15 aires urbaines concentrent 70% des créations nettes d’emploi


"Dynamiques et inégalités territoriales : enjeux", France Stratégie, juillet 2016

La France s’inscrit dans le mouvement mondial de métropolisation; les 15 aires urbaines de plus de 500 000 habitants que compte la France rassemblent aujourd’hui 40% de la population, 55% de la masse salariale et 70% des créations nettes d’emplois privés entre 2007 et 2014; elles représentent plus de 50% de l’activité économique; le PIB par habitant y est 50% plus élevé, la métropole parisienne représentant à lui seul 1/3 du PIB français total; elles concentrent aussi les activités d’enseignement supérieur et de recherche et les 2/3 des étudiants.  

 

4 grands constats :  

 

1 La distribution des qualifications ne suffit pas à expliquer les performances productives des grandes villes; la réussite provient aussi d’effets de rendements, associés aux externalités positives de connaissance et de circulation de l’information permises par la densité urbaine. La seule concentration ne suffit pas à engendrer la performance : parmi les grandes aires urbaines, certaines ont connu une augmentation rapide de l’emploi entre 2007 et 2012 (Rennes, Nantes, Bordeaux, Toulouse, Lyon), tandis que d’autres voyaient l’emploi baisser (Douai-Lens, Rouen, Strasbourg, Nice, Toulon). La concentration de la population n’a toutefois pas que des effets positifs : problèmes de transports, de pollution, de sécurité, prix de l’immobilier élevés, part importante des populations pauvres (45% de la population en quartier difficile réside dans les unités urbaines de Paris, Lyon, Marseille et Lille) :

2 La désindustrialisation a amorcé une dynamique de divergence régionale : les régions du nord-est décrochent par rapport au reste du pays La part de l’industrie dans la valeur ajoutée totale a baissé fortement dans toutes les régions; l’Île-de-France (et avant tout Paris et sa couronne) a vu le poids de l’industrie décliner le plus fortement, se réorientant massivement vers les services à haute valeur ajoutée ; Rhône-Alpes a réussi également sa reconversion, tout en conservant un poids relativement élevé à l’industrie; en revanche, la désindustrialisation du nord et de l’est s’est accompagnée d’un déclin économique significatif (Hauts-de-France, Bourgogne-Franche-Comté, Grand-Est et Centre-Val de Loire), avec un décrochage du PIB par habitant, comparé au sud-ouest et au Sud-Est . L’indice synthétique de développement humain (IDH 2 évalué par l’Insee) en 2009 était le plus faible en Nord-Pas-de-Calais, Picardie, Champagne-Ardenne et Corse et le plus élevé en Île-de-France, Midi-Pyrénées et Rhône-Alpes.  

 

3 Des écarts persistant d’opportunités individuelles entre territoires : entre 2000 et 2015, inertie très forte des taux de chômage, avec un niveau particulièrement élevé dans les Hauts-de France et sur la façade méditerranéenne; le chômage de masse s’est transformé en situation normale. La probabilité de connaître une promotion sociale varie fortement selon le département de naissance; ces écarts s’expliquent par des taux d’accès à l’enseignement supérieur pouvant varier du simple au double d’un territoire à un autre.  

 

4  Des politiques territoriales aux objectifs mal définis et peu cohérents : les transferts jouent un rôle fondamental pour redistribuer les revenus; après redistribution, le revenu disponible brut des ménages d’Île-de-France est 20% au-dessus de la moyenne française, alors que le PIB par habitant est 60% au-dessus de la moyenne. L’inégalité de revenu disponible est beaucoup moins marquée que l’inégalité de PIB par habitant. Si par le jeu des transferts sociaux et de l’emploi public, la dépense publique joue un rôle de péréquation, en revanche, les politiques territoriales à proprement parler ne semblent pas répondre à des finalités claires; les dispositifs se sont multipliés, certains se chevauchent, voire même apparaissent contradictoires; leur multiplication et celle des acteurs rend très difficiles la lisibilité et l’évaluation; la Cour des comptes pointe en particulier le cas de la politique de la ville. Les dépenses publiques d’éducation et de formation varient peu en fonction des caractéristiques des territoires; la dépense de la formation professionnelle des chômeurs est significativement inférieure dans les régions où les taux de chômage sont les plus élevés.