services à la Personne (11,8%, soit 237 observations) et de ceux faisant appel à des SAP non déclarés (1,8%) en 2015. Ces chiffres concernent 3 catégories principales de services : le ménage, la garde d’enfant et l’aide à domicile. Ils représentent un taux d’embauches non déclarées d’environ 15%. Mais du fait de la petite taille de l’échantillon, l’intervalle de confiance à 95 % est large (10.6 %‑19.8 %).

⇒ Une comparaison avec d’autres pays de l’UE

La moyenne des pays du groupe de comparaison est très similaire : 4.8%. Les comportements de fraude en France ne sont pas significativement différents de la moyenne européenne

Le Danemark, la Suède et l’Espagne ont nettement plus recours au travail dissimulé, mais ce sont des pays où les ménages sont les plus utilisateurs de ce type de travail.

L’Allemagne, la Grande-Bretagne et la Finlande y ont un peu moins recours que la France, en lien avec une population peu utilisatrice (au même niveau que la France).

Noter qu’en Italie et Grèce, le recours au travail dissimulé serait faible ; la qualité des statistiques fournies sont-elles significatives ?

 

Pour en savoir davantage : https://www.insee.fr/fr/statistiques/5432539,  pages 71-89