Ces mutations proviennent du statut de la microentreprise, beaucoup plus souple au point de constater qu’environ 1/3 des immatriculés ne feront jamais de recettes.
♦ L’impact de la microentreprise dans le flux de créations d’entreprise.
En 2023, 63,5% des entreprises créées en France étaient des micro-entreprises (principal moteur de la hausse du nombre des créations d’entreprise). Ce dispositif a été particulièrement bénéfique aux populations sous-représentées dans la création d’entreprise, tels que les chômeurs, les femmes, les jeunes et les travailleurs précaires, leur offrant une opportunité d’insertion économique et une réponse à une envie d’entreprendre croissante. L’évolution des mentalités a par ailleurs joué un rôle déterminant dans la démocratisation de l’entrepreneuriat. Aujourd’hui, une majorité de personnes vivant en France quels que soient leur profil socio professionnel ou leur lieu d’habitation, perçoivent l’entrepreneuriat comme un choix de carrière attractif, une alternative, principale ou complémentaire, au salariat, permettant une plus grande liberté et répondant à une aspiration croissante d’autonomie et de métier passion ».
En termes de nombre d’emplois, la dynamique de création d’entreprise est plus forte entre 2012 et 2022, avec une hausse de 85% de l’emploi non salarié (en excluant les micro-entrepreneurs inactifs), contre + 9,5% d’emplois salariés.
♦ Les mutations quant au profil des créateur(trice)s.
La féminisation de la création d’entreprises est particulièrement présente chez les micro-entrepreneurs où près de 44% sont des femmes, vs 30% pour les entreprises individuelles autres et 25% en société. Ces 2 derniers chiffres, progressent peu, voire diminuent, puisqu’en 2014, 38% des entreprises individuelles et 22% seulement des sociétés ont été créées par des femmes. 80% des créatrices d’entreprise se lancent aujourd’hui sous le régime de la microentreprise.
38% des micro-entrepreneurs ont moins de 30 ans, vs 32 et 14 pour les autres types d’entreprise.
Concernant le statut socio-professionnel lors de la création, 33% des créateurs d’entreprise étaient au chômage ou sans activité en 2022 (47% pour les micro-entrepreneurs).
En 2022, 11% des créateurs d’entreprise n’avaient aucun diplôme certifiant, 15% un CAP/BEP, 22% un bac ou un diplôme équivalent et 48% un diplôme de l’enseignement supérieur.
Par ailleurs, quatre créateurs sur dix n’ont aucune expérience dans le secteur d’activité de leur entreprise, contre seulement deux sur dix en 2018. De plus, 80% créent une entreprise pour la première fois.
Autrefois concentrés dans les grandes agglomérations telles que Paris, Lyon et Marseille, les créateurs viennent désormais de zones plus éloignées, moins denses ou fragilisées. Ainsi, en 2023, plus de 120 000 entreprises ont été créées en ZRR, dont 63% sous le régime de la micro-entreprise (moyenne générale). En Quartiers Prioritaires de la politique de la Ville (QPV), en 2021, ce sont 86 000 créations dont 75% de micro-entrepreneurs.
Les apports financiers au démarrage : en 2022, 81,5% des microentreprises ont réuni moins de 2 000€ pour démarrer leur activité (vs 73 les autres entreprises individuelles et 27 les sociétés). 39% des sociétés ont nécessité un investissement de plus de 16 000€ (vs 2 les microentreprises et 10 les entreprises individuelles autres).
Rappel du profil des créateurs financés par l’Adie en 2023 : 44% de femmes, 30% de moins de 30 ans, 19% de sans diplôme, 52% sous le seuil de pauvreté, 21% en QPV et 16% en ZRR.
♦ “La création d’entreprise en général a été fortement soutenue par les politiques publiques ces dernières années, afin de répondre aussi aux besoins de populations plus spécifiques et fragilisées…Les mentalités vis-à-vis de l’entrepreneuriat en France ont elles aussi beaucoup évolué.”
Si la démocratisation est réelle, elle semble encore inachevée et des obstacles persistent :
– Pour les jeunes, les personnes en situation de handicap, les habitants des territoires fragiles et les femmes, notamment pour l’accès au financement.
– Dans les QPV, le passage à l’acte est moindre que dans le reste de la France.
Les impacts économiques et territoriaux des entreprises financées par l’Adie sont les suivants :
– 80% des entreprises financées sont toujours actives 2 à 3 ans plus tard,
– 10% des entreprises encore en activité ont crée des emplois salariés,
– 3 entrepreneurs sur 10 déclarent que le lancement de leur activité leur a permis de rester vivre sur le territoire où ils habitent.
♦ Les résultats de l’Adie :
– Selon la dernière étude d’impact de l’Adie le taux d’insertion est de plus de 90%, 2 à 3 années après, soit via la création d’entreprise, ou la reprise d’un emploi salarié.
-Toujours selon cette étude d’impact, l’entrepreneuriat renforce l’acquisition de compétences (83%), une meilleure estime de soi (77%), une meilleure qualité de vie (71%), une meilleure intégration dans la société (64%).
D’autres études et données statistiques soulignent toutefois des fragilités au regard des revenus, et des droits sociaux individuels. Ces éléments alimentent les critiques notamment à l’encontre de la microentreprise, dont les taux de pérennité sont plus faibles ; il sont alors perçus comme vecteur de précarisation.
Rappel des taux de pérennité entre 2018 et 2021 (derniers chiffres connus) :
32% des microentrepreneurs immatriculés sont encore actifs 3 ans après leur création ; ce calcul prend en compte le fait que 31% n’ont jamais démarré d’activité (39 en Ile de France du fait du recours envisagé aux plateformes, vs 27 en province). Il est plus juste pour comparer les microentreprises de ne prendre en compte que les microentreprises économiquement actives, ce qui conduit à un taux de pérennité de 46% à comparer aux 82% pour les autres créations (84% les sociétés et 75 les autres entreprises individuelles) .
Pour ces autres créations à 3 ans, 39% emploient au moins un salarié en plus du chef d’entreprise.
Source : l’’échantillon global de l’enquête Sine compte 40 000 entreprises, 24 000 sont le fait de créations classiques et 16 000 de microentrepreneurs.
Ce qui conduit les microentrepreneurs à un taux de pérennité élevé :
– Le fait d’exercer à titre principal et donc ne tirer des rémunérations que de cette seule source,
– La connaissance du secteur d’activité,
– L’aide au démarrage (la moitié dit en avoir bénéficié, notamment l’Accre ou l’Arce)
– L’âge du créateur : 22% des moins de 30 ans encore actifs en 2018 vs 42% pour les 50 ans et plus ; noter que seulement 61% des moins de 30 ans démarrent leur activité vs 78% les 50 ans et plus.
– Le fait des femmes (notamment dans la santé) : 50% sont pérennes à 3 ans vs 44% les hommes ; elles démarrent plus souvent leur activité (76%) que les hommes (66%).
Ce complément proposé en plus de cette étude permet de compléter l’interrogation : le statut récent de l’autoentrepreneur permet à nombre de personnes d’envisager une activité indépendante, souvent à temps partiel, mais fort peu lucrative au point d’être insuffisante en cas d’activité principale, idem en termes de protection sociale ; il permet à des personnes, souvent en difficulté d’intégration dans le monde du travail, de tenter de le faire, ce qui est heureux, qui plus est quand l’Adie accompagne de façon appropriée. Doit-on pour autant considérer qu’il y a là création d’entreprise au sens de concourir à la formation et la croissance d’une entité, dont la conséquence première est la création de valeur (richesse, emploi) ?
Pour en savoir davantage : https://www.institutmarianowak.org/travaux/etude-octobre-2024-lentrepreneuriat-est-il-un-vecteur-degalite-des-chances/