La mondialisation a bousculé notre capacité de compétitivité industrielle


"La mondialisation a amené l’industrie française à se spécialiser sur ses points forts", Le 4 pages de la DGE N°76, octobre 2017

La production manufacturière française a diminué de 3% entre 2000 et 2016, période durant laquelle elle a été fortement affectée par la crise économique et financière puis celle de la zone euro. Depuis 2000, la production a également diminué en Italie (- 8% jusqu’en 2014) mais a fortement progressé en Allemagne (+25% jusqu’en 2015).

Toutefois la valeur ajoutée a progressé de 14% en volume entre 2000 et 2016, favorisée par la délocalisation d’activités à faible valeur ajoutée, comme par exemple l’assemblage, ou par une plus forte intégration verticale des entreprises au sein des chaînes d’activité industrielle, ce qui n’a pas empêché un recul du poids de l’industrie dans le PIB dans les années 2000, de 14% à 10%, suivi d’une stabilisation.

 

La mondialisation a conduit à la spécialisation de l’industrie française dans des branches de haute technologie, qui ont fortement bénéficié de l’ouverture et du développement de marchés à l’étranger (construction aéronautique et spatiale, industrie pharmaceutique), mais aussi dans les industries du luxe et les boissons (le vin); par contre l’industrie allemande, impliquée dans la haute technologie a plus progressé que la France dans la fabrication de produits informatiques, électroniques et optiques, qui a au contraire stagné en France.

 

La mondialisation a entraîné le recul de nombreuses branches de basse et moyenne-basse technologie fortement exposées à la concurrence des pays émergents et en voie de développement, telles la branche « textile, habillement, cuir et chaussures », la cokéfaction-raffinage, la branche « bois, papier et imprimerie » ainsi que dans la métallurgie et la fabrication de produits métalliques. Auparavant, point fort de l’industrie manufacturière française, l’industrie automobile a fortement décroché à partir de 2005. 

 

L’industrie française a faiblement profité de la mondialisation des échanges. Située à 5,3% en 2000, sa part de marché mondiale à l’exportation a en effet reculé à partir de 2003, pour atteindre 3,4% en 2015, une dégradation qui concerne à la fois les marchés de la zone euro et ceux hors zone euro. La restructuration du commerce mondial a touché de nombreux autres pays européens, comme l’Italie et le Royaume-Uni, dont les parts de marché à l’exportation ont également diminué depuis 2000. 

 

La mondialisation des échanges s’est accompagnée d’une forte dégradation du solde manufacturier français (de +13Md€ en 2002 à -45Md€ en 2016), qui est désormais en déficit structurel, contrairement aux soldes allemands (+ 319Md€) et italiens (+89Md€).

L’industrie française enregistre un déficit très élevé avec la Chine (-30Md€ en 2016) et l’ensemble de l’Union européenne (-26Md€, dont -14Md€ avec l’Allemagne); son solde n’est toutefois que légèrement déficitaire vis-à-vis des États-Unis (-3Md€) et reste fortement excédentaire avec le Royaume-Uni (+12Md€), l’Afrique (+12Md€) et les pays du Proche et Moyen-Orient (+10Md€).

 

La baisse structurelle de l’emploi manufacturier est en partie compensée par l’externalisation de près d’un million d’emplois dans les services. 

 

En baisse de 26% depuis 2000, l’emploi diminue plus rapidement que la production manufacturière sous l’effet de gains de productivité du travail plus élevés que dans le reste de l’économie (+2,9% par an en moyenne entre 2000 et 2015 vs +0,9% dans l’ensemble de l’économie). L’emploi salarié manufacturier direct s’est également contracté dans l’ensemble de l’Union européenne (-16% depuis 2000, mais -4% en Allemagne).

 

Cette baisse structurelle est en partie compensée par la création de nombreux emplois externalisés dans le secteur des services (ingénierie, R & D, logistique, etc.) correspondant à des activités auparavant réalisées en interne par l’industrie. Au total, près d’un million d’emplois dans les services seraient aujourd’hui dus à l’activité industrielle, soit une augmentation de 73% depuis 1978.

Depuis 2013, le recul de l’emploi direct est aussi partiellement compensé par un recours accru à l’intérim, qui représente désormais 9% de l’emploi total.

 

L’emploi salarié direct résiste toutefois dans certains secteurs forts de l’industrie manufacturière française comme les matériels de transport autres que l’automobile (+ 12%), l’industrie pharmaceutique (-1%) et les industries agroalimentaires (-5%). 

 

Les exportations mondiales de biens augmentent en moyenne de 2,8% par an depuis 2011, beaucoup moins rapidement qu’entre 1995 et 2007 (+7,4% par an). Ce ralentissement pourrait refléter des transformations structurelles (tremblement de terre au Japon et inondations en Thaïlande en 2011, hausse du coût de la main-d’œuvre en Chine, montée en puissance technologique de la Chine comme de pays émergents).