Est-ce que les territoires ont encore du pouvoir et une pertinence économique ?


« Territoires et innovation »,Datar, travaux en ligne N°9 , lu mai 2012

Ce travail est l’aboutissement d’un processus collectif. Pendant deux ans une trentaine d’experts et d’acteurs (chercheurs en sociologie, en géographie, en économie, en sciences politiques, architectes, artistes, scientifiques, chefs d’entreprises, banquiers, fonctionnaires européens, nationaux, territoriaux, développeurs locaux, élus) ont réfléchi ensemble sur le rôle du territoire dans l’innovation

 

« Tout territoire possède des capacités d’innovation et de croissance, encore faut-il les identifier et les mobiliser (investissements et expériences accumulées, énergie et créativité des individus, proximité physique qui facilite les rencontres, climat de confiance qui accélère les décisions, etc.). Le territoire est le lieu d’un processus endogène qui va de l’émergence de l’innovation en amont à la capitalisation des connaissances en aval.

Ce processus s’articule en trois grandes étapes :

 

1. La première étape est celle de l’initialisation des collectifs territoriaux. Il s’agit de l’amorçage des idées et de la création de projets nouveaux.

 

2. L’étape de structuration est celle de la conception et de l’organisation économique, politique et financière. Pendant la phase de structuration, l’enjeu est de garantir la création d’entreprises pérennes :

• D’une part, en permettant aux acteurs économiques et territoriaux de se rencontrer sur des enjeux sociétaux ; on permet l’émergence de bouquets d’entreprises autour de problématiques convergentes. Dès lors que l’on inscrit ces relations dans une perspective de long terme, elles peuvent mettre des moyens et des projets en commun. Cela permet de dépasser la taille critique là où chacune se heurterait à des problèmes de seuil de rendement, d’accès aux marchés ou aux ressources.

• D’autre part, il faut profiter de l’inscription de chaque acteur local dans des réseaux plus vastes : la mobilisation et l’activation au bénéfice du « territoire » de ces réseaux ouvre un nombre beaucoup plus grand de contacts et de solutions à chacun. Cela concerne les questions de financement comme les problèmes techniques ou industriels.

 

3. La phase d’ancrage permet la réappropriation et le réinvestissement de cette expérience dans le territoire et la diffusion d’une culture de « Territoire Innovant » facilitant le réamorçage du processus.

 

Quatre groupes d’acteurs sont impliqués dans une boucle locale d’innovation, ils forment les bases du « carré de l’innovation » :

• les entreprises et investisseurs potentiellement intéressés et initiateurs ;

• les vecteurs de généralisation, qu’ils soient prescripteurs, financeurs, consultants, etc. ;

• les chercheurs et enseignants, qui ont vocation à approfondir et élargir le socle de connaissances ;

• les collectivités et les citoyens qui permettent de légitimer et élargir les questionnements.

 

En faisant travailler ensemble des acteurs positionnés différemment sur la chaîne de la valeur (fournisseurs, transformateurs, prescripteurs, clients, sphère de la recherche et experts, fonctions supports associées telles que les assurances), le développement de « l’écosystème intellectuel local » permet de :

– renforcer la capacité d’analyse stratégique de la filière, et donc la pertinence des investissements

– renforcer sa connaissance du marché

– renforcer la compétence collective autour de fonctions clés

– faire émerger une dynamique créative pour répondre efficacement au marché.

 

Cette nouvelle approche du développement et de l’aménagement des territoires présente deux spécificités :

– Elle suppose de ne plus faire de grands schémas déclinés en projets pour adopter une logique beaucoup plus souple : l’idée est plutôt d’accompagner un processus susceptible d’engendrer des projets.

– Une autre spécificité est son caractère ouvertement expérimental : le regain d’intérêt des démarches expérimentales marque le renouveau d’une approche plus « micro » et « contextuelle » des politiques publiques. Il ne s’agit plus de mettre en place une nouvelle politique à l’échelle de tout le pays mais d’accompagner une expérience sur des territoires cibles, sans nécessairement avoir en tête une généralisation »