Les services à la personne : 3,6 millions de ménages y ont recours ; 1,7 million de personnes y travaillent


« Services à la personne : bilan économique et enjeux de croissance », Oliver Wyman , lu juin 2012

 Une étude particulièrement documentée avec une bibliographie abondante

 

La loi du 26 Juillet 2005 définit les services à la personne comme l’ensemble des activités visant le bien-être des individus à leur domicile. Ils représentent vingt-et-un métiers, rassemblés en trois segments : les aides à la famille, les services de la vie quotidienne, les services aux personnes dépendantes. La convention collective ajoute à cet ensemble, les services aux salariés sur leur lieu de travail (conciergeries d’entreprise, intermédiation de services à la personne, livraison de courses, etc.), alors qu’une définition économique du secteur y inclurait encore d’autres services rendus à domicile tels la coiffure à domicile.

 

Le secteur des services à la personne représentait 1,1 % du PIB en 2011, soit 17,3 milliards d’euros et près de 900 millions d’heures prestées. L’assistance aux personnes âgées ou dépendantes et le ménage/repassage représentent l’essentiel de l’activité, avec près de 84 % des heures travaillées et 90 % de la valeur ajoutée.

 

Depuis le plan Borloo, ce marché connaît une forte croissance, en moyenne de 6 % par an alors que la valeur ajoutée de l’ensemble de l’économie atteint seulement 2 %. Le nombre d’utilisateurs a cru de 54 % en 6 ans, pour concerner 13 % des foyers français. L’augmentation de la consommation horaire par utilisateur a également été l’un des moteurs essentiels de cette dynamique. Au regard des niveaux atteints par des pays tels que le Royaume-Uni et les Pays-Bas où les services à la personne représentent respectivement 2 % et 3 % du PIB contre 1,1% en France, le secteur disposerait donc d’un important réservoir additionnel de croissance.

 

Plus de 3,6 millions de ménages français ont recours chaque année aux services à la personne (2,5 millions en 2005).

-Ce sont avant tout des personnes âgées : 53 % ont plus de 65 ans, dont 39%, 75 ans et plus ; 18% ont moins de 45 ans et 29% entre 45 et 64 ans.

-30% ont un revenu inférieur à 1 500€, 27% entre 1 500 et 3 000€, 25% entre 3 et 5 000 et 19% plus de 5 000€.

-56% sont encore actifs et par ailleurs 64% des ménages utilisateurs sont en  couple.

 

Selon la Cour des Comptes, le coût annuel du maintien à domicile en 2010 serait de l’ordre de 12 032€ et celui du placement en établissement de 34 155€.

La garde d’un enfant de moins de 3 ans est un coût moyen mensuel en € de :

 

Garde à domicile

Crèche

Garde domicile partagée

Assistante maternelle

Coût moyen mensuel en €

2 368

1 257

1 229

904

% aide état

50

19

30

25

Nombre enfants concernés

14 000

385 000

21 000

630 000

 Plus de 1,7 millions de personnes travaillent dans ce secteur dont le poids budgétaire dépasse les 17 milliards d’euros en France. Pourtant ces services sont encore le plus souvent réalisés « au noir » (estimation de 30% en 2010, mais de 40% en 2005) et demeurent mal connus.

 

Pour augmenter le nombre d’heures réalisées, les salariés multiplient le nombre d’employeurs ou de services proposés :

– 1,4 organisme agréé de services à la personne, en moyenne par employé

– 28% des salariés d’organismes sont également salariés d’un particulier employeur

– 35% des salariés exercent au moins deux types de services à la personne et 6% travaillent également dans d’autres structures collectives.

 

En outre, la pluriactivité varie selon les métiers : 12% pour les gardes d’enfants contre 30% pour les aides à domicile et 40% pour les autres emplois. Cette structuration atypique multi-employeurs satisfait 70% des salariés qui indiquent apprécier la diversité et la sécurité qui l’accompagne.

Les salariés du secteur sont tout à fait satisfaits que leur travail soit apprécié des personnes auprès de qui ils travaillent (82%), parce qu’ils sont motivés par ce travail (73%), parce qu’ils mettent en œuvre leurs compétences (63%) ; ils le sont moins au regard de leurs proches quant à la valorisation de leur activité (44%) et quant à leur avenir professionnel (36%).  

 

Le secteur est atomisé avec plus de 27 000 entreprises et associations agréées auprès de l’Agence nationale de services à la personne. La rentabilité des divers acteurs s’avère trop souvent précaire, compromettant ainsi leur capacité d’investissement et de développement. Le plus grand risque est pourtant l’instabilité réglementaire, voire la remise en cause du dispositif fiscal, sans lequel les entreprises ne pourront perdurer.

 

En 2010, moins de vingt réseaux réalisaient plus de 10M€ de chiffre d’affaires. Les entreprises de services à la personne sont pour 80% des PME ou TPE, qui réalisent des marges modérées, de l’ordre de 2% du chiffre d’affaires. L’effectif moyen de ces PME et TPE est de 1,4 salarié. Les entreprises généralistes sont les plus dynamiques, tant sur le plan de la croissance du chiffre d’affaires, qu’en termes d’excédent brut d’exploitation ; à l’inverse, les spécialistes de la dépendance et des travaux ménagers ont une progression plus lente.

 

La structuration du secteur s’est essentiellement faite par le biais des entreprises, dont le nombre a cru de 52% par an en moyenne entre 2005 et 2010, grâce au développement de la franchise et du statut d’auto entrepreneur.

 

Un déficit d’image Alors que 84  des Français estiment que les services à la personne « jouent un rôle important dans la vie des familles », les SAP souffrent d’un déficit d’image tant du point de vue des clients/bénéficiaires des services que des salariés. Côté client/bénéficiaires des services, plusieurs freins limitent le développement du secteur  (l’idée de payer ce « que l’on fait habituellement soi-même », le manque de confiance envers les prestataires liés au fait que le service ait lieu au domicile, la méconnaissance des garanties de qualité existantes,  la couverture incomplète des besoins).

Côté salariés, le marché est associé à des emplois précaires et faiblement rémunérés. Pourtant, la rémunération moyenne s’élève à 9,6 € net de l’heure (33% de plus que le SMIC).

 

Le développement des services à la personne a été fortement soutenu par l’Etat depuis le début des années 2000 ; le dispositif de soutien public – constitué essentiellement d’allègements de cotisations sociales et patronales – a été multiplié par plus de 2,2 entre 2003 et 2010, pour atteindre près de 6,3Md€. L’état apporte en moyenne par équivalent temps plein, entre 2009 et 2011, 11 500€ (réduction d’impôt pour le bénéficiaire et exonération de cotisations sociales).

 

Néanmoins, ce coût est très largement compensé par les bénéfices directs et indirects générés : les gains immédiats en cotisations sociales (4,8 Md€), en TVA et fiscalité directe (70 M€) et en baisse des allocations chômage ou du RSA (181 M€). A cela s’ajoutent des coûts évités pour l’état (3,9 Md) dont 2,8Md€ en ce qui concerne les infrastructures pour personnes dépendantes, 360 M€ en évitant le redoublement des enfants en difficulté scolaire et 675M€ de revenus générés par la hausse du taux d’activité féminin ; ce qui conduit à un bilan bénéficiaire de plus de 2,6Md€. Ajoutons à cela le fait que les services à la personne remplissent une fonction sociale essentielle sur le marché de l’emploi en favorisant l’insertion professionnelle de populations fragiles : les salariés travaillant dans ce secteur sont à 91% des femmes, 82% des non bacheliers, la moitié ont plus de 50 ans ; enfin prés de 40% étaient inactives ou à la recherche d’un emploi.